Église grecque-catholique ukrainienne — Wikipédia

Église grecque-catholique ukrainienne
Image illustrative de l’article Église grecque-catholique ukrainienne
Carte des éparchies d'Ukraine
Nom local Українська греко-католицька церква
Union à Rome 1595-1596
(Union de Brest)
Primat actuel Sviatoslav Schevchuk
Siège Kiev, Ukraine
Territoire primaire Ukraine
Extension territoriale Pologne, États-Unis, Canada, Brésil, Argentine, Australie, Europe occidentale
Rite Byzantin (var. ukrainienne)
Langue(s) liturgique(s) Ukrainien
Population estimée 6 500 000

L'Église grecque-catholique ukrainienne (EGCU, également appelée Église gréco-catholique ukrainienne) est une des Églises catholiques orientales. C'est une Église archiépiscopale majeure, comme défini dans le Code des canons des Églises orientales[1]. Son chef porte le titre d’« archevêque majeur de Kiev et de Galicie », avec résidence à Kiev. Le siège est occupé par Sviatoslav Chevtchouk, élu par le synode des évêques de l’Église le et confirmé le suivant par le pape[2].

L'Église grecque-catholique est, par la taille, la troisième Église d’Ukraine avec près de 8 % de la population. Il existe deux autres Églises catholiques en Ukraine (toutes deux unies à Rome) : l'Église catholique de rite latin et l'Église grecque-catholique ruthène.

Nom[modifier | modifier le code]

L'Église grecque-catholique ukrainienne est également connue sous d'autres noms :

  • Église grecque-catholique ukrainienne,
  • Église catholique ukrainienne de rite byzantin,
  • Église catholique ukrainienne,
  • Église catholique kiévienne,
  • Église catholique de Kiev.

Histoire[modifier | modifier le code]

Concile de Florence[modifier | modifier le code]

Le métropolite de Kiev et de Moscou, Isidore, adhère, au nom de l’Église russe, à l’union des Églises prononcée au concile de Florence en 1439. De retour à Moscou en 1441, il échoue dans sa tentative d'imposer l'Union. Le prince Vassili II le fait enfermer dans un couvent et libère l’Église russe de la tutelle des Byzantins[3]. Il est remplacé par le métropolite Jonas, élu en 1448, par le Synode de Moscou, sans le consentement du patriarche de Constantinople. Isidore ayant démissionné, le pape Calixte III (1455-1458) nomme Grégoire Bulhar métropolite ruthène de Kiev. À partir de ce moment, les métropoles de Kiev et de Moscou sont séparées.

Au XVe siècle, la métropole de Kiev tente, sans succès, de se rapprocher de Rome.

Unions avec Rome[modifier | modifier le code]

  • 1595-1596, union de Brest : décision de la métropole de Kiev de se placer sous la juridiction de Rome. La Ruthénie (actuelle Ukraine) faisait alors partie de la république des Deux Nations (Pologne et Lituanie en majorité catholiques). Établissement de l'Église grecque-catholique ukrainienne.
  • 1646, union d'Užhorod : Décision de 63 prêtres orthodoxes de Ruthénie subcarpatique de se placer sous la juridiction de Rome. La Ruthénie subcarpatique faisait alors partie du royaume de Hongrie. Établissement de l'Église grecque-catholique ruthène.
  • 1698, Synode d'Alba Iulia : Union à Rome des Roumains orthodoxes de Transylvanie alors sous la domination directe des Habsbourg. Établissement de l'Église grecque-catholique roumaine.

Ces unions donnent lieu au terme d'Église uniate, fréquemment employé jusqu'au concile Vatican II, mais à présent considéré comme péjoratif et démodé.

Luttes confessionnelles[modifier | modifier le code]

Une grande partie des Ruthènes refusa l'Union. Avec l'appui des Cosaques zaporogues, un métropolite orthodoxe fut ordonné à Kiev, en 1620, par le patriarche de Jérusalem Théophane. En 1623, le cofondateur de l'Ordre basilien, Josaphat Kountsevitch fut assassiné par des orthodoxes ; il fut reconnu martyr et saint depuis (premier saint gréco-catholique canonisé par Rome). En 1632, la Diète polonaise entérina la présence de deux métropoles (orthodoxe et grecque-catholique) à Kiev. Le partage de l'éphémère État ukrainien (1649-1667) entre la Pologne et la Russie entraîna l'intégration de la métropole orthodoxe de Kiev dans le patriarcat de Moscou.

L'Église grecque-catholique se trouva prise en étau entre les orthodoxes et les tentatives polonaises de latinisation.

À partir du XVIIIe siècle et des partages de la Pologne, les autorités tsaristes eurent une attitude hostile envers les fidèles de l'Église grecque-catholique sur le territoire qu'ils administraient. L'Église fut formellement interdite au XIXe siècle. À l'opposé, ceux qui vivaient au sein de l'Empire austro-hongrois, puis, après la Première Guerre mondiale, en Pologne, ne furent pas inquiétés ; un des fruits de cette attitude bienveillante fut la création, en 1892, des Servantes de Marie Immaculée, premier ordre catholique féminin créé en terre ukrainienne.

