Annette Wieviorka — Wikipédia

Annette Wieviorka
Annette Wieviorka en 2012.
Fonction
Directrice de recherche au CNRS
Biographie
Naissance
Voir et modifier les données sur Wikidata (76 ans)
ParisVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Formation
Activités
Fratrie
Conjoints
Roland Trotignon (d) (de à )
Henri RaczymowVoir et modifier les données sur Wikidata
Enfants
Nicolas Trotignon (d)
Mathilde Raczymow (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Autres informations
A travaillé pour
Directrice de thèse
Partenaires
Claudine Drame (d), Geneviève Decrop (d), Régine Waintrater (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Genre artistique
Distinctions
Archives conservées par
Œuvres principales
  • Déportation et génocide : entre la mémoire et l'oubli (thèse, 1992)
  • L'Ère du témoin (2002)
  • Auschwitz, 60 ans après (2005)
  • Mes années chinoises (2021)
  • Tombeaux, autobiographie de ma famille (2022)

Annette Wieviorka, née le à Paris, est une historienne française, spécialiste de la Shoah et de l'histoire des Juifs au XXe siècle depuis la publication en 1992 de sa thèse, Déportation et génocide : entre la mémoire et l'oubli, soutenue en 1991 à l'université Paris-Nanterre[2].

Biographie[modifier | modifier le code]

Enfance et famille[modifier | modifier le code]

Les grands-parents paternels d'Annette Wieviorka, Juifs polonais, furent arrêtés à Nice pendant la guerre et sont morts à Auschwitz. Le grand-père, Wolf Wieviorka, est né le à Żyrardów. La grand-mère, Rosa Feldman, est née le à Siedlce. Leur dernière adresse à Nice est au 16 rue de la Reine-Jeanne. Ils sont déportés par le convoi no 61, en date du , du camp de Drancy vers Auschwitz. Le père d’Annette Wievorka, réfugié en Suisse, et sa mère, fille d’un tailleur parisien, réfugiée à Grenoble, survécurent à la guerre[3],[4]. Elle est la sœur de Michel, Sylvie et Olivier Wieviorka.

Elle grandit à Vanves, en banlieue parisienne, puis à Ermont, en Seine-et-Oise. Elle fréquente l'école publique, qui a pour elle « une importance capitale ». Elle pratique le scoutisme laïque, au sein des Éclaireurs de France[5].

En 2022, elle publie le livre Tombeaux, conçu comme une « autobiographie de [sa] famille »[6].

Formation[modifier | modifier le code]

Annette Wieviorka est agrégée d'histoire (1989) et docteur en histoire (1991). Sa thèse, dirigée par Annie Kriegel, s'intitule Déportation et génocide : oubli et mémoire 1943-1948 : le cas des juifs en France. Cette thèse a donné lieu à une publication en 1992 par Plon[7]. Elle est rééditée en 2003 aux éditions Hachette.

Engagements[modifier | modifier le code]

Durant les années 1970, Annette Wieviorka est engagée politiquement dans le mouvement maoïste. En 1970, elle effectue un premier voyage en Chine. Le Monde note qu'elle n'a « rien pu ou voulu voir des massacres de masse et de la nature totalitaire du régime communiste, dont la brutalité était pourtant à son paroxysme en pleine Révolution culturelle ». De 1974 à 1976, elle y revient, comme professeur de langue française à Canton. Commentant son ouvrage Mes années chinoises (2021), où elle reprend une bonne partie de la matière de son premier livre L'Écureuil de Chine publié en 1979, elle indique avoir alors été comme d'autres « dans un mouvement d’admiration pour la révolution chinoise qui nous empêchait de découvrir la réalité du régime »[8]. Elle se remet pourtant en cause à son retour : « Quand je suis rentrée en France, j’ai traversé une période de crise profonde, une grave dépression au cours de laquelle j’ai remis en cause tout ce que je pensais, tout ce en quoi je croyais »[5].

Elle est membre du comité de soutien de l'Association Primo Levi (soins et soutien aux personnes victimes de la torture et de la violence politique)[9].

Elle est élevée en 2021 à la dignité de grand-officier dans l'ordre national du Mérite[10].

Carrière universitaire[modifier | modifier le code]

Directrice de recherche au CNRS[11], elle a été membre de la mission d'étude sur la spoliation des Juifs de France, dite mission Mattéoli[12].

