Déclaration d'indépendance de la Belgique — Wikipédia

Carte des dix-sept provinces composant le royaume uni des Pays-Bas et dont les huit provinces méridionales proclamèrent leur indépendance sous le nom de « Belgique » le . Le Luxembourg étant et demeurant possession personnelle du roi des Pays-Bas.

La déclaration d'indépendance de la Belgique désigne les deux textes promulguant la sécession des huit[1] provinces méridionales du royaume uni des Pays-Bas sous le nom de « Belgique », à la suite de la révolution belge entamée le .

Elle est d'abord proclamée de manière unilatérale par le Gouvernement provisoire au travers d'une déclaration d'indépendance, le puis est ensuite ratifiée officiellement le par un décret du Congrès national. Elle est plus tard inscrite dans la Constitution belge lors de son adoption le .

L'indépendance de la Belgique est reconnue par les grandes puissances européennes réunies lors de la conférence de Londres dès le , mais il faudra attendre la fin de la guerre belgo-néerlandaise puis la signature du traité des XXIV articles, le , pour que les Pays-Bas la reconnaisse à leur tour.

Contexte[modifier | modifier le code]

Naissance du royaume uni des Pays-Bas[modifier | modifier le code]

Après la révolution française de 1789, les troupes révolutionnaires de la Première République envahissent, entre autres, le Bénélux actuel (composé grosso modo des Pays-Bas autrichiens, de la principauté de Liège et des Provinces-Unies). Les territoires sont intégrés à ce qui devient rapidement le Premier Empire français sous Napoléon Bonaparte qui y créé des départements. Parmi ceux-ci se trouvent les neuf départements réunis, qui forment les territoires de la Belgique et du Luxembourg, ainsi que la République batave qui est l'équivalent territorial des Pays-Bas actuels.

Toutefois, après de la défaite française lors de la bataille de Waterloo le , l'Empire est démembré et les puissances européennes victorieuses (Royaume-Uni et Prusse en tête) décident de créer un nouvel État sur les anciens territoires conquis par la France. Celui-ci devra être assez puissant pour contrer les éventuelles nouvelles ambitions françaises sans toutefois dépasser la puissance des états vainqueurs. Ils choisissent donc de regrouper les anciens différents territoires sous une monarchie dont le souverain sera Guillaume Ier de la maison d'Orange-Nassau.

Le , le congrès de Vienne ratifie la création du royaume uni des Pays-Bas.

Révolution et indépendance belge[modifier | modifier le code]

Cependant, le mariage entre belges et néerlandais ne se passe pas comme prévu. Les premiers, majoritairement catholiques, se sentent opprimés par les « hollandais » majoritairement protestants, notamment sur le plan politique, alors qu'ils représentent la majorité de la population. De nombreuses discordes voient le jour, révélant de profondes disparités entre les deux peuples.

La révolution belge éclate le à Bruxelles, lors de la représentation de la pièce de théâtre la Muette de Portici. C'est le début de la guerre belgo-néerlandaise. Dans ce contexte, l'indépendance est proclamée le par le gouvernement provisoire. Elle sera ensuite traduite dans le décret constitutionnel du garantissant l'indépendance nationale.

Territoire[modifier | modifier le code]

Le territoire belge tel que proclamé comme indépendant du royaume uni des Pays-Bas par le gouvernement provisoire de Belgique en 1830.

Les huit provinces sécessionnistes étaient les provinces d'Anvers, de Brabant, de Flandre-Occidentale, de Flandre-Orientale, de Hainaut, de Liège, de Limbourg et de Namur. Dès le , soit quatorze jours après la déclaration d'indépendance, le gouvernement provisoire de Belgique annexe le grand-duché de Luxembourg, territoire qui était, à l'époque, une possession personnelle de Guillaume Ier d'Orange-Nassau, roi des Pays-Bas et grand-duc de Luxembourg.

Afin de définir les frontières de la Belgique, les cinq grandes puissances européennes (l'Autriche, la France, la Prusse, le Royaume-Uni et la Russie) se réunirent lors de la conférence de Londres et proposèrent d'abord le traité des XVIII articles le , mais il fut refusé par les Pays-Bas.

