Ère Shōwa (1926-1989) — Wikipédia

Ère Shōwa
L'empereur Shōwa
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L’ère Shōwa (昭和時代, Shōwa-jidai?, litt. « ère de paix éclairée ») est la période de l’histoire du Japon où l’empereur Shōwa (Hirohito) régna sur le pays. Elle débute le et s’achève le .

Elle est aussi l’ère japonaise (年号, nengō?, littéralement « le nom de l'année ») qui suit l’ère Taishō et précède l’ère Heisei. Ce fut le plus long règne de tous les empereurs japonais. Jusqu'à la défaite militaire du Japon en 1945 et l'adoption de la constitution de 1947, le nom officiel utilisé par l'État japonais était, comme lors des ères Meiji et Taishō, empire du Japon (Dai Nippon Teikoku). En 1947, avec la nouvelle constitution, le pays adopte le nom officiel de « Japon » (Nihon koku ou Nippon koku, littéralement « État du Japon »).

La première partie du règne de Hirohito se caractérise par de fortes influences nationalistes (nationalisme japonais) et l'expansion de l'empire. Après les bombardements atomiques d'Hiroshima et Nagasaki et la reddition du Japon à la fin de la Seconde Guerre mondiale, l'occupation du Japon dura jusqu’en 1952 ; en , le traité de San Francisco restaura la souveraineté du Japon.

Chronologie succincte[modifier | modifier le code]

Hirohito et Shirayuki

Profitant de la guerre de Corée, le Japon s'industrialise et se reconstruit rapidement, c'est le début du miracle économique japonais.

Dès la fin des années 1960, le Japon a le 2e produit national brut au monde, c'est le Boom Izanagi.

  • 1989 : mort de l'empereur Hirohito.

L'économie japonaise jusqu'en 1945[modifier | modifier le code]

La crise monétaire internationale qui se traduit par la forte dévaluation de la livre sterling en 1931 accentue ses difficultés commerciales, car elle rend plus difficiles ses exportations et dévalue ses avoirs en livres. Or, comme dans les autres pays, la banque centrale émet des yens en contrepartie de ses réserves d'or et de sterling ; la base monétaire se rétrécissant, la masse monétaire se contracte. Le ministre des Finances Junnosuke Inoue accepte d'adopter alors une politique de déflation du même type que celles qui sont ou seront conduites en Allemagne par Heinrich Brüning ou en France par Pierre Laval. Le raisonnement est le même : si les prix internationaux baissent, si les avoirs de la banque centrale diminuent ou baissent de valeur, les salaires doivent baisser aussi afin que les produits japonais soient concurrentiels. Il réduit donc autoritairement les salaires des fonctionnaires et, comme la Grande-Bretagne en 1925, va conserver l'étalon-or qui met le yen à une parité surévaluée. Cette politique accentue les effets sociaux de la crise, le chômage grimpe à 20 % des actifs salariés et les inégalités progressent : le revenu net moyen par famille de l'agriculteur n'excède pas les 20 dollars par an, la moyenne du Japon étant de 166 $ et de 2 500 $ pour les 10 % les plus riches. Le mécontentement s'accumule, la situation sociale se tend tandis que la volonté d'Inoue de réduire le budget de l'État japonais se heurte aux intérêts du puissant complexe militaro-industriel japonais lorsqu'il veut réduire les dépenses militaires, il est contraint de démissionner le lors de la chute du gouvernement du premier ministre Wakatsuki. Inoue est assassiné le , ainsi que le premier ministre Tsuyoshi Inukai quelques semaines plus tard, le .

Korekiyo Takahashi remplace Inoue aux Finances après son assassinat en 1932. À 77 ans, il a eu un parcours original. Issu d'une famille pauvre, il a voyagé aux États-Unis, enseigné l'anglais à son retour avant de se retirer dans un monastère zen d'où il est sorti à 35 ans. Entré à la Banque du Japon, il en devient le directeur trois ans après. À l'image de Keynes, c'est lui qui a négocié la question des crédits pendant la guerre. Plusieurs fois ministre avant la Première Guerre mondiale, il revient donc aux affaires à 77 ans et restera ministre des Finances jusqu'en 1936.