Sous le communisme[modifier | modifier le code]

  • De 1940 à 1944, l'Église est dirigée par le métropolite André Cheptytsky, frère de Clément Sheptytsky ; et de 1944 à 1987, par le cardinal Josyf Slipyj, vite arrêté par les autorités communistes.
  • 1945 : Les Églises gréco-catholiques ukrainienne et ruthène sont rattachées de force à l'Église orthodoxe russe (en URSS). L'Église continue d'exister dans la diaspora (et clandestinement en Ukraine). L'opération d’annexion de l'Église grecque-catholique ukrainienne par l'Église orthodoxe russe en 1945 est dirigée par Staline[4]. Une lettre de de Nikita Khrouchtchev à Joseph Staline et révélée en 2009[5], prouve que les dirigeants soviétiques ont été directement impliqués dans la liquidation de l'Église catholique uniate d'Ukraine. « Lorsque j'étais à Moscou, je vous ai informé sur le travail accompli en vue de la destruction de l'Église uniate et sur l'intégration des religieux dans l'Église orthodoxe », écrit Nikita Khrouchtchev, alors chef du PC d'Ukraine, dans cette lettre datée du et issue des archives du Parti communiste de l'Union soviétique.

Ces écrits confirment les thèses défendues par de nombreux historiens sur le sort subi par l'Église grecque-catholique, implantée principalement dans l'ouest de l'Ukraine.
Les évêques de cette Église, accusés de collaboration avec les forces allemandes pendant l'occupation, avaient été arrêtés simultanément le et condamnés aux travaux forcés.

  • En 1946, sous l'impulsion d'un « comité pour la réunification de l'Église grecque-catholique avec l'orthodoxie », le clergé grec-catholique est intégré de force à l'église orthodoxe du Patriarcat de Moscou, résiliant le lien avec Rome datant de 1596. Le , lors du « Synode de Lvov », 204 prêtres gréco-catholiques abjurent « l'hérésie latine », tandis que la hiérarchie ecclésiale et les prêtres refusant la « conversion » obligatoire à l'orthodoxie sont déportés et internés au goulag[6].
    L’Église gréco-catholique continue dans la clandestinité. Les prêtres perpétuent le culte clandestinement, certains prennent le chemin de l'exil.

En 1963, Josyf Slipyj, auparavant nommé ainsi cardinal secrètement par le pape Jean XXIII (donc in pectore), fut libéré et put participer au concile Vatican II pendant lequel son rang de cardinal fut publiquement révélé.

Depuis la chute du communisme : rétablissement et tensions avec l'Église orthodoxe[modifier | modifier le code]

  •  : Les Églises gréco-catholiques ukrainienne et roumaine sont rétablies mais les autorités de ces deux pays à majorité orthodoxe refusent de leur restituer les biens confisqués (monastères, églises, écoles) et attribués aux Églises orthodoxes.

Le , le cardinal Myroslav Ivan Lioubatchivsky prend possession de la cathédrale de Lviv.

L'Église gréco-catholique revendique aujourd'hui plus de six millions de fidèles en Ukraine, répartis dans plus de 3 600 paroisses[7].

Jean-Paul II est connu pour avoir été le grand défenseur de la communauté gréco-catholique ukrainienne. La sortie des catacombes de cette Église fut l'un des moments les plus émouvants de son pontificat.

Transfert du siège à Kiev[modifier | modifier le code]

Le , le siège de l'Église a été officiellement transféré de Lviv à Kiev la capitale. Le titre du primat a évolué d'Archevêque majeur de Lviv à Archevêque majeur de Kiev et de Galicie.

Le changement de siège est devenu une nouvelle source de tension entre l'Église orthodoxe russe et l'Église catholique. L’Église orthodoxe ukrainienne (patriarcat de Moscou) en la personne d'Alexis II s'y oppose fermement et a demandé au pape Benoît XVI d’annuler ce transfert. Le transfert de siège avait déjà été étudié précédemment mais freiné par le Vatican qui ne souhaitait pas dégrader ses relations avec l'Église orthodoxe russe[8].

Le pape François refuse en 2018 que l’archevêque majeur, Sviatoslav Chevtchouk, devienne un patriarche, une aspiration de longue date des gréco-catholiques, mais qui risquerait de nuire aux relations œcuméniques avec l'Église orthodoxe russe[9].

Organisation[modifier | modifier le code]

Organisation territoriale[modifier | modifier le code]

Ukraine

La cathédrale gréco-catholique Saint-Georges de Lviv en Ukraine, église principale d’une archéparchie métropolitaine.

Il est prévu que les éparchies à nom double, dénotant un diocèse ayant deux centres urbains majeurs, seront séparées en deux éparchies distinctes dès que le nombre de prêtres y exerçant sera suffisant pour ce faire. Les exarchats archiépiscopaux sont des structures missionnaires mises en place par l'archevêque majeur de Kiev et destinées à devenir des éparchies lorsqu'elles auront atteint un nombre suffisant de prêtres et de fidèles.

