Paul d'Albert de Luynes — Wikipédia

Paul d'Albert de Luynes
Fonctions
Président
Académie des sciences
Michel Ferdinand de Chaulnes (d)
Cardinal
-
Archevêque catholique
Archidiocèse de Sens-Auxerre
-
Archevêque de Sens
-
Fauteuil 29 de l'Académie française
-
Évêque diocésain
Diocèse de Bayeux et Lisieux
-
Évêque de Bayeux
-
Biographie
Naissance
Décès
Activités
Famille
Père
Honoré Charles d'Albert de Luynes (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Mère
Marie Anne Jeanne de Courcillon de Dangeau (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Fratrie
Autres informations
Consécrateurs
Membre de
Distinctions
Blason
signature de Paul d'Albert de Luynes
Signature

Paul d'Albert de Luynes (connu sous le nom de cardinal de Luynes), né à Versailles le et mort à Paris le , est un prélat et homme de cour du royaume de France du XVIIIe siècle.

Il est d'abord militaire (colonel à 16 ans[1]), puis évêque de Bayeux à 26 ans. En 1753, il est nommé archevêque de Sens, Primat des Gaules[1],[2] et de Germanie[1], puis cardinal en 1756, commandeur de l'ordre du Saint-Esprit, membre de l'Académie française, etc.

Passionné de sciences, il a laissé des travaux intéressants et a favorisé et protégé l'Académie dont il deviendra membre honoraire.

Biographie[modifier | modifier le code]

Famille[modifier | modifier le code]

Il est le deuxième fils de Honoré-Charles d'Albert de Luynes, duc de Montfort (1669-1704) (qui, bien qu'aîné, ne devint pas duc de Luynes car étant mort avant son père) et de Marie Anne Jeanne de Courcillon († 1718).

Il est le petit-fils de Charles-Honoré d'Albert de Luynes (1646-1712), 3e duc de Luynes, et l'arrière-arrière-petit-fils du 1er duc de Luynes, favori de Louis XIII.

Carrière militaire[modifier | modifier le code]

Initialement connu sous les titres de comte de Monfort (son père étant connu sous le titre de duc de Montfort) et de comte d'Albert[3], il se destinait au métier des armes. Il devient ainsi colonel d'un régiment d'infanterie à son nom le [3] (à l'âge de 16 ans) mais, gravement insulté par un officier, il refuse de se battre en duel et choisit d'épouser une carrière ecclésiastique.

Il quitte alors l'armée en 1721[3] à l'âge de 18 ans. Six ans plus tard, il est nommé abbé commendataire de l'abbaye bénédictine de Cerisy[3]Cerisy-la-Forêt, près de Saint-Lô dans la Manche).

L'homme d'Église[modifier | modifier le code]

A l'âge de 26 ans, il devient évêque de Bayeux (1729-1753), puis à 50 ans archevêque de Sens (1753-1788). À l'âge de 53 ans, lors du consistoire du , il est créé cardinal, sur présentation du roi Jacques II d'Angleterre[3]. Accessoirement, il devient abbé commendataire de l'abbaye de Corbie au diocèse d'Amiens de 1755 à 1788. En 1769 il est l'un des deux Cardinaux Français, avec le cardinal Pierre De bernis, au Conclave a Saint Pierre de Rome qui se tint du 15 Février au 19 Mai 1769 qui élira le Pape Clément XIV.

Constatant les progrès de l'irréligion, il cherche à les combattre déplorant l'abandon du jeûne dans son mandement du carême 1779 et composant une Instruction pastorale contre la doctrine des incrédules et portant condamnation du Système de la Nature du baron d'Holbach (1770). Il protège le parti des Feuillants, anti-jansénistes modérés.

À Sens, Il s'occupe activement de son archidiocèse, multipliant les visites paroissiales, comme en 1761 où il effectue une visite générale au cours de laquelle il nomme l'abbé Blaise Bégon à la cure de Quarré-les-Tombes.

En 1762, il est à l'origine, avec le chapitre, de la superbe grille qui orne aujourd'hui le chœur de la cathédrale ; œuvre du serrurier parisien Guillaume Doré, elle est ornée des armes du cardinal. Il dotera aussi, semble-t-il, la cathédrale d'une statue de la « Vierge à l'enfant » située dans la chapelle de la Vierge.

L'homme de cour[modifier | modifier le code]

Mausolée du dauphin et de son épouse.

Faisant partie, avec son frère, Charles Philippe d'Albert de Luynes, 4e duc de Luynes, du cercle de la reine Marie Leszczynska, il est élu membre de l'Académie française en 1743 alors qu'il n'était encore qu'évêque de Bayeux. Il succède au cardinal de Fleury, et c'est grâce à l'intervention royale qu'il est préféré à Voltaire[4].

