Anne-Catherine de Ligniville Helvétius — Wikipédia

Anne-Catherine de Ligniville Helvétius
Portrait d’Anne-Catherine de Ligniville Helvétius par Louis-Michel van Loo.
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 78 ans)
AuteuilVoir et modifier les données sur Wikidata
Sépulture
Nom de naissance
Anne-Catherine de Ligniville d'AutricourtVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Activités
Famille
Conjoint
Enfants
Élisabeth Charlotte Helvétius (d)
Adélaïde Helvétius (d)Voir et modifier les données sur Wikidata

Anne-Catherine de Ligniville d'Autricourt épouse Helvétius, née le à Nancy et morte le à Auteuil, surnommée « Minette » par Turgot[1], est une salonnière française. Elle fut l'épouse du philosophe Claude-Adrien Helvétius.

Biographie[modifier | modifier le code]

Anne-Catherine de Ligniville appartenait à l’une des plus illustres maisons de Lorraine (de celles baptisées « grands chevaux de Lorraine »). Elle est fille de Jean-Jacques de Ligniville, chambellan du duc de Lorraine Léopold Ier et de Charlotte Élisabeth de Soreau[2] d'Houdemont (1700-1762), nièce du peintre Jacques Callot et filleule de la duchesse de Lorraine, née Élisabeth-Charlotte d'Orléans, nièce du roi de France Louis XIV. Elle est aussi la petite-cousine de Françoise de Graffigny, qui offrit de prendre soin d’elle, la mena, avec son aînée, à Paris, où elle lui fit rencontrer Turgot et Helvétius[3], le philosophe et fermier général.

Le , elle épousa Helvétius à Paris, par contrat de mariage ; il renonce pour elle à sa charge de fermier général.

Le couple a quatre enfants, dont Élisabeth Charlotte (1752-1799), qui épouse en 1772 Alexandre François, comte de Mun, marquis de Sarlabous, et Geneviève Adélaïde (1754-1847), qui épouse en 1772 Antoine François, comte d'Andlau (1736-1818). Ce dernier, élu député de la noblesse aux états généraux de 1789 prendra le parti du Tiers-état.

Le salon[modifier | modifier le code]

Madame Helvétius a tenu un salon où ont figuré, sur près de cinq décennies, de grandes figures des Lumières.

Pendant onze ans, elle a animé le salon, ouvert par son mari rue Sainte-Anne en 1760, où se réunissaient, tous les mardis, pendant quatre mois de l'année, de nombreuses amis dans des « déjeuners philosophiques »[3].

Veuve en 1772 , elle s'installa en son hôtel du 59, rue d'Auteuil, où elle tint un cénacle appelé « société d'Auteuil », qui comprenait, parmi les habitués, des femmes telles que Julie de Lespinasse ou Suzanne Necker, qui y voisinèrent avec des écrivains comme Fontenelle, Diderot, Chamfort, Duclos, Saint-Lambert, Marmontel, Roucher, Saurin, André Chénier ou encore Volney.

Des penseurs brillants et hardis causeurs[4] comme Condorcet, d’Holbach, Turgot, l’abbé Sieyès, l’abbé Galiani, Destutt de Tracy, l’abbé Beccaria, l’abbé Morellet, Buffon, Condillac ou l’abbé Raynal y figurèrent, aux côtés de scientifiques comme d’Alembert, Lavoisier, Cuvier ou Cabanis, à qui elle léguera sa maison[5].

On y vit également des artistes comme le sculpteur Houdon, le baron Gérard et des personnalités de l’édition comme Charles-Joseph Panckoucke ou François-Ambroise Didot.

Parmi les personnalités politiques qui fréquentèrent le salon d’Anne-Catherine Helvétius, on trouve Malesherbes, Talleyrand, Manon Roland et son mari Roland de la Platière, Thomas Jefferson, Thomas Paine, Mirabeau, Pierre Daunou, Garat, Nicolas Bergasse, François Andrieux ou Napoléon Bonaparte et Franklin, qui la surnomma « Notre-Dame d'Auteuil » et la demanda en mariage.

Madame Helvétius était aussi renommée pour son amour des animaux. À ses 18 chats angoras tenaient compagnie des chiens, des canaris et autres oiseaux.