Russie

Pologne

France, Suisse et Bénélux

Grande-Bretagne

Allemagne

Italie

Canada

L’église Saint-Jean-Baptiste d’Ottawa au Canada, rattachée à l’éparchie de Toronto.

États-Unis

Brésil

Argentine

Australie

  • Éparchie de Saint-Pierre-et-Paul à Melbourne (partie de la province ecclésiastique latine de Melbourne)

Instituts religieux[modifier | modifier le code]

Université[modifier | modifier le code]

L'Université catholique ukrainienne (UCU) a été inaugurée à Lviv le .

Relations avec les autres Églises[modifier | modifier le code]

Mouvements centrifuges[modifier | modifier le code]

Une minorité de tendance traditionaliste a fondé la Fraternité sacerdotale Saint-Josaphat[10] de rite byzantin avec l'appui de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X. Elle confère les Ordres majeurs dans le rite ruthène. Les tensions sont vives avec l'Église grecque-catholique ukrainienne car, outre son refus d'un trop grand œcuménisme, la Fraternité Saint-Josaphat préfère, lors de ses offices, user du slavon ancien et garder certaines pratiques latines.

En 2009 a été fondée l'Église grecque-catholique orthodoxe ukrainienne.

Relations avec l'Église catholique romaine[modifier | modifier le code]

Un mouvement existe au sein de l'Église grecque-catholique ukrainienne (clergé et fidèles) pour sa reconnaissance par Rome en tant qu'Église patriarcale[11].

L’Église est représentée au Conseil des conférences épiscopales d’Europe (CCEE), parmi une petite quarantaine de membres, dont deux autres représentants des Églises du territoire ukrainien[12].

Relations avec les Églises orthodoxes[modifier | modifier le code]

Les relations avec les Églises Orthodoxes, particulièrement le patriarcat de Moscou, sont tendues.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Code des canons des Églises orientales (lire en ligne), titre V : « Les Églises archiépiscopales majeures », canons 151 à 154.
  2. (en) « His Beatitude Sviatoslav » [« Sa Béatitude Chevtchouk »], sur catholicukes.au, site de l’Église grecque-catholique ukrainienne en Australie, Nouvelle-Zélande et Océanie (consulté le ).
  3. La Russie et le Saint-Siège. Études diplomatiques, de Paul Pierling.
  4. Staline a voulu la fin de l’Église gréco-catholique d'Ukraine.
  5. Agence de presse internationale catholique, « Ukraine: Staline a dirigé la liquidation de l’Eglise grecque catholique », sur cath.ch, .
  6. Pseudo-synode de Lviv de 1946.
  7. (en) « The Church today | Ukrainian Greek-Catholic Church », sur Ukrainian Greek Catholic Church (consulté le ).
  8. « Mise en garde du patriarche de Moscou aux uniates », sur cath.ch, .
  9. Jacques Berset, « Les gréco-catholiques d'Ukraine sacrifiés sur l'autel de l'œcuménisme ? », sur cath.ch, .
  10. (uk) « Site officiel de la fraternité Saint-Josaphat » (consulté le ).
  11. « L’Église gréco-catholique ukrainienne voudrait être élevée au rang de patriarcat – Portail catholique suisse », sur cath.ch (consulté le ).
  12. (en) « Members » [« Membres »], sur ccee.eu, site du Conseil des conférences épiscopales d’Europe (consulté le ).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Antoine Arjakovsky, Entretiens avec le cardinal Lubomyr Husar : vers un christianisme post-confessionnel, Parole & Silence, Paris, 2005 (ISBN 2845733119).
  • Charles de Clercq, Conciles des Orientaux catholiques, in Histoires des Conciles d’après les documents originaux, Librairie Letouzey et Ané, Paris, 1949 et 1952.
  • Lidiya Houbytch et Svitlana Hourkina, Persécutés pour la Vérité : les gréco-catholiques ukrainiens derrière le rideau de fer, Lviv, Université catholique d'Ukraine, 2018.
  • Didier Rance, Catholiques d'Ukraine : Un pays, une Église, un message, Éditions Artège, Paris, 2022 (ISBN 979-10-336-1316-9).

Filmographie[modifier | modifier le code]

Dans le film Les Souliers de saint Pierre de 1968, l'acteur Anthony Quinn incarne l'archevêque métropolite gréco-catholique ukrainien de Lviv, Kiril Pavlovitch Lakota, libéré d'un goulag soviétique pour être envoyé à Rome et y devenir peu de temps après pape. Un film marquant qui aurait inspiré le président Richard Nixon dans sa stratégie à l'égard de Pékin. Un film prémonitoire aussi, dix ans avant l'élection de Karol Wojtyla au trône pontifical.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Il existe une catégorie consacrée à ce sujet : Église grecque-catholique ukrainienne.

Liens externes[modifier | modifier le code]