Persécution de Dioclétien — Wikipédia

La Persécution de Dioclétien ou Grande persécution désigne la dernière répression du christianisme durant la Tétrarchie, sous le règne de Dioclétien, au début du IVe siècle. En 303, les empereurs Dioclétien, Maximien, Galère et Constance Chlore (les quatre co-empereurs de la Tétrarchie instaurée par Dioclétien) prirent une série d'édits révoquant certains droits des chrétiens en leur imposant de se conformer aux pratiques religieuses traditionnelles sous peine d'emprisonnement et d’exécution. Certains édits ultérieurs ordonnèrent le sacrifice aux dieux. Les persécutions varièrent en intensité à travers l'Empire. Relativement faibles en Gaule et en Bretagne, où les premiers édits furent pris, elles furent plus fortes dans les provinces orientales. Certaines lois instaurant les persécutions furent annulées par différents empereurs à diverses époques, mais l'édit de Milan de Constantin Ier et Licinius en 313 marque traditionnellement la fin des persécutions.

Les chrétiens avaient toujours été visés par des discriminations au sein de l'Empire[réf. nécessaire], mais les premiers empereurs n'étaient pas favorables à édicter des lois d'ordre général contre le christianisme. Si Néron avait persécuté les chrétiens en les accusant d'être responsables du grand incendie de Rome, ce n'est qu'à partir des années 250, sous les règnes de Dèce et Valérien que de telles lois furent promulguées. Après l'avènement de Gallien en 260, ces lois ne furent plus appliquées. L'accession au pouvoir de Dioclétien en 284 n'attira pas immédiatement l'attention impériale sur la Chrétienté mais marqua un changement graduel d'attitude envers les minorités religieuses. Au cours des 15 dernières années de son règne, Dioclétien purgea l'armée des chrétiens qu'elle comptait, condamna les manichéens à mort et s'entoura d'opposants notoires aux chrétiens.

Contexte[modifier | modifier le code]

Sous la pression des invasions barbares, l'Empire romain connaît une grave crise tout au long du troisième siècle. Des révoltes et des guerres civiles fragilisent aussi le pouvoir c'est-à-dire la position de l'empereur. Ces troubles favorisent la remise au goût du jour des traditions romaines qui prévalaient dans un contexte de patriotisme romain. Le principe divin du pouvoir est alors considéré comme vital pour l'Empire et toute remise en question de ce principe est perçue comme un acte de trahison. Ainsi, les chrétiens et les Juifs refusant de sacrifier à l'empereur, sont vus comme menaçant les fondements de l'État.

Le premier acte de la persécution a lieu le 23 février 303 avec la destruction de l'église de Nicomédie[1],[2].

Les mesures[modifier | modifier le code]

D'après Lactance et Eusèbe de Césarée, son initiative est à mettre au crédit de Galère, le membre de la Tétrarchie le plus résolument antichrétien. C'est cependant Dioclétien, chef incontesté de la tétrarchie, qui entérine la décision. De février 303 à février 304, quatre édits en donnent le cadre juridique.

  1. Premier édit du 24 février 303[1]:
    • Destruction des édifices de culte chrétiens et des écrits chrétiens.
    • Privation des charges, de dignités et de droits pour les aristocrates chrétiens.
  2. Deuxième édit du printemps 303[1]:
    • Arrestation du clergé : on s'aperçoit de l'immense densité des chrétiens surtout en Orient.
  3. Troisième édit de l'automne 303[1]:
    • Obligation pour les clercs de sacrifier à l'empereur. Ceux qui refusent sont soumis à la torture et d'autres mesures très dures sont prises.
  4. Quatrième édit du début 304[1]:
    • Obligation pour tous les chrétiens de sacrifier. On assiste à des scènes de torture et à de nombreuses exécutions.

Il est à noter que les régions dépendant de Constance Chlore n'ont appliqué que le premier des quatre édits[1].

Conséquences[modifier | modifier le code]

Les conséquences devaient se montrer particulièrement lourdes pour les chrétiens d’Afrique et on peut y lire les origines du schisme donatiste.

C'est pendant cette persécution que Victor de Marseille (saint Victor), militaire romain, officier dans la légion thébaine, subit le martyre à Marseille, le (ou 304 selon les sources) pour avoir refusé d'abjurer sa foi chrétienne, ou que Georges de Lydda, devenu saint Georges, fut décapité.

