Aghlabides — Wikipédia

Aghlabides
(ar) Banu al-Aghlab (بنو الأغلب)

800909

Drapeau
Drapeau des Aghlabides
Description de cette image, également commentée ci-après
Étendue maximale de la dynastie Aghlabide[note 1]
Informations générales
Statut Émirat semi-indépendant, nominalement vassal ou sujet des abbassides, mais indépendant de facto depuis 801[1],[2]
Capitale Kairouan puis al-Abbasiyya
Langue(s) Arabe
Religion Islam (hanafisme)
Monnaie Dinar aghlabide[3]
Histoire et événements
800 Ibrahim ibn al-Aghlab est nommé émir de l'Ifriqiya par le pouvoir abbasside
801 Indépendance vis-à-vis des abbassides
827-902 Conquête de la Sicile
909 Conquête et chute de la dynastie par les Fatimides
Émirs
(1er) 800-812 Ibrahim ibn al-Aghlab
(Der) 903-909 Ziadet Allah III

Entités précédentes :

Entités suivantes :

Les Aghlabides (en arabe : الأغالبة) ou Banu al-Aghlab (en arabe : بنو الأغلب) sont une dynastie d'émirs de la tribu arabe des Banu Tamim[4], qui gouvernent l'Ifriqiya (actuelle Tunisie, est de l’Algérie et la Tripolitaine) nominalement, au nom du calife abbasside, à partir de 800, puis la Sicile, après sa conquête, jusqu'à son renversement par le nouveau pouvoir des Fatimides, en 909.

Histoire[modifier | modifier le code]

Contexte[modifier | modifier le code]

La naissance de l’émirat aghlabide en Ifriqiya intervient au terme d’un demi-siècle de troubles politiques et religieux consécutifs à la grande révolte berbère de 740. En 750, le califat omeyyade s’effondre, et la nouvelle dynastie des Abbassides de Bagdad ne parvient pas à établir d’une manière permanente leur autorité sur la province d'Ifriqiya. La dynastie des gouverneurs Mouhallabides, fidèles aux nouveaux califes abbassides, doit affronter les révoltes des contingents arabes (jund).

Fondation[modifier | modifier le code]

Dinar d'or de 4,2 g d'Ibrahim ibn al-Aghlab, anonyme (mais un motto dynastique « Ghalab » est visible sur le revers), nom du différent inconnu (probablement à Kairouan), frappé en 807-808. Préservé au Musée national d'art islamique de Raqqada.

En 800, le calife abbasside Haroun ar-Rachid nomme Ibrahim ibn al-Aghlab, fils d'un commandant arabe du khorasan[5] de la tribu des Banu Tamim[4], comme émir héréditaire de l'Ifriqiya en réponse à l'anarchie qui a régné dans la province à la suite de la chute des Mouhallabides. À cette époque, il y a peut-être entre 100 000 et 250 000 Arabes vivant en Ifriqiya, bien que les Berbères (Imazighen) constituent toujours la grande majorité de ses habitants[6].

Ibrahim doit contrôler une zone qui englobait l'Est de l'Algérie, la Tunisie et la Tripolitaine[7]. Il établit l’administration de la dynastie à partir des Zibans et choisit Kairouan comme capitale. Bien qu'indépendante dans tous les domaines, la dynastie n'a jamais cessé de reconnaître nominalement la suprématie abbasside. Les Aghlabides payent un tribut annuel au calife abbasside et leur suzeraineté est référencée dans la khutba, lors des prières du vendredi[8].

Après la pacification du pays, Ibrahim ibn al-Aghlab établit sa résidence dans une nouvelle capitale, al-Abbasiyya. Elle est fondée en dehors de Kairouan, en partie pour prendre ses distances avec l'opposition des juristes et théologiens malékites, qui condamnent ce qu'ils ont observé comme la luxueuse vie des Aghlabides (pour ne pas mentionner le fait que les Aghlabides sont Mutazilites en théologie et fiqh hanafite en jurisprudence), et n'apprécient pas le traitement inégal envers les Berbères musulmans. En outre, des défenses frontalières (ribat) sont mises en place à Sousse et à Monastir. Les Aghlabides développent également l'irrigation de la zone et améliorent les bâtiments publics et les mosquées d'al-Abbasiyya[7].

