Nicolas Boileau — Wikipédia

Nicolas Boileau
Boileau par Jean-Baptiste Santerre (1678).
Fonction
Fauteuil 1 de l'Académie française
-
Biographie
Naissance
Décès
(à 74 ans)
Paris (France)
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signature de Nicolas Boileau
Signature

Nicolas Boileau sieur Despréaux, également nommé Nicolas Boileau Despréaux, né le à Paris et mort le dans la même ville, est un homme de lettres français du Grand Siècle. Poète, traducteur, polémiste et théoricien de la littérature, il fut considéré de son temps et pendant les deux siècles suivants comme le législateur ou le « Régent du Parnasse[1] » pour son « intransigeance passionnée[2] ». Admirateur et ami de Molière pendant dix ans, familier d'Antoine Furetière, de Claude-Emmanuel Luillier dit Chapelle, d'Olivier Patru et de Guillaume de Lamoignon, premier président du parlement de Paris. Dans le dernier quart du siècle, il est l'ami, le confrère et l'interlocuteur privilégié de Racine.

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse et famille[modifier | modifier le code]

Né dans le milieu de la petite bourgeoisie parlementaire, quinzième des seize enfants de Gilles I Boileau, greffier de la Grand' Chambre du Parlement de Paris, Nicolas Boileau (dit Despréaux, pour le distinguer de son frère aîné Gilles II) est, dès son plus jeune âge, destiné au droit.

De constitution fragile, il est opéré de la taille à l'âge de onze ans[3]. Il commence ses études au collège d'Harcourt (futur lycée Saint-Louis). Ce n'est qu'en troisième, après avoir rejoint le collège de Beauvais pour étudier le droit, qu'il se fait remarquer par sa passion pour les grands poètes de l'Antiquité latine.

La maison de Boileau à Auteuil[4].

Son père le destinant à la cléricature, il entreprend des études de théologie à la Sorbonne, mais il les abandonne presque immédiatement. Admis au barreau le , il en est rapidement dégoûté.

À la mort de son père, en 1657, il hérite d'une rente de 1 500 livres, qui lui permet de vivre modestement et de se consacrer tout entier à la littérature[5].

En 1662, il se voit attribuer le bénéfice du prieuré de Saint-Paterne, doté de 800 livres de rente, qu'il restituera après s'être démis du bénéfice vers la fin de 1670, à la demande, dit-on, de son ami le président Guillaume de Lamoignon.

Le blason de Nicolas Boileau.

Boileau, aidé de sa famille, a probablement forgé de toutes pièces une généalogie lui accordant un titre de noblesse et qu'il faisait remonter jusqu'au XIVe siècle, à Jean Boileau, notaire royal anobli par Charles V. Aussi revendiquait-il un blason dont les armes étaient « de gueules à un chevron d'argent accompagné de trois molettes d'or ». Cependant, rien ne permet de penser qu'il ait pu avoir de véritables titres nobiliaires.

Deux de ses frères aînés, Gilles Boileau et Jacques Boileau, se sont fait un nom dans l'histoire des lettres.

Principaux écrits[modifier | modifier le code]

Page de titre de la première édition des Satires de Boileau.

Ses premiers écrits importants sont les Satires (composées à partir de 1657 et publiées en recueil à partir de 1666), inspirées des Satires d'Horace et de Juvénal. Il y brocarde, de manière parfois gratuite et pour le seul plaisir de la rime, un grand nombre de ses contemporains —Jean Chapelain, Georges de Scudéry, Charles Cotin, Marc-Antoine Girard de Saint-Amant, Charles Coypeau d'Assoucy, Michel de Pure, Edme Boursault, Philippe Quinault — qu'il considère comme de mauvais auteurs.

Laudateur de Malherbe, il admire Molière et Racine, mais, contrairement à ce qu'on a prétendu au dix-neuvième siècle, ne manifeste pas de goût particulier pour l'œuvre de La Fontaine, à laquelle il n'accorde aucune place dans son Art poétique.

Les sept premières satires, qui paraissent en 1666, obtiennent un succès considérable que viennent encore accroître les protestations des auteurs que le poète a brocardés. Il leur répond dans une nouvelle satire, la neuvième, où se trouvent réunies élégance du style et plaisanterie piquante[6]. » L'abbé Charles Cotin, l'une des principales "victimes" de Boileau, répondit à ces attaques dans La Critique désintéressée sur les satyres du temps[7].

