Poll tax — Wikipédia

La poll tax (mot anglais signifiant « capitation »), officiellement appelée community charge, est un impôt locatif forfaitaire par tête, instauré au Royaume-Uni par le gouvernement de Margaret Thatcher en 1989. Entré en vigueur en 1990, il est jugé très inégalitaire par les couches les plus modestes de la population car, frappant les individus et non les foyers et ce sans distinction de revenu ou de capital, il était d'autant plus lourd pour les foyers les plus pauvres. Ce nouvel impôt provoqua des émeutes — « poll tax riots » — le à Trafalgar Square. La poll tax fut l'une des causes de la chute de Margaret Thatcher[1] en  : les membres de son gouvernement lui demandèrent de renoncer à cette mesure, mais elle se montra inflexible. La poll tax fut supprimée par John Major, le , et remplacée en 1993 par la council tax[2], un impôt plus progressif.

Historique[modifier | modifier le code]

Après un essai durant un an en Écosse, la poll tax est votée par la Chambre des communes. Chaque localité fixe, librement, le montant de l'impôt local annuel puis le divise en parts égales entre l'ensemble des adultes vivant sur son sol. C'est une capitation (ou « impôt par tête »). Ainsi, le propriétaire d'un château de trente pièces, vivant seul, paiera une part tandis que son concierge, sa femme et leurs quatre enfants, dont deux tout juste majeurs mais au chômage, hébergés dans un petit pavillon de trois pièces au fond du parc du château, en paieront quatre.

Cet impôt entre en vigueur le malgré de violentes manifestations.

Début , après que les différentes localités ont fixé le montant de cet impôt, les classes ouvrière et moyenne découvrent qu'elles paieront un impôt beaucoup plus important qu'avant. Spontanément, des rassemblements et manifestations ont lieu devant de nombreuses mairies. Le , de grosses manifestations ont lieu à Rotherham, Durham, Ashington, Gateshead, Wallsend, et dans différents quartiers de Londres, Southwark, Hillingdon, Lambeth...

Manifestants brandissant des pancartes et défilant devant un bâtiment.
Manifestants défilant devant le palais de Westminster, à Londres, le .

Dans le quartier de Hackney, la manifestation tourne à l'émeute : la police et les magasins sont attaqués et vingt-huit d'entre eux sont pillés. D'autres émeutes éclatent les jours suivants à Brixton, Lambeth et Islington, où affrontements et saccages se succèdent.

Le gouvernement Thatcher se démène pour imposer coûte que coûte cette loi. Le , la veille de l'entrée en vigueur de l'impôt, une grande manifestation est organisée à Trafalgar Square, en plein centre de Londres. Entre trente et deux cent mille manifestants s'y retrouvent, et c'est devant le 10 Downing Street que commence la première émeute du XXe siècle dans le centre-ville de Londres : quatre cents blessés, dont trois cents policiers sont enregistrés. En outre les magasins du centre de Londres sont pillés et les destructions sont nombreuses.

Instrumentalisant l'émeute contre les opposants de la poll tax, Margaret Thatcher appelle, par l'intermédiaire de Scotland Yard, la presse à la délation. Le Times et le Daily Express publient les photos d'émeutiers de Trafalgar Square. Malgré tous les efforts du gouvernement, la poll tax ne passe pas dans l'opinion publique.

Le , une nouvelle manifestation réunit plusieurs milliers de personnes dans le quartier de Brixton. En fin d'après-midi, le cortège arrive aux portes de la prison de Brixton où sont incarcérés certains participants de l'émeute du mois de . Une nouvelle fois, la manifestation dégénère : le quartier devient le lieu d'incendies et de pillages. Des affrontements entre manifestants et forces de l'ordre se soldent par cinquante-six blessés et cent cinq arrestations.

Le , devant l'ampleur et la détermination de l'opposition à sa volonté d'imposer la capitation, Margaret Thatcher, lâchée par des Tories soucieux de leur réélection, démissionne. Le , face à la multiplication des boycotts, le gouvernement conservateur renonce à la poll tax. En remplacement, l'État augmente ses dotations aux municipalités, financées par une hausse de 2,5 points de TVA, puis met en place la council tax dont le montant dépendant de la valeur des biens immobiliers[3].

Dans la culture populaire[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. « Poll tax les aperçus d’une résistance », Le Monde libertaire, 19 septembre 1991.
  2. « La council tax ou taxe d'habitation ».
  3. Patrick de Jacquelot, « Les difficiles funérailles de la poll tax britannique », sur lesechos.fr, (consulté le ).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

La poll tax fut également une taxe votée en 1380 par le Parlement anglais et dont la perception fut à la base de la révolte des travailleurs (ou révolte des paysans) en 1381.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (en) Paul Bagguley, « Protest, poverty and power : a case study of the anti-poll tax movement », Sociological review, 1995, vol. 43, no 4, p. 693-719.
  • (en) David Butler, Andrew Adonis & Tony Travers, Failure in British government: the politics of the poll tax, Oxford, Oxford University Press, 1994.
  • Danny Burns, Poll Tax Rebellion, Stirling, AK Press, 1992.

Article connexe[modifier | modifier le code]