Nadejda Siguida — Wikipédia

Nadejda Siguida
Biographie
Naissance
Décès
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Ust-Karsk (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Formation
Mariinskaya Gymnasium (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Activité
Autres informations
Parti politique
Lieu de détention
Kara-katorga (en)Voir et modifier les données sur Wikidata

Nadejda Konstantinovna Malaksiano, de son nom de mariage Siguida (en russe : Наде́жда Константи́новна Малаксиа́но, Сиги́да), née en à Taganrog et morte le au bagne de la Kara (ru) en Sibérie orientale), est une révolutionnaire russe, membre de Narodnaïa Volia.

Biographie[modifier | modifier le code]

Nadejda Konstantinovna est née en 1862 à Taganrog (alors dans le gouvernement de Iekaterinoslav). Elle est issue d'une famille de marchands grecs[1] célèbre dans la ville, dont le nom est mentionné dans les annales de Taganrog depuis la fin du XVIIIe siècle.

Elle achève dans les années 1880 le lycée de jeunes filles Marinski de Taganrog[1]. Elle y a comme condisciple Maria Tchekhova, future artiste et pédagogue et sœur d'Anton Tchekhov.

Après le lycée, Nadejda Malaksiano ouvre avec une amie, Ariadnaïa Blonskaïa, une école primaire privée où elle enseigne et abrite des Narodniki[1]. Elle devient membre de Narodnaïa Volia en 1883[2] et de la direction du parti à Taganrog, et est une des organisatrices d'une imprimerie clandestine en 1885, installée dans son appartement.

Imprimerie clandestine de Taganrog[modifier | modifier le code]

L'imprimerie fonctionne dans la clandestinité. Pour dissimuler son activité, Nadejda Malaksiano conclut en un mariage de complaisance avec un autre membre de Narodnaïa Volia, greffier du tribunal de district, et typographe, Akim Stepanovitch Siguida (ru) (1864-1888[Notes 1]). Travaillent aussi dans l'imprimerie O. N. Fiodorova et E. M. Trinidadskaïa. La première vit dans l'appartement en tant que cuisinière, la deuxième comme locataire.

Après des arrestations massives de membres de Narodnaïa Volia à Rostov-sur-le-Don, le matériel de l'imprimerie de Rostov, qui a été caché, est transféré à celle de Taganrog. 

Des projectiles de dynamite, fabriqués par L. F. Iassevitch dans la perspective d'un attentat contre le ministre de l'intérieur Dimitri Tolstoï y sont également cachés. Cette détention d'explosif est la cause de l'ouverture d'une instruction par le tribunal militaire.

Dans la nuit du 22 au , l'imprimerie clandestine est perquisitionnée. Nadejda Siguida y est arrêtée[2]. Son mari est arrêté dans une caserne, où il a été enrôlé depuis . Lors de la perquisition des locaux la police saisit 1 000 exemplaires du recueil de poèmes Échos de la révolution, 1 000 exemplaires des n ° 11 et 12 de La volonté du peuple et d'autres écrits et publications révolutionnaires.

Nadejda est jugée lors d'une session spéciale du Sénat avec les participants à l'imprimerie clandestine de Taganrog les 8 et , dans le Procès du Don (Донской процесс)[1]. Elle ne reconnait que son appartenance à Narodnaïa volia, et refuse toute autre déclaration. Elle est condamnée à la peine de mort, peine commuée à la demande de sa famille en 8 ans de travaux forcés[1],[2].

Tragédie de la Kara[modifier | modifier le code]

Dans le bagne de la Kara, le , au cours d'un mouvement de protestation contre la situation des femmes prisonnières politiques et contre la cruauté et de l'arbitraire de la part du commandant du bagne, V. Massioukov, Nadejda Siguida le gifle. Selon l'étiquette, un officier public ainsi giflé par une femme était censé être mis à la retraite[réf. nécessaire]. Ce n'est pas le cas, et Nadejda Siguida est soumise à un châtiment corporel sévère, cent coups de verges[2].

Femme au visage très pôle, la bouche ensanglantée, conduite par deux soldats armés dans une cour enneigée
Nikolaï Kassatkine Siguida (tragédie de la Kara) (1930)

Après cette punition, elle se donne la mort, en s'empoisonnant avec une quantité importante de morphine[2].

Sa mort est le point de départ de la tragédie de la Kara, une tentative de suicide collective de 23 prisonniers politiques, pour protester contre l'usage de force et des châtiments corporels à l'encontre des prisonniers politiques[3]. Dans la prison des hommes, c'est Feliks Kon (ru), futur premier secrétaire du parti communiste d'Ukraine qui en est l'initiateur. La plupart des prisonniers hommes survivent à des médicaments périmés, parfois après en avoir repris. Au total, six personnes meurent, quatre femmes, Nadejda Siguida, le , et Maria Kalioujnaïa, Nadejda Smirnitskaïa, Maria Kovalevskaïa, le , ainsi que deux hommes, Ivan Kalioujny et Sergueï Bobokhov (ru), le .

Siguida (tragédie de la Kara) - Visage de Nadejda Siguida

En 1930, l'artiste Nikolaï Kassatkine peint un tableau, Siguida (tragédie de la Kara) («Сигида (Карийская tragédie)»), consacré à cet événement. La toile veut montrer l'héroïsme et la beauté de son sacrifice.