La douzième satire, Sur l’Équivoque, composée en 1705, fut interdite de publication sur l'intervention du père jésuite Le Tellier, confesseur du roi, malgré les démarches contraires du duc Adrien-Maurice de Noailles. Elle circula cependant, après avoir été imprimée clandestinement (quelques semaines après la mort de son auteur) sur instruction de l'abbé Jacques Boileau qui voulait se venger des Jésuites tout en vengeant son frère[8].

Parvenu à l'âge de la maturité, il compose douze Épîtres, qu'il fera paraître entre 1670 et 1697. « Aucune, écrit Charles-Henri Boudhors[9], ne s'emploie à versifier, sans intérêt actuel, sans motif personnel, quelque lieu commun de philosophie bourgeoise ou de morale universelle. Et toutes sont des satires encore, dont la pointe "rebouchée", la griffe ouatée (parfois) attestent que l'auteur a su "fléchir aux temps sans obstination", s'accommoder, se renouveler, s'ingénier, mais n'abandonne rien de ses intimes convictions politiques et morales, rien de son caractère de poète, rien de son "génie" propre. »

Au cours des premières années 1670, il compose les quatre chants de L'Art poétique et les quatre premiers de l'épopée burlesque du Lutrin, dont il a entrepris l'écriture pour répondre à un défi du président Guillaume de Lamoignon. « Il définit les différents genres avec précision, et donne les règles du beau en même temps qu'il en offre le modèle[10]. »

Au cours de l'été 1674, Boileau fait paraître un volume intitulé Œuvres diverses du Sieur D***, avec le Traité du sublime ou du merveilleux dans le discours. On y trouve les neuf premières Satires, les quatre premières Épîtres, L'Art poétique en vers, encore inédit, les quatre premiers chants du Lutrin, lui aussi inédit, et la traduction (la première en langue vernaculaire) du Traité du sublime attribué au rhéteur Longin.

En octobre 1677, Boileau et Racine sont nommés historiographes du roi, en remplacement de Paul Pellisson-Fontanier. Au cours des années suivantes, Boileau accompagnera Louis XIV dans les campagnes de Flandre puis d'Alsace.

Le , il est élu à l'Académie française. L'année suivante il entre à l'Académie des inscriptions et médailles ou Petite Académie.

Regards sur l'œuvre[modifier | modifier le code]

Il est au XVIIe siècle l'un des principaux théoriciens de l'esthétique classique en littérature, ce qui lui vaudra d'être considéré comme le « législateur du Parnasse »[11]. Il apparaît comme le chef de file des « Anciens » dans la fameuse Querelle des Anciens et des Modernes, qui divise les milieux littéraires et artistiques à la fin du XVIIe siècle[12].

Buste par François Girardon.

Comme poète, il entreprend de définir le goût, et cherche à fixer d'une manière claire et précise les lois et les ressources de la poésie classique. Prenant modèle sur les grands poètes de l'Antiquité, qu'il défend et admire, il travaille avec une lente rigueur.

Malgré la prévention des philosophes du XVIIIe siècle, il était, naguère encore, pris comme référence scolaire pour la justesse, la solidité et le goût, l'art de conserver à chaque genre la couleur qui lui est propre, l'objectivité dans ses tableaux comme dans ses jugements, l'art de faire valoir les mots par leur arrangement, de relever les petits détails, d'agrandir son sujet, d'enchâsser des pensées fortes et énergiques dans des vers harmonieux mais toujours dominés par la raison.

Publié en juillet 1674, son Art poétique est, selon Pierre Clarac, « un résumé de la doctrine classique telle qu'elle avait été élaborée en France dans la première moitié du siècle. L'ouvrage n'a rien, et ne pouvait rien avoir d'original dans son inspiration. Mais ce qui le distingue de tous les traités de ce genre, c'est qu'il est en vers et qu'il cherche à plaire plus qu'à instruire. Composé à l'usage des gens du monde, il obtient auprès d'eux le plus éclatant succès »[13].

Madame de Sévigné lui dit un jour qu'il était « tendre en prose et cruel en vers »[14].