L'altercation[modifier | modifier le code]

Le salon fut, en , sous la Révolution, le lieu de la dispute survenue entre Cabanis et l’abbé Morellet, qui avait pris parti pour les propriétaires nobles de la région de Tulle dans un conflit qui les opposait au nouveau conseil municipal de la ville voisine de Brive. Le Mémoire des députés de la ville de Tulles rencontra l’opposition de Cabanis, qui était originaire de la région de Brive. Rejeté par La Roche et Cabanis, Morellet avait quitté le salon d’Anne-Catherine Helvétius, à qui il ne rendait plus visite que le matin[6]. « C’est ainsi que s'est fermé pour moi un asile que je m’étais préparé pour ma vieillesse par des soins, une assiduité, un attachement, qui méritaient peut-être une autre récompense »[7].

Morte en 1800 à l'âge de 78 ans, elle est d'abord inhumée dans son jardin puis sa dépouille est transférée au cimetière d'Auteuil en 1817[8].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Car on la disait rusée comme une jeune chatte.
  2. Noté parfois Saureau.
  3. a et b Guy de La Prade (préf. Guy Chaussinand-Nogaret), L’Illustre Société d'Auteuil 1772-1830 : ou, La fascination de la liberté, Paris, Fernand Lanore, , 381 p. (ISBN 978-2-85157-065-9, présentation en ligne), p. 101.
  4. Jean Paul de Lagrave, David Warner Smith et Marie-Thérèse Inguenaud, Madame Helvétius et la Société d’Auteuil, Oxford, Voltaire Foundation, , xviii, 142, 24 cm (ISBN 978-0-7294-0647-5, OCLC 1014854263, lire en ligne), p. 74.
  5. Félix-Sébastien Feuillet de Conches, Les Salons de conversation au dix-huitième siècle, Paris, Charavay frères, , xiv-227, in-16 (lire en ligne), p. 10.
  6. Lucien Picqué, Louis Dubousquet, « L’Incident du salon de Madame Helvétius (Cabanis et l’abbé Morellet) », Bulletin de la société française d’histoire de la médecine, t. 17, 1914, p. 181-96.
  7. André Morellet, Mémoires, t. I, p. 388.
  8. Jacques Hillairet, Dictionnaire historique des rues de Paris, Les Éditions de Minuit, septième édition, 1963, t. 1 (« A-K »), « Rue Claude-Lorrain », p. 352.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Peter Allan, Une édition critique de la correspondance de Madame Helvétius : avec introduction biographique, Toronto, University of Toronto, 1975.
  • Jules Bertaut, Égéries du XVIIIe siècle : madame Suard, madame Delille, madame Helvétius, madame Diderot, mademoiselle Quinault, Paris, Plon 1928, 257 p.
  • Benjamin Franklin, M. F—n [Franklin] à Madame H—s [Helvétius], Passy, imp. par Benjamin Franklin, 1779.
  • Simone Gougeaud-Arnaudeau, Madame Helvétius (1722-1800) : une femme au temps des Lumières, Paris, Ed. l'Harmattan, coll. Biographies, 2020.
  • Antoine Guillois, Le Salon de madame Helvétius ; Cabanis et les idéologues, New York, B. Franklin, 1971.
  • Claude-Adrien Helvétius, Correspondance générale d’Helvétius, Éd. Peter Allan, Alan Dainard et al., Toronto, University of Toronto Press, 1981-2004 (ISBN 978-0-80205-517-0).
  • Arsène Houssaye, Histoire du 41e fauteuil de l’Académie Française, Paris, L. Hachette et cie, 1856.
  • Guy de La Prade (préf. Guy Chaussinand-Nogaret), L’Illustre Société d'Auteuil 1772-1830 : ou, La fascination de la liberté, Paris, Fernand Lanore, , 381 p. (ISBN 978-2-85157-065-9, présentation en ligne).
  • Jean Paul de Lagrave, David Warner Smith et Marie-Thérèse Inguenaud, Madame Helvétius et la Société d’Auteuil, Oxford, Voltaire Foundation, , xviii, 142, 24 cm (ISBN 978-0-7294-0647-5, OCLC 1014854263, lire en ligne)
  • Lucien Picqué, Louis Dubousquet, « L’Incident du salon de Madame Helvétius (Cabanis et l’abbé Morellet) », Bulletin de la société française d’histoire de la médecine, t. 17, p. 281-296, 1914.
  • Jules Auguste Troubat, Essais critiques, Madame Helvétius, Paris, Calmann-Lévy, 1902.

Article connexe[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]