Elle est membre du comité d'orientation de l'association Siriaténou, consacrée au livre juif.

Elle est directrice de recherche honoraire au CNRS[13], et vice-présidente du Conseil supérieur des archives[14] depuis 2019[13], (elle succède à Christine Nougaret, professeure à l’École nationale des Chartes[15]).

Vie privée[modifier | modifier le code]

Annette Wieviorka a épousé en 1970 Roland Trotignon, dont elle a eu un fils, Nicolas, mathématicien, directeur de recherche au CNRS. Elle s'est ensuite remariée avec Henri Raczymow, avec qui elle a eu une fille, Mathilde.

L'heure d'exactitude : Histoire, mémoire, témoignage[modifier | modifier le code]

L'heure d'exactitude : Histoire, mémoire, témoignage[16] est un livre d'entretiens d'Annette Wieviorka réalisé à partir d'une interview de Séverine Nikel[17], paru chez Albin Michel en 2011.

Dans ce livre, elle tente une synthèse de la mémoire de la Shoah et ses évolutions marquantes et s'efforce de répondre au pourquoi du succès actuel de cette question, les malentendus qu'il implique, le sens du devoir de mémoire et de ce qu'est un témoin et s'intéresse à la portée de cette notion.

Elle note les progrès réalisés dans la diffusion de cette notion, du travail de mémoire accompli depuis les débuts où il n'y avait guère que « les cadres sociaux de la mémoire de Halbwachs ou l’entretien de Pierre Nora avec J.-B. Pontalis, paru dans la Nouvelle revue de psychanalyse. » Il s'est produit une conjonction entre la volonté des porteurs de mémoire d'apporter leur témoignage et des historiens. La mémoire de la Shoah est devenue un des socles de l’unification européenne, non sans répercussions sur la reconstruction historique, les témoignages et leurs enjeux.

L'ère du témoin[modifier | modifier le code]

Dans cet ouvrage, Annette Wieviorka montre que le témoignage est devenu une pratique non seulement courante, mais impérative : recueil de témoignages, collecte d'archives, histoire orale, etc. Il s'agit de témoigner sur les mondes disparus, mais aussi sur les expériences vécues par les acteurs. En ce sens, l'« ère du témoin » constitue un tournant mémoriel, mais aussi historiographique. À ce propos, Yves Chevalier fait remarquer que le témoignage arrive au croisement d'un défi, « traiter avec respect la souffrance d’autrui tout en gardant la liberté de jugement nécessaire à l’élaboration d’un discours scientifique sur les faits »[18].

Tombeaux[modifier | modifier le code]

À propos de Tombeaux, le magazine Télérama écrit que « ce livre est vraiment bien plus qu’un hommage : un accomplissement »[19].

À propos de son livre, elle déclare en 2022 : « Toute ma vie, j’ai tourné autour de ce livre, peut-être mon dernier, par exemple en interviewant mon père dans les années 1970. J’ai mis du temps à me lancer, et j’ai souhaité me détacher de la veine un peu psychanalytique qui explore "ce que la Shoah nous a fait". J’ai essayé de m’effacer pour faire revivre mes ancêtres, sans pathos ni surplomb »[20].

Publications[modifier | modifier le code]

Filmographie[modifier | modifier le code]

  • Le procès d'Adolf Eichmann, écriture par Annette Wieviorka et Michaël Prazan, réalisation de Michaël Prazan, 1997.
  • 14 récits d'Auschwitz, série documentaire proposée par Annette Wieviorka, créatrice et écrivaine, avec Henri Borlant, réalisation de Caroline Roulet, 2002.
    Ce documentaire a été réalisé dans le cadre de la participation d'Annette Wieviorka au programme Fortunoff Video Archive for Holocaust Testimonies (en) de l'université Yale. Tout en notant son sentiment ambivalent en tant qu'historienne à l'égard de ces témoignages des survivants de la Shoah dont certains ont un caractère « si imprécis et, osons le dire, parfois fantaisiste » alors que d'autres « en revanche, sont exceptionnels et permettent parfois à ceux qui ont raconté pour la première fois leur histoire, comme Stanislaw Tomkiewicz ou Henri Borlant d'entreprendre la rédaction d'un livre », Annette Wieviorka souligne leur importance « pour les survivants et aussi pour leur descendance »[21].
  • Témoignages pour Mémoire, écriture par Annette Wieviorka, Geneviève Decrop, Claudine Drame, et Régine Waintrater (traduction anglaise de Ruth Rachel Anderson-Avraham, aussi productrice du film), réalisation de Claudine Drame, 2007.
  • Le procès d'Adolf Eichmann (Infrarouge), écriture par Annette Wieviorka et Michaël Prazan, réalisation de Michaël Prazan, 2011.