Louis Simon Auger fait un éloge de Boileau couronné par l'Institut en 1805[15].

Œuvres[modifier | modifier le code]

Boileau en 1706, de Hyacinthe Rigaud, gravé par Pierre Devret.
  • Les Satires (1666-1716). Réédition : 2002.
  • Épîtres (1670-1698). Réédition : 1937.
  • Arrêt burlesque[16] (1671) (en collaboration)
  • Poésies diverses avec Amitié Fidéle (1654)
  • Le Lutrin (Poème héroï-comique) (1674-1683)
  • L’Art poétique (1674)
  • Pseudo-Longin, Traité du sublime, trad. par Nicolas Boileau, Paris, 1674 (lire en ligne ; transcr.) : avec introduction et notes par Francis Goyet, Paris, 1995 (ISBN 2-253-90713-8).
  • Dialogue sur les héros de roman (1688). (Une analyse de cet ouvrage se trouve dans l'article Réflexions sur le roman au XVIIIe siècle.)
  • Réflexions critiques sur Longin (1694-1710)
  • Lettres à Charles Perrault (1700)
  • Œuvres de Boileau (1740), édition Pierre et Berthe Bricage 1961, 5 tomes, illustrations par Rémy Lejeune (Ladoré)
  • Correspondance avec Brossette (1858)
  • Sonnet sur la mort d'une parente,

Hommages[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. L'expression se lit pour la première fois au vers 127 de Satire IX, "À mon esprit", dans laquelle Boileau fait parler ses détracteurs : « Jamais dans le barreau trouva-t-il rien de bon ? / Peut-on si bien prêcher qu'il ne dorme au sermon ? / Mais lui qui fait ici le régent du Parnasse / N'est qu'un gueux revêtu des dépouilles d'Horace. » Ces vers, publiés en 1668, se veulent une réponse aux détracteurs de Boileau, en particulier à l'abbé Cotin, auquel le satiriste attribuait un pamphlet intitulé Despréaux ou la Satyre des Satyres, qui s'achevait sur ces mots : « À ses vers empruntés la Béjart applaudit. / Il règne sur Parnasse et Molière l'a dit ».
  2. Delphine Reguig, Boileau poète / « De la voix et des yeux... », Paris, Classiques Garnier, 2016, pp. 303-338.
  3. René Bray, Boileau, L'homme et l'œuvre, Paris, Le livre de l'étudiant, Boivin et compagnie, , p. 9
  4. L'Univers illustré, n° 18, 1911.
  5. René Bray, Boileau, L'homme et l'œuvre, Paris, Le livre de l'étudiant, Boivin et compagnie, , p. 10
  6. Charles Weiss, Biographie universelle, Paris, 1812, I, p. 403.
  7. La Critique désintéressée sur les satyres du temps, Paris, (lire en ligne).
  8. François-Marie Arouet (le futur Voltaire) s'en procura un exemplaire. D'après Roger Peyrefitte (Voltaire, p. 63), il sourit du passage sur Socrate, « l'honneur de la profane Grèce, — Très équivoque ami du jeune Alcibiade » et admira les vers qu'il eût voulu avoir écrits : « Quel lion, quel tigre égale en cruauté / Une injuste fureur qu'anime la Piété ? ».
  9. Œuvres complètes de Boileau. Épîtres. Art poétique. Lutrin, Paris, Les Belles Lettres, , p. 173
  10. Biographie universelle classique ou Dictionnaire historique portatif, Paris, (lire en ligne), p. 290.
  11. René Bray, Boileau, L'homme et l'œuvre, Paris, Le livre de l'étudiant, Boivin et compagnie, , p. 63.
  12. Marcel Hervier, L'Art Poétique de Boileau, étude et analyse, Paris, Chefs-d'œuvre de la littérature expliqués, Mellottée, , p. 213-219.
  13. Pierre CLARAC, « Nicolas boileau (1636-1711) : le théoricien du classicisme », sur universalis.fr (consulté le ).
  14. Lettres de Madame de Sévigné, de sa famille et de ses amis, t. III, Paris, Hachette, (lire en ligne), p. 318.
  15. Éloge de N. Boileau-Despréaux, Paris, 1805.
  16. Arrêt burlesque.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Sources[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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