La séparation des deux états fut entérinée par le traité des XXVII articles le . Il scindait alors le Grand-duché en deux, octroyant à la Belgique une neuvième province : la province de Luxembourg, en échange de quoi la province de Limbourg serait également scindée le long de la Meuse : la partie occidentale devenant le Limbourg belge et la partie orientale redevenant le duché de Limbourg, rendu à la confédération germanique en contrepartie de la perte du « Luxembourg occidental ». Mais les Pays-Bas s'opposèrent une nouvelle fois à la signature de ce traité et il fallut attendre le et la signature du traité des XXIV articles pour que la Belgique ne prenne sa forme actuelle, son territoire étant alors bien différent que celui revendiqué par les révolutionnaires de 1830. Les territoires limbourgeois et luxembourgeois restant, jusqu'alors, administrés par la Belgique, à l’exception de la forteresse de Luxembourg et de celle de Maastricht, demeurant sous le contrôle de l'armée néerlandaise.

Restaient encore quelques contentieux le long de la frontière entre la Belgique et les Pays-Bas, qui furent réglés par le Traité de Maastricht le .

La déclaration d'indépendance[modifier | modifier le code]

La déclaration d'indépendance de la Belgique se fait par un arrêté pris par le Gouvernement provisoire en date du [2] et stipule la sécession du royaume uni des Pays-Bas et la création du nouvel état. Il est suivi d'un arrêté du par lequel Guillaume Ier des Pays-Bas suspend son autorité législative et exécutive en Belgique et la représentation des provinces belges aux États généraux. A noter qu'un nouveau décret, rédigé le , exclut à perpétuité la maison d'Orange-Nassau de tout pouvoir en Belgique.

Texte[modifier | modifier le code]

« Art. 1er. Les Provinces de la Belgique, violemment détachées de la Hollande, constitueront un État indépendant.

Art. 2. Le comité central s'occupera au plus tôt d'un projet de Constitution.

Art. 3. Un Congrès National, où seront représentés tous les intérêts des provinces, sera convoqué. Il examinera le projet de Constitution Belge, le modifiera en ce qu'il jugera convenable, et le rendra, comme constitution définitive, exécutoire dans toute la Belgique. »

Le décret constitutionnel[modifier | modifier le code]

Texte[modifier | modifier le code]

La précision du décret quant au Luxembourg tient au fait que le grand-duché de Luxembourg était alors une possession personnelle de la maison d'Orange-Nassau tout en étant également un membre de la Confédération germanique. Le territoire fut finalement scindé en deux lors du traité des XXIV articles en 1839 : la partie occidentale devient la neuvième province de Belgique (la province de Luxembourg) en échange de la scission de la province de Limbourg.

Le , le gouvernement provisoire de Belgique adopte un décret constitutionnel stipulant que :

« Au nom du peuple belge,
Le Congrès national de la Belgique proclame l'indépendance du peuple belge, sauf les relations du Luxembourg avec la Confédération Germanique. »

— Décret constituant[3]

La précision quant au Luxembourg vient du fait qu'à l'époque, la province de Luxembourg n'existait pas : le grand-duché de Luxembourg était un territoire ne faisant pas partie du royaume uni des Pays-Bas mais étant une possession personnelle de la maison d'Orange-Nassau. La Belgique était donc constituée de huit provinces : Anvers, le Brabant, la Flandre-Occidentale, la Flandre-Orientale, le Hainaut, Liège, le Limbourg (qui regroupait le belge et le néerlandais), et Namur.

C'est lors du congrès de Vienne que ce territoire luxembourgeois avait été créé et légué à Guillaume Ier en échange de la perte de plusieurs de ses principautés, absorbées par la Confédération germanique (également créée lors du même congrès et qui donnera naissance à l'unification allemande quelques décennies plus tard). Le roi des Pays-Bas portait donc aussi le titre de grand-duc du Luxembourg et ces deux territoires formaient une union personnelle. Cependant, le grand-duché de Luxembourg était également un membre de la Confédération, d'où la précision apportée au texte, mentionnant les relations entre ces deux entités.