Distinctions[modifier | modifier le code]

Récompense[modifier | modifier le code]

  • Annette Wieviorka a reçu le prix Mémoire de la Shoah en 2000[22].
  • Tombeaux. Autobiographie de ma famille a reçu le prix Femina Essai 2022[5].

Décorations[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. « https://www.siv.archives-nationales.culture.gouv.fr/siv/POG/FRAN_POG_05/p-4kl48typ9--h5nnjkpt5ecg »
  2. SUDOC 012150304.
  3. Annette Wieviorka.
  4. Marie-Françoise Masson, « Annette Wieviorka, historienne au nom de ses grands-parents », sur la-croix.com, La Croix, (consulté le ).
  5. a b et c « Annette Wieviorka : « À mon retour de Chine, j’ai remis en cause tout ce que je pensais » », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  6. Frédérique Roussel, « Annette Wieviorka, les vies d'un arbre généalogique », Libération,‎ , p. 26 (lire en ligne).
  7. « Déportation et génocide : oubli et mémoire 1943-1948 : le cas des juifs en France », sur theses.fr.
  8. « Annette Wieviorka : « Je vivais sur l’image d’une Chine qui n’existait pas » », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  9. Organigramme de l'Association Primo Levi : http://www.primolevi.org/index.php/presentation/organisation-de-lassociation
  10. « Ordre national du Mérite : Annette Wieviorka et Charles Dantzig dans la promotion », sur ActuaLitté.com (consulté le ).
  11. « IRICE - Wieviorka Annette », sur irice.univ-paris1.fr (consulté le ).
  12. art Astro, Alan. "Annette Wieviorka." Jewish Women : A Comprehensive Historical Encyclopedia. 1 March 2009. Jewish Women's Archive.
  13. a et b Arrêté du 22 mai 2019 portant nomination au Conseil supérieur des archives (lire en ligne)
  14. « Le Conseil supérieur des archives (CSA) » Accès libre, sur Journal officiel, (consulté le ).
  15. « Annette Wieviorka devient vice-présidente du Conseil supérieur des archives », sur ActuaLitté.com (consulté le ).
  16. Annette Wieviorka (entretiens avec Séverine Nikel), L'heure d'exactitude : histoire, mémoire, témoignage : entretiens avec Séverine Nikel, Paris, A. Michel, coll. « Itinéraires du savoir », , 248 p. (ISBN 978-2-226-20894-1, OCLC 759036899, BNF 42533100).
  17. Séverine Nikel est rédactrice en chef - responsable des collections - de la revue L’Histoire.
  18. Yves Chevalier, « Wieviorka (Annette), L’Ère du témoin », Archives de sciences sociales des religions, visible sur https://journals.openedition.org/assr/20611
  19. Valérie Lehoux, « Tombeaux », telerama.fr, 30 août 2022.
  20. Juliette Bénabent, « Sonia Devillers, Annette Wieviorka… : des histoires de famille qui racontent la grande Histoire », Télérama, 3 octobre 2022.
  21. Séverine Nikel, Annette Wieviorka, L'Heure d'exactitude ; Histoire, mémoire, témoignage, Albin Michel, 2011 (ISBN 9782226208941) [EPUB] emplacement 2239-2280 sur 3600.
  22. « Fondation Jacob Buchman - Fondation du Judaïsme Francais », sur fondationjudaisme.org (consulté le ).
  23. Décret du 14 mai 1998 portant promotion et nomination.
  24. Décret du 13 mai 2005 portant promotion et nomination.
  25. Décret du 14 novembre 2013 portant promotion et nomination.
  26. « Nomination dans l'ordre des Arts et des Lettres septembre 2016 », sur culture.gouv.fr (consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Article connexe[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]