Il est ensuite nommé premier aumônier de la dauphine Marie-Josèphe (mère de Louis XVI, Louis XVIII et Charles X), et devient ami du dauphin Louis (père du futur Louis XVI) qu'il assiste dans ses derniers moments en 1765 au château de Fontainebleau.

Le dauphin Louis et son épouse décédée deux ans plus tard seront enterrés dans la cathédrale de Sens et leur tombeau sera mis en place en 1777.

Il sera nommé commandeur de l'ordre du Saint-Esprit le .

L'homme de science[modifier | modifier le code]

Pendant son épiscopat à Bayeux, il protège l'académie des sciences, arts et belles-lettres de Caen ; de 1731 à 1753, sa résidence caennaise abrite les séances de l'académie dont l'abbé Outhier fera partie.

Grand amateur d'astronomie et de physique, il réalise plusieurs observations astronomiques importantes :

Nommé archevêque de Sens en 1753, membre honoraire de l'Académie des Sciences en 1755, cardinal en 1756, il est à l'époque « élève » de l'abbé La Caille qui lui présentera Bailly[5]. Répondant à une invitation du cardinal, ce dernier viendra à Noslon « mettre son observatoire en état » et ils y feront des observations qui seront publiées.

Travaux publiés[modifier | modifier le code]

Ses observations et travaux sont publiés dans les recueils de l’Académie des sciences entre 1743 et 1777.

Observations et travaux de Luynes
Année Objet Lieu Instrument
1743 Éclipse de Lune[6] Bayeux Lunette type ?
1744 Éclipse de Jupiter par la Lune[7] Sommervieu Lunette de 18 palmes romaines (4 m)
1759 Comète de Halley[8] Sens ? Lunette de 7 pieds (2,25 m)
1760 Éclipse de Soleil[9] Sens Lunette de 7 pieds (2,25 m).
1761 Passage de Vénus sur le Soleil[10] Sens Lunette de 2,5 pieds de foyer, télescope tel une lunette de 6,5 pieds de foyer.
1764 Éclipse de Lune (avec Bailly)[11] Noslon Lunette de 9 pieds et télescope tel une lunette de 6 pieds.
1764 Éclipse annulaire de Soleil (avec Bailly)[12] Noslon Lunette de 2,5 pieds de foyer.
1765 Essais d'un demi-cercle astronomique (participation)[13] Observatoire de Paris.
1765 Essais sur les baromètres[14] -
1766 Éclipse de Soleil[15] Versailles Télescope tel une lunette de 6,5 pieds.
1772 Éclipse de Lune[16] Fontainebleau Télescope de grossissement x33.
1773 Éclipse de Lune[17] Noslon Lunette de 2,5 pieds de foyer et Télescope de grossissement x56.
1777 Taches solaires (faits de M. Boscovich)[18] Noslon Lunette de 2,5 pieds de foyer et grand télescope probables.

Pour mener à bien des observations astronomiques, il est nécessaire d'enregistrer les instants où elles ont lieu. À cette époque, le passage obligé est l'emploi de méridiennes qui permettent d'appréhender l'heure solaire du lieu avec précision, à l'aide de pendules à secondes. On trouve trace des méridiennes de Luynes sur tous ses sites d'observations : à Bayeux, Sommervieu, Sens, Noslon, Versailles. Les méridiennes des trois dernières résidences sont à fil[19], fleuron technologique de l'époque.

Schéma d'une méridienne à fil, Delisle, 1718.

Parmi les observations astronomiques, les éclipses de Lune (ici au nombre de quatre) sont intéressantes pour déterminer la longitude mais, l'observation la plus complète est celle du passage de Vénus sur le Soleil qui a lieu le . Cet évènement astronomique était attendu au plan international et, en France, le cardinal de Luynes est cité pour avoir obtenu un des meilleurs résultats, au même titre que Lalande, Granjean de Fouchy, la Condamine, le Monnier, Maraldi, la Caille, etc[20].

Observations du passage de Vénus sur le Soleil par le cardinal le .

Dans le domaine de la physique, il possède des laboratoires, réalise des études innovantes et publie un mémoire sur les propriétés du mercure dans les baromètres (1768), mémoire qui n'est pas sans rappeler les plans d'expériences utilisés de nos jours.

Le cardinal est aussi connu pour un anneau astronomique qu'il « a perfectionné et fait construire sous ses yeux pour son usage particulier, par le sieur [Jacques Nicolas] Baradelle[21], ingénieur pour les instruments de mathématiques, à Paris ». Cet instrument a fait l'objet d'une description sur plus d'une dizaine de pages dans un livre de gnomonique de Bedos de Celles publié en 1774[22] , [N 1]. L'anneau du cardinal est considéré aujourd'hui, comme le plus abouti de ce type d'instrument[23].