Conquête aghlabide de la Sicile[modifier | modifier le code]

Une caractéristique majeure des Aghlabides est que, malgré les différences politiques et les rivalités présentes entre les Aghlabides, les Abbassides, et l'Émirat de Cordoue, les musulmans d'Espagne sont transportés par voie maritime, également sous le règne d'Asba ibn Wakil, pour aider à la conquête aghlabide de la Sicile. Ibn Kathir rapporte qu'une force conjointe de 300 navires omeyyades et aghlabides est présente[9]. La garnison aghlabide de Mineo réussit à entrer en contact avec les Omeyyades d'Andalousie qui acceptèrent immédiatement l'alliance, à condition qu'Asbagh soit reconnu comme commandant général et, avec de nouvelles troupes d'Ifriqiya, ils marchèrent sur Mineo. Théodotus se retira à Enna et le siège de Mineo fut brisé (en juillet ou )[10],[11],[12]. L'armée combinée Ifriqiyenne et andalouse incendie ensuite Mineo et assiège une autre ville, peut-être Calloniana (actuelle Barrafranca). Cependant, une peste éclate dans leur camp causant la mort d'Asbagh et de beaucoup d'autres. La ville tombe plus tard, en automne, mais le nombre d'Arabes s'est réduit considérablement. Par la suite, ils doivent l'abandonner et se retirent à l'ouest. Théodotus s'est lancé à leur poursuite, et leur inflige de lourdes pertes, de sorte que la plupart des Andalous ont quitté l'île. Cependant, Théodotus est également tué à ce moment-là, peut-être dans l'une de ces escarmouches[13],[14].

Sous le règne de Ziyadat Allah Ier (817-838), éclate en 824 une révolte des troupes arabes, qui n'est pas étouffée avant 836, avec l'aide des Berbères. La conquête musulmane de la Sicile de 827 sous Assad ibn al-Furat est une tentative de garder les troupes indisciplinées sous contrôle - la conquête s'achève lentement, et seulement en 902, est pris le dernier avant-poste byzantin. Des raids de pillage en Italie continentale, qui comprennent le sac des basiliques romaines en 846[15], ont lieu jusqu'au xe siècle. Peu à peu, les Aghlabides perdent le contrôle des forces arabes en Sicile et une nouvelle dynastie, celle les Kalbides, y émerge.

Apogée[modifier | modifier le code]

Le royaume aghlabide atteint son apogée sous le règne d'Ahmed ibn Mohammed al-Aghlabi (856-863). L'Ifriqiya est une puissance économique importante grâce à son agriculture fertile, aidée par l'expansion du système d'irrigation romain. Elle devient le point focal du commerce entre le monde islamique et Byzance et l'Italie, en particulier la lucrative traite des esclaves. Kairouan devient le centre d'apprentissage le plus important au Maghreb, notamment dans le domaine de la théologie et du droit, et un lieu de rassemblement pour les poètes. Les émirs aghlabides patronnent également des projets de construction, notamment la reconstruction de la mosquée d'Oqba et le royaume développe un style architectural qui combine l'architecture abbasside et byzantine[16].

Déclin et chute[modifier | modifier le code]

Le déclin de la dynastie commence sous Ibrahim II (875-902). Une attaque des Toulounides d'Égypte doit être repoussée et une révolte des Berbères est étouffée au prix de lourdes pertes humaines pour les forces aghlabides. En outre, en 893, la mission ismaélite dirigée par Abou Abdallah al-Chii prend racine chez les berbères Ketamas. En 902, Obeïd Allah al-Mahdi et sa troupe Kutama fanatisée prennent les villes de Kairouan et Raqqada et obtiennent un serment d'allégeance du peuple. Le succès des Fatimides est fulgurant et le dernier émir aghlabide, Ziyadat Allah III, s’enfuit vers l’Orient en 909. En conséquence, la dynastie aghlabide est renversée et remplacée par les Fatimides[17].

Culture[modifier | modifier le code]

Bassins des Aghlabides (actuelle Kairouan, en Tunisie).

Sous le règne des Aghlabides, la grande mosquée de Kairouan et la Zitouna de Tunis deviennent des centres d'enseignement fort réputés par la valeur des docteurs qui y professent le droit.

Moyennant le payement d'un impôt appelé kharaj et l'observation de certaines restrictions sociales, les chrétiens et les juifs restés en Ifriqya après l'invasion arabe parviennent à conserver leur religion et leurs lieux de culte. À cette époque, il existe une communauté chrétienne à Tunis, Kairouan et des archevêchés existent notamment à Tozeur, Mahdia et Carthage. Vers 893, un schisme divise les évêques d'Afrique qui envoient des délégués à Rome pour soumettre leur différend au pape.

La présence de non-musulmans dans l'enceinte des médinas n'étant toutefois pas tolérée après la fermeture des portes de la ville, les chrétiens et juifs devaient loger extra muros.