Malgré un premier traité signé dès 1831 (traité des XXVII articles)[4], il fallut attendre 1839 pour que les Pays-Bas reconnaissent les nouvelles frontières de la Belgique imposées par la conférence de Londres et que la scission du Luxembourg s’opère en échange de celle du Limbourg, via la ratification du traité des XXIV articles : la partie occidentale du grand-duché devenant la neuvième province de Belgique sous le nom de province de Luxembourg et la partie orientale restait propriété personnelle de Guillaume 1er.

Controverse[modifier | modifier le code]

Il y a aujourd'hui en Belgique une controverse sur la question de savoir si les décrets constitutionnels sont supra constitutionnels ou non, et donc, révisables ou non. Cette question concerne en particulier le décret du 24 novembre 1830.

Il est cependant envisageable de comprendre la volonté qu'avaient les membres du Congrès national afin d'expliquer cette particularité. Beaucoup estiment que si ceux-ci ont édicté ces décrets en dehors de la Constitution proprement dite, c'est pour rendre ces deux règles non révisables par la procédure de l'article 195 de la Constitution. Il semble donc que ces normes doivent être considérées comme ayant une valeur supraconstitutionnelle[5].

Cette question concerne en particulier le décret du 24 novembre 1830 qui exclut à perpétuité de tous les pouvoirs en Belgique tous les membres de la maison d'Orange-Nassau. Il semble néanmoins que cette controverse n'ait qu'un intérêt intellectuel car la jurisprudence belge a déjà admis la supériorité des normes européennes par rapport à toutes les normes de droit interne dans son arrêt « Le Ski » du [6] et il ne fait nul doute que la Cour européenne des droits de l'homme ou la Cour de justice de l'Union européenne condamnerait le décret du 24 novembre 1830 si l'application de ce dernier venait à priver une personne d'un emploi du seul fait de son appartenance à une famille.

Reconnaissance internationale[modifier | modifier le code]

Les puissances européennes reconnurent le nouvel état belge dès le lors de la conférence de Londres, mais il fallut attendre la signature du traité des XXIV articles (image) le pour que les Pays-Bas en fasse de même.

L’indépendance de la Belgique est reconnue officiellement le par la conférence de Londres qui regroupe l'Autriche, la France, la Prusse, le Royaume-Uni, la Russie. Le , la conférence proclame la neutralité et l’inviolabilité perpétuelle de la Belgique, puis propose l'établissement des frontières de la Belgique par le traité des XVIII articles, qui est refusé par Guillaume Ier qui ambitionne encore de récupérer ses territoires. A ce titre, le , les forces armées néerlandaises lancent la campagne des Dix-Jours violant l'armistice de la guerre belgo-néerlandaise imposé par la conférence le . La France envoie une armée à la rescousse des forces belges qui remportent alors la victoire.

Un nouveau traité est alors signé le  : le traité des XXVII articles qui acte la séparation officielle des deux royaumes et définit la frontière entre la Belgique et les Pays-Bas. La guerre belgo-néerlandaise s’achève finalement après la signature de la convention de Zonhoven le , mais il faut encore attendre quelques années et la signature du traité des XXIV articles, le , pour que les Pays-Bas reconnaissent officiellement l'existence et l'indépendance de la Belgique.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Le Luxembourg au sens large était alors une possession du roi des Pays-Bas, Guillaume Ier, qui en était également le Grand-Duc. Il sera scindé en 1839 par le Traité des XXIV articles et sa partie occidentale deviendra alors la neuvième province de Belgique : la province de Luxembourg. L'autre partie restera possession du roi néerlandais, puis deviendra, en 1890, l'actuel Luxembourg.
  2. Delpérée 2006
  3. Décret constituant, du 18 novembre 1830, Bulletin officiel, n°41, p.584.
  4. « Protocole du 20 janvier 1831 et Projet de traité du 26 juin 1831 (traité des XVIII articles). », sur mjp.univ-perp.fr.
  5. Dumont 2007
  6. Cass., 27 mai 1971, Pas., 1971, I, p.886.

Bibliographie[modifier | modifier le code]