Grand Liban — Wikipédia

État du Grand Liban ()
République libanaise ()

19201943

Drapeau
Drapeau
Blason
Description de cette image, également commentée ci-après
La Syrie mandataire. L'État du Grand Liban est en vert.
Informations générales
Statut République, mandat de la Société des Nations exercé par la France
Texte fondamental Constitution de 1926
Capitale Beyrouth
Langue(s) Français, arabe, arménien[réf. nécessaire], turc ottoman
Religion Islam, christianisme
Monnaie Livre libano-syrienne
Histoire et événements
Conférence de San Remo
Entrée en vigueur de l'arrêté no 318 et proclamation du général Gouraud depuis la résidence des Pins
Charles Debbas est élu président
La France accepte l'indépendance du Liban
Entrée en vigueur de l'indépendance

Entités précédentes :

Entités suivantes :

Le Grand Liban (en arabe : دولة لبنان الكبير / dawlat lubnān al-kabīr), en forme longue l'État du Grand Liban, était un État autonome qui faisait partie de la Syrie mandataire (alors administrée par la France sous un régime de mandat de la Société des Nations) entre 1920 et 1926 et qui prit le nom de République libanaise (en arabe : الجمهورية اللبنانية / al-jumhūriyya al-lubnāniyya) en 1926.

Les frontières géographiques du « Grand Liban » correspondent à celles du Liban actuel.

Historique[modifier | modifier le code]

1920 : création[modifier | modifier le code]

Le vilayet de Beyrouth est détaché en 1888 du vilayet de Syrie. Il couvre toute la région côtière de Lattaquié à Akka sauf le moutassarifat du Mont-Liban qui constitue un territoire autonome, le vilayet disparaît en 1917-1918 devant l'avance des armées de l'Entente lors de la Première Guerre mondiale en Orient. En 1920, sous le mandat français, le moutassarifat du Mont-Liban est réuni aux sandjaks de Beyrouth et Tripoli pour former l'État du Grand Liban sous tutelle française. L'autonomie du Grand Liban réclamée par le gouverneur du mont-Liban Habib Pacha es-Saad (décret du ) via la délégation du mont Liban, est signée avec la protection de la France, le dans le but de protéger la communauté chrétienne maronite, dominante sur le territoire libanais à cette époque grâce notamment à la protection française[1].

Monnaie de l'État du Grand Liban.

Le , le Congrès national syrien (en) vote l’indépendance de la Syrie et son unité intégrale avec la Palestine et la Transjordanie, et proclame l'émir Fayçal ben Hussein « roi constitutionnel » du Royaume arabe de Syrie sous le nom de Fayçal Ier.

Le , la Syrie est placée sous mandat français par la conférence de San Remo. Refusant de céder à l'ultimatum du haut-commissaire, le général Gouraud, les nationalistes dirigés par Youssef al-Azmeh sont finalement écrasés le par les troupes françaises dirigées par le général Mariano Goybet à la bataille de Khan Mayssaloun. Le roi Fayçal est contraint à l'exil.

L'arrêté no 318 du .
Proclamation de l'État du Grand Liban le depuis la résidence des Pins par le général Gouraud, entouré du patriarche maronite et du mufti sunnite[2].

L'État du Grand Liban est créé par l'arrêté no 318 du 31 août 1920 du général Henri Gouraud, représentant l'autorité française mandataire sur la Syrie, le même jour que le territoire des Alaouites (arrêté no 319), avec une entrée en vigueur le lendemain (article 3). Le général proclame l'État du Grand Liban le du haut des marches de la résidence des Pins à Beyrouth, le même jour que sont créés les États d'Alep et de Damas (arrêté no 330).

La formation du Grand Liban consiste à tracer, dans le territoire de l'Empire ottoman déchu, une frontière séparant un État syrien d'un autre libanais annexant à l'ancienne moutassarifat du Mont-Liban (circonscription autonome de l'Empire ottoman) Beyrouth, les régions de Tripoli, du Akkar, du Hermel et de la Bekaa, ainsi que de Rachaya, Hasbaya, et le Sud-Liban. L'intégration de ces zones au Grand Liban avait été souhaitée par le patriarcat maronite soucieux de la « viabilité » du futur État libanais, qui ne pouvait être assurée sans les ressources agricoles des territoires ainsi rattachés. En effet, la Grande famine du Mont-Liban pendant la Première Guerre mondiale hantait les esprits ; elle avait démontré la dépendance alimentaire du Mont-Liban à l'égard des plaines avoisinantes[3].

L'État baassiste syrien a souvent considéré ces annexions comme des amputations de la Syrie historique.

La création de l'Etat du Grand Liban coïncide avec celle de la nationalité libanaise, légalement reconnue le par l’arrêté no 2825 du Haut-Commissaire Maxime Weygand, pris en application du Traité de Lausanne de 1923[4], qui déclare que « toute personne qui était un sujet turc [c'est-à-dire ottoman] et qui résidait dans les territoires du Liban le est confirmée comme sujet libanais et est désormais considérée comme ayant perdu la citoyenneté turque [c'est-à-dire ottomane] »[5].