L'écrivain Boris Akounine l'a commenté ainsi : « les gardes mènent la jeune femme, Nadejda Siguida, qui a annoncé que la flagellation équivaudrait à une condamnation à mort. Elle avance sans résistance, les bras déliés. Elle est semblable à la pannotchka de Gogol. Il y a comme du gel sur sa peau... Il y a de la suspicion et une confiance intimiste dans le rapport de l'artiste prolétarien à la mort ». Kassatkine fait une crise cardiaque au Musée de la Révolution de Moscou alors qu'il parlait du sujet de son tableau[4].

Vie amoureuse[modifier | modifier le code]

Portrait d'homme, barbu, le visage fin et le regard clair
Pavlo Hrabovskyï

En 1888, à l'âge de 25 ans, lors d'un séjour dans une prison de Moscou Nadejda fait connaissance avec un jeune poète révolutionnaire ukrainien, Pavlo Hrabovskyï également condamné pour ses activités révolutionnaires. Ils s'éprennent l'un de l'autre, avant d'être séparé dans des prisons différentes, Nadejda dans la prison pour femmes de la Kara et Pavlo dans le gouvernement d'Irkoutsk. Son amour pour Nadejda Siguida inspire à Pavlo Hrabovskyï des nombreux poèmes lyriques, et il lui dédie son premier recueil Perce-neige («Подснежник») et au total 18 poèmes, dont celui-ci, À N. K. S.[5] :

Такої певної, святої,
Такої рідної, як ти,
Такої щирої, простої, —
Вже більше, мабуть, не знайти

Таку не часто скинеш оком,
Такою тільки що марить...
А раз зустрінеш ненароком–
Навіки долю озорить!

Pavlo Hrabovskyï l'appelait son étoile claire, sa muse, sa sœur. Il est enterré avec une mèche de ses cheveux.

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Il est arrêté avec les autres ouvriers de l'imprimerie et condamné à mort, peine commuée en travaux forcés à perpétuité. Il meurt d'une attaque cérébrale sur la route de Sakhaline, dans la prison du bagne de Novossibirsk en avril 1888.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d et e (ru) « Сигида Надежда Константиновна » [« Siguida Nadejda Konstantinova »], sur Исторический Таганрог (consulté le )
  2. a b c d et e (ru) « Сигида Н. К. » [« Siguida N. K. »], sur Энциклопедия Забайкалья (ez.chita.ru) (consulté le )
  3. (en) Kennan, George, Siberia and the Exile System, Londres, James R. Osgood, McIlvaine & Co, , p. 263-268.
  4. (ru) Boris Akounine, « Письмо позвало в дорогу » [« Une lettre ayant appelé à faire route »], sur IKP
  5. (uk) Роздобудько І. (I. Rozdoubko), « Герої і антигерої боротьби за свободу » [« Héros et antihéros du combat pour la liberté »], sur haidamaka.org.ua (consulté le )

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

En russe[modifier | modifier le code]

  • (ru) « Сигида Надежда Константиновна » [« Siguida Nadejda Konstantinova »], sur Исторический Таганрог (consulté le ) ;
  • (ru) « Дом 8 - Исторический Таганрог » [« Maison n°8. Le Taganrog historique »], sur Исторический Таганрог (consulté le ) ;
  • (ru) « Сигида Н. К. » [« Siguida N. K. »], sur Энциклопедия Забайкалья (ez.chita.ru) (consulté le ) ;
  • (ru) Деятели СССР и революционного движения России. Энциклопедический словарь [« Acteurs de l'URSS et du mouvement révolutionnaire. Dictionnaire encyclopédique »], Moscou, Советская энциклопедия,‎ 1989 (1925), 832 p. (ISBN 5-85270-028-2) ;
  • (ru) С. Смирнов (S. Smirnov), « Кара. Осенью 1889 года 20 политзаключенных в знак протеста одновременно приняли смертельные дозы морфия » [« Kara. Automne 1889. 20 prisonniers politiques prennent en même temps une dose mortelle de morphine en signe de protestation »], Медиазона,‎ (lire en ligne, consulté le ) ;
  • (ru) Гернет М. Н. (Hernet M. N.), История царской тюрьмы [« Histoire des prisons tsaristes »], t. 3 (1870—1900), Moscou,‎ , p. 323-30 ;
  • (ru) Стефанович Я. (I. Stepanovitch), Дневник карийца [« Journal de la Kara »], Saint-Pétersbourg,‎  ;
  • (ru) Ростов Н. (N. Rostov), Карийская трагедия [« La tragédie de la Kara »], Moscou,‎  ;
  • (ru) Карийская трагедия 1889 г. (Воспоминания и материалы) [« La tragédie de la Kara »], Petrograd,‎ (lire en ligne) ;
  • (ru) Ивановская П. (P. Ivanovskaïa), « Документы о смерти Сигиды » [« Documents sur la mort de Siguida »], Каторга и ссылка, no 11 (60),‎ , p. 108-127 ;
  • (ru) Ковальская Е. (I. Kovalskaïa), « К статье Ивановской о Сигиде » [« À propos de l'article d'Ivanovskaïa sur Siguida »], Каторга и ссылка, no 11 (60),‎ , p. 128-131.

En ukrainien[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]