Mohawks — Wikipédia

Les Mohawks ou Kanien'kehá:ka (historiquement Agniers) sont l'une des Six-Nations iroquoises/haudenosaunees, lesquelles sont, d’ouest en est : les Tuscaroras, les Sénécas (Tsonnontouans), les Cayugas (Goyogoins), les Onondagas (Onontagués), les Oneidas (Onnéiouts) et les Mohawks.

Étymologie[modifier | modifier le code]

Le terme mohawk est un exonyme dont la signification est « mangeur d'homme » dans la langue de leurs ennemis héréditaires, les Algonquins.

Les termes Kanien'kehá:ka ou Kanienkehaka constituent en revanche l'endonyme, le nom qu'ils utilisaient pour se dénommer ; il signifiait selon le contexte et les interprétations : « peuple de la lumière », « hommes éclairs », « peuple des silex » ou encore « enfants des étoiles », dans la langue iroquoise du sud-est du Canada.

L'endonyme autochtone Kanien'kehá:ka ou Kanienkehaka est devenu « Agnier » en français par amuïssement : aphérèse du K et apocope des trois dernières syllabes : K-Anié-nkehaka

Les Mohawks sont nommés Maquas en Nouvelle-Néerlande.

Situation actuelle[modifier | modifier le code]

Un peu plus de 16 000 Mohawks vivent au Québec[2].

Ils vivent principalement dans les territoires québécois suivants :

Hors du Québec :

En 1985, l’Assemblée nationale du Québec reconnaît officiellement la nation mohawk comme l'une des dix nations autochtones du Québec, avec les nations abénaquise, algonquine, attikamek, crie, huronne-wendat, innue, micmaque, naskapie et inuite[3].

Histoire[modifier | modifier le code]

Au début de l'époque historique[Quand ?], les Mohawks sont installés dans le Haut-New-York, dans ce que les colons anglais nomment la Mohawk Valley (vallée de la rivière Mohawk). L'anthropologue Pierre Lepage rappelle les premiers lieux d'occupation des Mohawks en commençant par la période de la Nouvelle-France, pendant laquelle ils occupèrent successivement un lieu près de la Montagne à Montréal, puis Sault-au-Récollet au nord de Montréal près de la rivière des Prairies, pour enfin occuper la Seigneurie de Deux-Montagnes, située à l'embouchure de la rivière des Outaouais.

Tous ces déplacements étaient faits à la demande de la Compagnie des prêtres de Saint-Sulpice (dits Messieurs de Saint-Sulpice) qui avaient convaincu les Mohawks que cela était pour leur bien et qui leur avaient promis des terres bien à eux au Lac-des-Deux-Montagnes. En plus de cette promesse, une thèse d'histoire sortie en 1995[4] propose que la présence des Mohawks au Lac-des-Deux-Montagnes est bien antérieure à l'arrivée de la mission sulpicienne en 1721[5]. Selon ces deux arguments, la promesse et l'occupation antérieure, les Mohawks d'aujourd'hui auraient donc droit à des terres dans cette région.

Cependant, le changement de régime en 1760 vient modifier la donne. William Johnson, alors superintendant des affaires indiennes, assure à travers des traités bipartites et des déclarations lors de conférences « donner pleine possession de leurs terres, le libre exercice de leur religion ainsi que la libre circulation sur tout le territoire américain » aux autochtones de la région, dont le peuple des Mohawks, afin de récolter leur allégeance[6]. Cependant, ces engagements ne sont pas totalement respectés.

À partir des années 1780 commence une longue résistance des Mohawks qui s'inscrit en continuité de leur lutte contemporaine. La résistance atteint un apogée le avec une insurrection de 250 Mohawks armés[7]. Du côté des autorités, on s'éloigne de plus en plus d'une reconnaissance des revendications mohawks, avec en 1840, l'adoption par le Parlement du Bas-Canada d'une ordonnance en appui aux droits territoriaux des Sulpiciens, et en 1912, le Conseil privé de Londres confirma derechef ces droits. En 1911, juste avant cette décision de Londres, les propos du chef mohawk Sose Onasakenrat illustre bien le découragement et les doutes de leur lutte :

« J’aimerais résumer en quelques pages l’horreur de la situation qui fut nôtre mais je ne suis pas certain de réussir... Nos pères s’étaient mis sous la protection des Français au Fort-de-la-Montagne dès 1662. Quand ils devinrent trop encombrants pour la colonie de Ville-Marie, on les déménagea à Lorette, devenu depuis le Sault-au-Récollet. Et quand on s’aperçut que les terres du Sault étaient les plus fertiles de la région, on crut bon de nous éloigner davantage pour concéder ces terres aux colons français... c’est alors en notre nom que les Messieurs se firent concéder la seigneurie du Lac-des-Deux-Montagnes. De tout temps ils ont prétendu qu’elle leur avait été donnée à condition qu’ils s’occupent de notre bien-être spirituel et matériel. Nous avons toujours prétendu la même chose et quand nous avons voulu nous émanciper, quand nous avons voulu qu’ils cessent de s’occuper de nous, nous avons à bon droit réclamé la seigneurie. Nous l’avons réclamée de 1760 à 1911 mais les tribunaux ne nous ont jamais donné raison. Quant aux messieurs, ils tenaient trop à la terre pour quitter les lieux, quelque mépris qu’ils aient entretenu à notre égard[8]. »

La situation changea de nouveau en 1945, lorsque le gouvernement fédéral racheta le reste de l'ancienne Seigneurie du Lac-des-Deux-Montagnes. D'après Lepage, il s'agit simplement d'un changement de tutelle, avec peu de changement réel pour les droits des Mohawks. Le territoire autochtone n'est pas considéré comme une réserve selon la Loi sur les Indiens et donc ne bénéficie pas de la même autonomie administrative[9]. En 1974, le Bureau fédéral des revendications autochtones est créé, mais leurs revendications sont rejetées deux fois plutôt qu'une.