À peine installé, il abandonne l'étalon-or et laisse flotter le yen à la baisse. Celui-ci perdra 40 % en un an. Les 100 ¥ sont à près de 50 $ en 1931 (49,85) ils tombent aux alentours de 30 $ en 1932 (31.20 en ) et s'y maintiendront malgré la dévaluation du $ (30,25 $ après la dévaluation américaine de 1933). Cette dévaluation brutale et sauvage relance immédiatement les exportations et permet le redressement des prix qui retrouvent en 1933 leur niveau de 1930 (près de 20 % de hausse).

Sous l'impulsion de l'État, l'appareil industriel se restructure, se redéploie et se concentre. Les modifications structurelles se manifestent par le fait que dans l'entre-deux-guerres, la part du textile chute régulièrement (de la zone des 40 % de la valeur de la production industrielle en 1920 à moins de 20 % - 17,9 - en 1940) tandis que celle des industries mécaniques monte de 15 à 24 % et celle de la métallurgie de façon encore plus spectaculaire de moins de 5 % (4,2) à presque 20 % (19,9 exactement). Les zaibatsu (formes de concentrations japonaises à base de capital familial et à vocation à la fois industrielle et bancaire) se renforcent. Ayant une base ou des intérêts puissants dans l'industrie lourde (et donc l'armement), elles ont souvent été accusées d'avoir pesé d'un grand poids dans la politique japonaise (dès cette époque, on parle largement de la corruption institutionnalisée de la classe politique) et d'avoir entraîné le pays sur la voie du militarisme et de l'expansionnisme agressif. En 1936, sur moins de 100 000 compagnies (88 145) moins de 500 (430) détiennent plus de la moitié (55 %) du capital industriel. De nouvelles concentrations, telles que celle qui devait donner naissance à Nissan, apparaissent. Le chômage baisse et l'économie semble se redresser en ayant extériorisé ses problèmes.

Car les exportations japonaises augmentent de manière qui semble agressive à ses partenaires. Les produits « made in Japan » ont la même image de produits bas de gamme et bon marché que certains produits « made in China » aujourd'hui mais ils pénètrent les marchés occidentaux les mieux protégés. Le Japon arrive ainsi à exporter des montres en Suisse, des spaghettis en Italie, des vélos en Afrique, des stylos en Autriche, etc. Aussi, bien que la part des produits japonais dans le commerce mondial ne dépasse pas les 4 %, les pays européens prennent la décision de se protéger et de contingenter les importations nippones.

Les marchés se bouchant, le capitalisme japonais bascule brutalement dans la voie allemande. Le poids de la contrainte a été discuté par des historiens qui repoussent une explication jugée trop « économique ». La thèse est discutée car le poids du Japon dans le commerce mondial serait faible et de nombreux pays étaient autant intéressés par le marché japonais que les Japonais l'étaient à exporter. Ainsi la balance commerciale vis-à-vis des États-Unis devient déficitaire pour le Japon à cause de la baisse des ventes de soie (contraction des marchés et développement de la rayonne, c'est-à-dire de soie artificielle) et de l'augmentation des achats de machines nécessaires pour le développement de l'industrie lourde. On ne peut que constater néanmoins que, dans un climat de récession mondiale, de contraction des marchés, la « voie allemande », c'est-à-dire le basculement de l'économie dans l'économie de guerre, la mobilisation de l'appareil industriel et économique du pays pour la conquête forcée de marchés apparaît comme une réponse possible voire cyniquement nécessaire pour la bourgeoisie japonaise. Comme en Allemagne, cette politique agressive implique la mobilisation de la population et le sacrifice de la consommation populaire. C'est l'industrie lourde, base de l'industrie d'armements, et non les industries de consommation qui doit se développer (c'est l'alternative classique : « le beurre ou les canons »).