La fin de la première tétrarchie (305) ouvre une période d'indécision gouvernementale. De nombreux responsables se succèdent, surtout dans la partie occidentale, ce qui entraîne un relâchement de l'autorité de l'État et une diminution des persécutions. Au contraire, dans la partie orientale, relativement peu touchée par ces luttes de pouvoir, les massacres s'intensifient.

Or, plus on massacre les chrétiens, plus nombreux sont les païens qui les soutiennent. Aussi Galère signe-t-il un édit de tolérance le . Non seulement l’édit de tolérance admet que les divers édits de persécution n’ont eu aucun effet sur la foi des chrétiens qui ont continué à croire en leur Dieu au lieu des dieux de leurs ancêtres, mais encore il leur enjoint de prier pour les Romains et l'Empire. Le christianisme est dès lors autorisé dans l’Empire romain.

Victimes[modifier | modifier le code]

Bien que la persécution ait été sanglante, seules quelques centaines de victimes sont connues par leur nom[1]. Parmi ceux-ci :

Historiographie[modifier | modifier le code]

Eusèbe de Césarée, dans son Histoire ecclésiastique, et Lactance nous en rapportent les faits, ainsi que de nombreuses vies de saints, telle sainte Eulalie de Mérida ou Théodosie de Tyr.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e f et g Catherine Virlouvet (dir.) et Claire Sotinel, Rome, la fin d'un empire : De Caracalla à Théodoric 212 apr. J.-C - fin du Ve siècle, Paris, Éditions Belin, coll. « Mondes anciens », , 687 p. (ISBN 978-2-7011-6497-7, présentation en ligne), chap. 4 (« La reconstruction d'un empire cohérent (270-306) »), p. 190-192.
  2. Pierre Maraval, Constantin le Grand, Tallandier, .
  3. Serge Lancel, « Actes de Gallonius. Texte critique, traduction et notes », Revue d'Etudes Augustiniennes et Patristiques, vol. 52, no 2,‎ , p. 243–259 (ISSN 1768-9260 et 2428-3606, DOI 10.1484/J.REA.5.100938, lire en ligne, consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • [Baslez 2007] Marie-Françoise Baslez, Persécutions dans l'Antiquité : Victimes, héros, martyrs, Paris, Arthème Fayard, , 417 p., sur books.google.fr (ISBN 978-2-213-63212-4, lire en ligne). Voir notamment le passage : « À Rome, en 309, lors de la Grande Persécution… »
  • [Duval 1990] Noël Duval, « Le culte des martyrs de Salone à la lumière des recherches récentes à Manastirine », Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, vol. 134, no 2,‎ , p. 432-453 (lire en ligne [sur persee]).
  • [Duval 1995] Noël Duval, Les martyrs de la persécution de Dioclétien à Haïdra : Tunisie : un exemple de développement du culte des martyrs locaux entre le IVe et le VIIe siècle (Conférence : Martyrium in multidisciplinary perspective : memorial Louis Reekmans ; Leuven ; Peeters. État de la recherche sur l'église II d'Haïdra dite des martyrs ou de Candidus), (ISBN 906831680X, présentation en ligne).
  • [Pottier 2016] Bruno Pottier et al., « Cultes civiques, régionaux et locaux en Afrique du Nord durant la crise donatiste (IVe – VIe siècle) », dans Jean-Pierre Caillet, Des dieux civiques aux saints patrons: IVe – VIIe siècle, Paris, , sur academia.edu (présentation en ligne, lire en ligne), p. 139-166.
  • [Saulnier 1984] Christiane Saulnier, « La persécution des chrétiens et la théologie du pouvoir à Rome (Ier – IVe siècles) », Revue des Sciences Religieuses, t. 58, no 4,‎ , p. 251-279 (lire en ligne [sur persee]).
  • [Seston 1980] William Seston, « À propos de la Passio Marcelli centurinis. Remarques sur les origines de la persécution de Dioclétien », Publications de l'École Française de Rome, vol. 43,‎ , p. 629-636 (lire en ligne [sur persee]).

Articles connexes[modifier | modifier le code]