C'est en 1985 et 1986 que s'établit le contexte direct à la crise d'Oka à venir. Le Regroupement des citoyens d'Oka est fondé en réaction à la mise sur pied d'un centre de désintoxication pour la clientèle autochtone. La municipalité d'Oka appuie le groupe citoyen dans ses démarches, et la chicane s'étend à des questions de zonage et de construction[10]. À la fin de 1988, le Conseil de bande de Kanesatake publie une étude avançant que la communauté doublera de population en 1996 et qu'elle a donc besoin de davantage de territoire. Le Conseil cherche des terres répondant à leurs besoins et propose des terres limitrophes du terrain de golf. Le conflit se déclenche en 1989 lorsque la mairie d'Oka annonce un projet d'extension du terrain de golf en question et de construction d'un projet résidentiel connexe. Lepage aborde aussi la question d'un contexte explosif des relations police-communauté autochtone dans les années précédant la crise. Seulement à Kanesatake, une opération policière d'envergure a eu lieu le , faisant sept arrestations, et ce six mois à peine avant le début de la campagne de désobéissance civile des Mohawks en mars, qui mènera à la crise d'Oka.

Crise d'Oka de 1990[modifier | modifier le code]

Estimant que leurs ancêtres ont été jadis spoliés par les colons qui se sont approprié de vastes « seigneuries » pour les revendre ensuite aux Blancs, des autochtones repartent en guerre pour faire valoir leurs droits territoriaux. Les Mohawks, en partie venus de Kahnawake, d'Akwesasne et d'autres provinces du Canada, armés d'armes automatiques (Norinco 56S, M16 et mitrailleuse Browning M2) ont occupé une forêt de pins abritant un cimetière d'Oka, village proche de Montréal. Le conflit a éclaté au printemps 1990 quand la municipalité a voulu agrandir un terrain de golf ainsi que vendre une partie des terres pour un projet domiciliaire en rasant une pinède centenaire[11]. Or, cette pinède avait beaucoup de valeur pour les Mohawks, l'utilisant comme terrain communautaire et ayant été plantée par leurs ancêtres cent ans plus tôt. Devant le refus des Autochtones d'évacuer le terrain, les autorités donnèrent l'assaut au cours duquel un policier fut tué. Une partie de la communauté amérindienne apporte son soutien aux « warriors » (guerriers) d'Oka. À la fin d'août, à la demande du Premier ministre du Québec, Robert Bourassa, le Royal 22e Régiment intervient et installe un véritable état de siège. Le , les Warriors déposent les armes[12].

Expulsions des non-Mohawks de la réserve de Kahnawake[modifier | modifier le code]

En février 2010, le conseil de bande de la réserve de Kahnawake décide d'expulser toute personne qui n'est pas mohawk, y compris ceux qui ont un conjoint de cette nation, et interdit aux « étrangers » de s'installer sur leur territoire[13].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b (en) Doug George-Kanentiio, « "Iroquois Population in 1995," Akwesasne Notes, Fall 1995 », sur www.ratical.org (consulté le ).
  2. a et b Secrétariat aux affaires autochtones, « Les Mohawks », sur www.autochtones.gouv.qc.ca (consulté le ).
  3. Jacques Laberge, Union des municipalités du Québec, Guide terminologique autochtone, Québec (province), Direction des communications et du marketing, UMQ, , 45 p. (www.umq.qc.ca/uploads/files/pub_autres/Guide_terminologique.pdf).
  4. Brenda Katlatont Gabriel-Doxtater et Arlette Kawanatatie Van den Hen, « At The Woods Edge: An Anthology of the History of the People of Kanehsatake », Thèse, Kanesatake Education Center,‎
  5. Lepage, 2009, p. 121.
  6. Lepage 2009, p. 122.
  7. Lepage 2009, p. 119.
  8. O’NEIL, Jean, 1987 : Oka. Les éditions du Ginkgo, Montréal, p. 109
  9. Lepage 2009, p. 123.
  10. Lepage 2009, p. 125.
  11. TRUDEL, Pierre. « La crise d’Oka de 1990 : retour sur les événements du 11 juillet » Recherches amérindiennes au Québec, XXXIX, nos 1-2, 2009 , p. 129-135.
  12. YORK, Geoffrey et Loreen Pindera. People of the pines, the Warriors and the legacy of Oka. Little, Brown and company (Canada) Limited, Toronto : 1991,
  13. « Si vous n'êtes pas mohawk... dehors, tous! », sur Cyberpresse, .

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Lepage, Pierre. « Oka, 20 ans déjà ! Les origines lointaines et contemporaines de la crise » Recherches amérindiennes au Québec. Volume 39, nos 1-2, 2009, p. 119-126 lire en ligne.
  • York, Geoffrey et Loreen Pindera. People of the pines, the Warriors and the legacy of Oka. Little, Brown and company (Canada) Limited, Toronto : 1991, 438 pages.
  • Moutot Michel, Ciel d'acier, 2015.
  • Morot-Sir Marie-Hélène, Au Cœur de la Nouvelle-France - Tome III : Les Amérindiens ce peuple libre autrefois, qu'est-il devenu ?, 2014
  • A Journey into Mohawk and Oneida Country, 1634-1635: The Journal of Harmen Meyndertsz Van Den Bogaert, Revised Edition Charles T. Gehring 2013 book Published by: Syracuse University Press Series: The Iroquois and Their Neighbors.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Sur les autres projets Wikimedia :

Liens externes[modifier | modifier le code]