Architecture[modifier | modifier le code]

Les Aghlabides furent des grands constructeurs qui embellirent beaucoup de villes de leur royaume. C'est notamment sous leur règne que la mosquée Zitouna est achevée dans sa totalité et que la grande mosquée de Kairouan connaît de grands travaux de réfection et d'agrandissement qui lui donnent sa physionomie définitive[18].

Dynastie[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. The occupation of Sardinia by the Aghlabids is debated among historians. See article for details.

Références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Greville Stewart Parker Freeman-Grenville et Stuart Christopher Munro-Hay, Islam: An Illustrated History, Bloomsbury Publishing USA, (ISBN 9781441165336, lire en ligne), p. 57
  2. (en) Anthony Ham, Libya. Ediz. Inglese, Lonely Planet, (ISBN 9781740594936, lire en ligne), p. 33
  3. (en) John H. Pryor, Logistics of Warfare in the Age of the Crusades: Proceedings of a Workshop Held at the Centre for Medieval Studies, University of Sydney, 30 September to 4 October 2002, Ashgate Publishing, Ltd., (ISBN 9780754651970, lire en ligne), p. 187
  4. a et b (en) C.E. Bosworth, The New Islamic Dynasties, Columbia University Press, , p. 31
  5. C. Edmund Bosworth, « 2. Additions to The New Islamic Dynasties », dans Living Islamic History, Edinburgh University Press, (lire en ligne), p. 14–31
  6. (en) Charles André Julien et Roger Le Tourneau, Histoire de L'Afrique du Nord, Praeger, (lire en ligne), p. 42
  7. a et b Arthur Goldschmidt, A concise history of the Middle East, Boulder, Colorado, Westview Press, , 79 p. (ISBN 0-8133-3885-9)
  8. (en) Laroui, The History of the Maghrib, (1re éd. 1977), p. 116
  9. Idris, Ravane El Hareir, Mbaye, The Spread of Islam Throughout the World, UNESCO, (ISBN 9231041533, lire en ligne), p. 441
  10. Bury (1912), p. 304
  11. Treadgold (1988), p. 273-274
  12. Vasiliev (1935), p. 127-128
  13. Treadgold (1988), p. 274
  14. Vasiliev (1935), p. 128-129
  15. (en) Barbara M. Kreutz., Before the Normans: Southern Italy in the Ninth and Tenth Centuries, University of Pennsylvania Press, , p. 57
  16. (en) « Aghlabids », Dictionary of Islamic Architecture,‎ (lire en ligne)
  17. Akbar Najeebabadi, The History of Islam V.3, Riyadh, Darussalam, , 235 p. (ISBN 978-9960-89293-1)
  18. M'hamed Hassine Fantar, De Carthage à Kairouan : 2 000 ans d'art et d'histoire en Tunisie, Paris, Agence française d'action artistique, , p. 23
  19. Il entreprend la conquête de la Sicile.
  20. Il assiège Rome qu'il occupe deux mois et regagne Kairouan avec un fabuleux butin.
  21. La fin de son règne est marquée par le despotisme et de nombreux assassinats. Pris de remords, il abdique et finit sa vie en Sicile.
  22. Fils du précédent, il est marqué par la violence de son père. Adhérant au soufisme, il renonce au luxe de ses palais. Il est assassiné dans son sommeil par des partisans de son fils qu'il a voulu emprisonner à cause de la liberté de ses mœurs.
  23. Il ne peut empêcher la poursuite du déclin de sa dynastie. Alors que son armée est écrasée, il abdique et s'enfuit à Bagdad avant de s'établir en Palestine.

Annexes[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Y. B., « Les Aghlabides (800-909) », Qantara,‎ (lire en ligne)
  • Jacques Godrechot, Histoire de Malte, éd. Presses universitaires de France, coll. Que sais-je ?, Paris, 1970.
  • Alexandre Lézine, Architecture de l'Ifriqiya, recherches sur les monuments aghlabides, éd. Klincksieck, Paris, 1966.
  • John Samut Tagliaferro, Malte. Archéologie et histoire, éd. Casa Editrice Plurigraf, Narni (Italie)/Miller Distributors Ltd, Luqa (Malte), 2000.
  • Mohamed Talbi, L'émirat aghlabide : 184-296, 800-909, éd. Librairie d'Amérique et d'Orient, Paris, 1966.
  • Glaire D. Anderson et al.,The Aghlabids and their Neighbors - Art and Material Culture in Ninth-Century North Africa, éd. Brill, nov 2017.
  • Maurice Vonderheyden, La Berbérie orientale sous la dynastie des Benoû l-Aṛlab, 800-909, Paris: Geuthner, 1927.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]