Lev Goumilev — Wikipédia

Lev Goumiliov
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Chercheur de haut niveau (d)
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Biographie
Naissance
Décès
Sépulture
Nom dans la langue maternelle
Лев Николаевич ГумилёвVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalités
Formation
Activités
Père
Mère
Autres informations
A travaillé pour
Chaire
Leading researcher (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Conflit
Maîtres
Vassili Struve, Alexandre Iakoubovski (d), Nikolaï Kiouner (en), Solomon Lourié (d), Ievguéni Tarle (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Directeurs de thèse
Nikolaï Kiouner (en), Vassili StruveVoir et modifier les données sur Wikidata
Distinctions
Liste détaillée
Médaille pour la victoire sur l'Allemagne dans la Grande Guerre patriotique de 1941-1945
Médaille du Jubilé des « 20 ans de la victoire dans la Grande guerre patriotique de 1941-1945 » (en)
Médaille du 30e anniversaire de la Victoire sur l'Allemagne
Médaille de la Bataille de Berlin
Ordre de la Guerre patriotique de 2e classe
Médaille du Jubilé des « 40 ans de la victoire dans la Grande guerre patriotique de 1941-1945 » (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Lev Goumilev (1934)

Lev Nikolaïevitch Goumilev (en russe : Лев Никола́евич Гумилёв) (18 septembre 1912 ( dans le calendrier grégorien) à Saint-Pétersbourg à Saint-Pétersbourg), plus connu en Occident sous le nom de Lev Goumiliov, est un ethnologue et un des plus influents historiens russes du XXe siècle. Il est le fils des poètes acméistes Nicolaï Goumilev et Anna Akhmatova.

Lev Goumilev est enterré au cimetière Saint-Nicolas du monastère Alexandre-Nevski à Saint-Pétersbourg.

Biographie[modifier | modifier le code]

Lev Goumilev et ses parents en 1916.

Ses parents se séparent alors qu'il est enfant. Son père est exécuté en 1921 par les bolcheviks et sa mère persécutée par le régime stalinien.

Lors de ses études universitaires, il est arrêté en 1933 et en 1935, puis chassé de l'université de Léningrad. Il est condamné à 5 ans de camps qu'il effectue au chantier du canal de la mer Blanche puis à Norilsk, où il reste de 1938 à 1956, avec une brève parenthèse pendant la Seconde Guerre mondiale, durant laquelle il est incorporé dans l'Armée rouge. Il est décoré de l'Ordre de la Guerre patriotique et reçoit les médailles pour la victoire sur l'Allemagne et la prise de Berlin. En 1949, il soutient son doctorat écrit dans les camps sur les Turks aux VIe-VIIIe siècles avant d'être à nouveau arrêté[1].

Quelques années après la mort de Staline, il travaille au musée de l'Ermitage où, sous la direction de l'historien et archéologue Mikhaïl Artamonov, il étudie le peuple khazar, puis les peuples des steppes.

Œuvre[modifier | modifier le code]

Ses théories originales sur l'apparition et la disparition des groupes ethniques développées dans son ouvrage L'Ethnogénèse et la biosphère[2] ont nourri un mouvement politique et culturel connu sous le nom de « néo-eurasisme ». Goumilev a publié en 1989 un ouvrage monumental La Russie ancienne et la Grande Steppe, dans lequel il adopte un point de vue particulier : L'étude de la Rus [ancêtre de la Russie actuelle] des origines, comme une histoire des relations russo-khazares....

Il a aussi publié:

  1. История народа хунну (Histoire du peuple hun), rééd., Moscou, 2004, (ISBN 5-17-026629-4), 5-9660-0501-X
  2. Тысячелетие вокруг Каспия (Un millénaire autour de la mer Caspienne), réed. Moscou, 2008, (ISBN 978-5-17-051463-2), 978-5-9713-9145-6, 978-985-16-6196-7
  3. Черная легенда (Légende noire), rééd. Aïris-press, 2008, (ISBN 978-5-8112-3377-9)
  4. Древний Тибет (Le Tibet ancien), 1996, (ISBN 5-87583-022-0)
  5. Открытие Хазарии (La découverte de la Khazarie), 1996, (ISBN 5-87583-023-9)
  6. Волшебные папиросы (Les cigarettes enchantées), 1993 (rédigé dans le camp de Norilsk en 1942, couché sur le papier en 1966, édité à titre posthume).

À l'époque soviétique, les théories de Goumiliov ont été rejetées par la doctrine officielle et ses travaux interdits de publication, avant de rencontrer un certain succès à l'époque de la Perestroïka. Son influence se fait notamment sentir chez le mathématicien Anatoli Fomenko, théoricien d'une Nouvelle chronologie[3]. Les relations entre les deux hommes furent toutefois houleuses et Goumiliov, lors des premières publications de la Nouvelle chronologie, demanda à Fomenko de « laisser les gens sérieux s'occuper des choses sérieuses »[réf. nécessaire].