Cette période voit la première vague d'apatrides libanais, certains groupes sont exclus de la nationalité libanaise, afin notamment de maintenir l'équilibre démographique et confessionnel du pays.

Dans les années 1920, le Liban n'accède cependant pas encore à l'indépendance, le mandat français étant confirmé par la Société des Nations le [6].

1926 : première constitution[modifier | modifier le code]

La première constitution du Liban est proclamée le , créant un système parlementaire (initialement bicaméral, mais devenu monocaméral après la suppression du Sénat en 1927) ainsi que des postes de Président de la République et de chef du gouvernement. Le pays prend alors le nom de République libanaise. De 1934 à 1936, Habib Pacha es-Saad en devient le président. Lui succédera Émile Eddé.

1941 : accord de principe pour l'indépendance[modifier | modifier le code]

En 1941, l'invasion de la Syrie et du Liban par les Alliés entraîne l'élimination des autorités françaises vichystes. Sous la pression des Britanniques, les représentants de la France libre donnent leur accord de principe pour l'indépendance de la Syrie et du Liban, mais tentent de maintenir le contrôle français.

En , le chrétien maronite Béchara el-Khoury s'entend avec d'autres notables comme le musulman sunnite Riyad es-Solh pour partager le pouvoir entre les communautés, la présidence de la République étant réservée aux maronites, la présidence du Conseil aux sunnites, et la présidence de la Chambre aux chiites. Béchara el-Khoury, élu président de la République le , s'affirme aussitôt comme un adversaire résolu du mandat français.

1943 : indépendance[modifier | modifier le code]

Jean Helleu, nommé par la France libre représentant au Levant, s'oppose à la modification de la constitution : la Chambre de Beyrouth passe outre et abolit le mandat français en novembre. Le , Helleu fait arrêter Béchara el-Khoury et le chef du gouvernement Riyad es-Solh, Émile Eddé redevenant chef de l'État. Un gouvernement « national » libanais se constitue aussitôt dans la montagne, soutenu par le président syrien Choukri al-Kouatli et par les Britanniques. Des manifestations violentes éclatent dans tout le pays. Georges Catroux est envoyé d’urgence à Beyrouth pour rétablir le statu quo. Le , les Français libèrent les dirigeants politiques prisonniers et acceptent le principe de l'indépendance. C'est la date anniversaire que les Libanais ont retenue pour fêter l'indépendance du pays (en).

Dans les mois suivants, la France transfère toutes les compétences étatiques aux gouvernements syriens et libanais. L’indépendance politique du Liban est officielle le . La France conserve cependant jusqu’à la fin de la guerre le contrôle des troupes spéciales du Levant, et conditionne toujours l’indépendance à la conclusion d’un traité.

Les dernières troupes françaises quittent le Liban en 1946.

Économie[modifier | modifier le code]

Les autorités françaises choisissent d'axer l’économie libanaise sur le négoce, le secteur des services et les importations, jugés plus rentables à court terme. Ce système favorisa l’émergence d’une bourgeoisie compradore liée aux grands clans confessionnels. À l’indépendance, quelques milliers de ces familles constituent l'essentiel de la nouvelle élite libanaise[7].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Le grand Liban et la prise de pouvoir des maronites en 1920.
  2. Jean-Pierre Filiu, « Le défi pour Macron du centenaire du Liban », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  3. Graham Auman Pitts, «« Les rendre odieux dans tous les pays arabes » : La France et la famine au Liban 1914-1918», traduit de l’anglais par Marie-José Sfeir, Raphaële Balu, Centre d'études et de recherches sur le Proche-Orient, Les Cahiers de l'Orient, 2015/3 N° 119 | p. 33-47, ISSN 0767-6468, DOI 10.3917/lcdlo.119.0033, lire en ligne
  4. Thibault Jaulin, « Démographie et politique au Liban sous le Mandat. Les émigrés, les ratios confessionnels et la fabrique du Pacte national », Histoire & Mesure, XXIV – 1 (2009), p. 198.
  5. MARCH Lebanon, The Plight of the Rightless. Mapping and Understanding statelessness in Tripoli (mars 2019), p. 21, URL : https://www.marchlebanon.org/report/plight-of-the-rightless.
  6. « Mandat de la SDN, Syrie, Liban, 1922, Digithèque MJP », sur mjp.univ-perp.fr (consulté le ).
  7. Akram Belkaïd et Olivier Pironet, « L’urgence d’un État social et souverain au Liban », sur Le Monde diplomatique, .

Annexes[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Gérard D. Khoury, La France et l'Orient arabe : Naissance du Liban moderne 1914-1920, Armand Colin, 1993.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]