Armoiries[modifier | modifier le code]

Armoiries du cardinal de Luynes

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Bedos de Celles et le cardinal se connaissaient probablement : Dans les années 1770, Dom Bedos est l'hôte de Duhamel du Monceau, membre de l'Académie des Sciences (comme Luynes), au château de Denainvilliers sur la commune de Dadonville située dans le diocèse du cardinal. Il y traça plusieurs cadrans solaires et se consacra probablement à la deuxième édition de La Gnomonique ; en , Dom Bedos, viendra aussi à Sens expertiser, comme facteur d'orgue, les travaux de restauration de l'orgue de la cathédrale.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b et c Jean-Antoine-Nicolas de Caritat, marquis de Condorcet, Œuvres de Condorcet, vol. 3, Firmin Didot frères, , p. 306.
  2. Société de l'histoire de France, Annuaire-bulletin, Société de l'histoire de France, 1863, page 138.
  3. a b c d et e Jean-Charles Poncelin de La Roche-Tilhac, Etat des cours de l'Europe et des provinces de France pour l'année 1785, Lamy, , p. 21.
  4. Site de l'Academie francaise
  5. C. Fournerat, Recherches sur les personnes qui dans le département de l'Yonne se sont occupées d'astronomie, vol. 16, Auxerre, coll. « Bulletin de la société des sciences historiques et naturelles de l'Yonne », (lire en ligne), p. 52-53.
  6. Académie des sciences (France), Histoire de l'Académie royale des sciences, Paris, (lire en ligne), p. 511.
  7. Académie des sciences (France), Histoire de l'Académie royale des sciences, Paris, (lire en ligne), p. 415.
  8. Académie des sciences (France), Histoire de l'Académie royale des sciences, (lire en ligne), p. 153.
  9. Académie des sciences (France), Histoire de l'Académie royale des sciences, (lire en ligne), p. 127.
  10. Entre autres, Académie des sciences (France), Mémoires de mathématiques et de physique, (lire en ligne), p. 65.
  11. Académie des sciences (France), Mémoires de mathématiques et de physique, (lire en ligne), p. 277.
  12. Académie des sciences (France), Histoire et Mémoires de mathématiques et de physique, (lire en ligne), H 116 et M 273.
  13. Académie des sciences (France), Mémoires de mathématiques et de physique, t. VI, (lire en ligne), p. M 428.
  14. Académie des sciences (France), Mémoires de mathématiques et de physique, (lire en ligne), H 10, M 247.
  15. Académie des sciences (France), Mémoires de mathématiques et de physique, (lire en ligne), p. 343.
  16. Académie des sciences (France), Histoire et Mémoires de mathématiques et de physique, t. I, (lire en ligne), H 86, M 160, 378.
  17. Académie des sciences (France), Mémoires de mathématiques et de physique, (lire en ligne), p. 183.
  18. Abbé Boscovich, Nouveaux ouvrages : Optique et astronomie, t. V, (lire en ligne), p. 170-178, 457.
  19. Gérard Aubry, Les méridiennes du cardinal de Luynes, vol. 33, Paris, SAF, coll. « Cadran Info », , p. 9-21.
  20. Académie des sciences (France), Histoire de l'Académie royale des sciences, (lire en ligne), p. 98-117 ; voir aussi Jean-Baptiste Delambre, Histoire de l'astronomie au XVIIIe siècle, Paris, (lire en ligne), p. 622
  21. Voir une notice sur Baradelle
  22. Bedos de Celles, La Gnomonique pratique, Paris, (lire en ligne), p. 345-355.
  23. J. Kugel, Sphères : L'art des mécaniques célestes, Paris, Kugel, , p. 244. Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article.
  24. armes sur portrait de l'époque

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Sources et bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Nicolas de Condorcet, Éloge de M. le cardinal de Luynes, dans Éloges des académiciens de l'Académie royale des sciences, morts depuis l'an 1783, chez Frédéric Vieweg, Brunswick et Paris, 1799, p. 328-336 (lire en ligne)
  • Jean de Viguerie, Histoire et dictionnaire du temps des Lumières, Robert Laffont, collection « Bouquins », Paris, 1995. (ISBN 2221048105)
  • Maurice Vallery-Radot, Un administrateur ecclésiastique à la fin de l'Ancien Régime. Le Cardinal de Luynes, archevêque de Sens. 1703-1788, thèse de Droit Histoire du Droit, Paris, . Publiée sous le titre: Un administrateur ecclésiastique à la fin de l'Ancien Régime: le cardinal de Luynes, archevêque de Sens (1753-1788), préface de M. Gabriel Le Bras, éd. Sté d'histoire et d'art du diocèse de Meaux, Meaux, 1966.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]