Un indice du succès de ses thèses peut être lu dans la construction dans la nouvelle capitale du Kazakhstan, Astana, d'une Université d'Eurasie Lev-Goumiliov, dont l'érection a été ordonnée par le président Nursultan Nazarbayev, en vis-à-vis du palais présidentiel. Le président du Tatarstan, Mintimer Chaïmiev, a également vanté les mérites de ce penseur lors du millénaire de la ville de Kazan en 2005[4]. Ses ouvrages ont toutefois été au centre de polémiques enflammées, surtout parce qu'ils ont un caractère nettement biologique-naturaliste[5].

Ses thèses concernant l'esclavagisme des Slaves pratiqué par les Khazars juifs au haut Moyen Âge lui ont valu des accusations d'antisémitisme[6].

Théories[modifier | modifier le code]

Goumiliov décrit les sociétés comme des groupes humains disposant d'une énergie vitale en relation avec leur environnement, mais qui subissent d'autres influences que le déterminisme géographique et dont l'évolution obéit à des cycles. L’énergie vitale de certaines sociétés serait ainsi à l'heure actuelle ascendante (cas de la Russie, de la Chine, du monde arabe) alors que l’énergie vitale occidentale serait descendante, voire en phase de destruction.

Goumiliov crée le concept de « passionarité » (пассионарность) qui peut se comprendre comme l'« énergie vitale d'un groupe humain ». Cette passionarité passe de manière cyclique au cours de l'histoire (il adopte un cycle quasi-sinusoïdal de 15 siècles, mais la période peut varier selon le groupe étudié) par les étapes de montée, développement, apogée (« climax »), inertie, destruction et mémoire[7],[8]. C'est durant la phase acméique, quand la passionarité d'un groupe ethnique ou national est la plus grande que ce groupe humain fait ses plus grandes conquêtes militaires ou intellectuelles. L’ethnos devient alors un superethnos[9]. Lev Goumiliov a également appliqué son concept de passionarité à la vie de quelques personnages célèbres : Napoléon, Jeanne d'Arc, Alexandre le Grand ou encore Jean Hus.

Des travaux de l'université d'Omsk ont essayé de lier les théories de Goumiliov aux cycles solaires : la grande steppe eurasiatique à son extension maximum — dont le développement aurait été favorisé par un ensoleillement élevé — aurait par exemple permis les conquêtes mongoles. Des simulations d'évolutions du climat en Eurasie, des forêts, de la steppe ont été corrélées avec l'évolution des frontières de groupes ethniques[10],[11].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Cf. la correspondance entre L. N. Gumilev et P. N. Savickij, Bibliothèque slave, Prague citée par Marlène Laruelle in « Lev Gumilev (1912-1992) : biologisme et eurasisme dans la pensée russe », Revue des études slaves, 2000, tome 72, fascicule 1-2, p. 163-189.
  2. Lev Goumiliov, L'Ethnogénèse et la biosphère de la terre, Moscou, Ed. de l'Institut DIDIK, 1997
  3. (en) Ouvrages de Fomenko sur le site Amazon.com, avec résumé succinct
    Anatoli Fomenko prétend par exemple que les Mongols étaient l'armée des tsars russes, que la Guerre de Troie et les croisades ne sont qu'une seule et même chose, que les « hordes mongoles » qui ont envahi une partie de l'Europe centrale étaient euro-asiennes, mélange de Russes ethniques et d'Asiatiques venus de Mongolie ou encore que le Christ est né douze années avant la date conventionnelle.
  4. Didier Chaudet, Florent Parmentier, Benoît Pélopidas, L'empire au miroir. Stratégies de puissance aux États-Unis et en Russie, Genève, Droz, 2007, p. 157. (ISBN 978-2-600-01158-7)
  5. Aldo Ferrari, « Les mille visages du nationalisme russe », in La Nuova Europa, no 5, sept.-oct. 1994.
  6. Résumé de l'ouvrage de Jean-Jacques Marie, L'antisémitisme russe de Catherine II à Poutine, Paris, Tallandier, 2009).
  7. http://gumilevica.kulichki.net/English/gml_pics/fig2.gif
  8. Diagramme montrant l'évolution de la passionarité de diverses sociétés eurasiennes du Ier au XVe siècle (Dynamique des systèmes ethnoculturels eurasiens Ier-XVe s.)
    La dernière courbe, celle dont l'ordonnée est la plus élevée à l'extrême gauche de la figure, correspond à l'État russe (Rocciiskoye gosoudarstvo). Au XVe siècle il atteint presque la position de superethnos qu'il posséderait à l'heure actuelle.
  9. Ordonnée 6 du diagramme des systèmes ethnoculturels eurasiens.
  10. (en) Modeling and Simulation of Ethnic and Social Processes, étude publiée sur le site de l'université de Omsk
  11. (en) Simulation of Evolution Dynamics of Social System. Ethnic Solidarity level[PDF]

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Elena Filippova, « De l'ethnographie à l'ethnologie : changer de nom ou changer de paradigme ? L'école russe d'ethnologie, 1989-2008 », L'Homme, 194, 2010, p. 41-56.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Géopolitique russe[modifier | modifier le code]

École anglo-américaine de géopolitique[modifier | modifier le code]

École française de géopolitique[modifier | modifier le code]

École allemande de géopolitique[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]