La montée du militarisme[modifier | modifier le code]

« Le luxe est notre ennemi » (Zeitaku wa teki da!), clame une affiche de propagande du gouvernement en 1940.

La situation politique se tend alors et dans ces années 1930, des tentatives de coup d'État se succèdent. Après les assassinats de 1932, il y a des complots éventés. Le poids du budget d'armement dans le budget de l'État ne cesse de progresser : 27 % en 1927, 35 % en 1933, 46 % en 1936. En 1936, on assiste à un véritable coup d'État militaire, l'incident du 26 février. Au matin, les militaires de la Kōdōha investissent les ministères et assassinent Takahashi à son tour ainsi qu'un certain nombre de dignitaires du régime. Ces militaires s'opposent à une faction rivale, la Tōseiha, et souhaitent établir une dictature impériale ainsi que l'élimination des conglomérats commerciaux (zaibatsu). La révolte est matée trois jours plus tard sur ordre personnel de Hirohito, qui menace de prendre la tête de l'armée.

Avec la nomination de Fumimaro Konoe comme Premier ministre, le lobby militaro-industriel prend définitivement le contrôle de la politique interne du pays. En 1937, Hirohito autorise l'invasion de la Chine — guerre sino-japonaise (1937-1945) —, qualifiée de « guerre sainte » (seisen) et constituant la première étape de la politique impérialiste du Japon. Sous Konoe sont alors mis en place le Mouvement national de mobilisation spirituelle, la Ligue des parlementaires adhérant à la guerre sainte et l'Association de soutien à l'autorité impériale.

En 1941, l'empereur autorise la conquête de l'Asie du Sud-Est dans le but de créer la sphère de coprospérité de la Grande Asie orientale. La guerre du Pacifique se poursuit jusqu'en 1945, avec la défaite des forces shōwa et l'occupation du Japon.

Réunion de l'Association de soutien à l'autorité impériale (Taisei Yokusankai) en 1942

La défaite[modifier | modifier le code]

La situation militaire du Japon dans la guerre du Pacifique se dégrada rapidement en 1944. En 1945, les États-Unis débarquèrent sur le sol japonais et organisèrent d'importants bombardements. Les attaques nucléaires américaines sur Hiroshima et Nagasaki, ainsi que l'invasion de la Mandchourie par l'Union soviétique amenèrent à la capitulation inconditionnelle du Japon.

La reconstruction du Japon[modifier | modifier le code]

Après 1952, l'économie du pays se rétablit et permit le retour de la prospérité sur les îles. Le Japon devint progressivement l'une des principales puissances économiques mondiales.

Table de conversion[modifier | modifier le code]

Pour convertir les années du calendrier grégorien entre 1926 et 1989 vers les années du calendrier japonais de l'ère Shōwa, 1925 doit être soustrait de l'année en question.

Shōwa 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16
AD 1926 1927 1928 1929 1930 1931 1932 1933 1934 1935 1936 1937 1938 1939 1940 1941
Shōwa 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32
AD 1942 1943 1944 1945 1946 1947 1948 1949 1950 1951 1952 1953 1954 1955 1956 1957
Shōwa 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48
AD 1958 1959 1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972 1973
Shōwa 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64
AD 1974 1975 1976 1977 1978 1979 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989

Annexes[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Dufourmont Eddy, Histoire politique du Japon (1853-2011), Presses universitaires de Bordeaux,
  • Jean-Jacques Tschudin et Claude Hamon, La société japonaise devant la montée du militarisme : Culture populaire et contrôle social dans les années 1930, Picquier,
  • Michael Lucken, Grenades et amertume. Les peintres japonais à l’épreuve de la guerre 1935-1952, Les Belles Lettres,
  • Edward Behr, Hiro-Hito: L'empereur ambigu, éd. Livre de Poche, 1991