Référendum chilien de 2020 — Wikipédia

Référendum chilien de 2020
Corps électoral et résultats
Inscrits 14 855 719
Votants 7 573 914
50,98 %
Blancs et nuls 39 725
Changement de Constitution
Pour
78,31 %
Contre
21,69 %
Choix de l'assemblée constituante
Élue
79,18 %
Mixte
20,82 %

Le référendum chilien de 2020 ou plébiscite national de 2020 (en espagnol : Plebiscito Nacional 2020) a lieu le dimanche .

En conséquence d'un mouvement social de grande ampleur ayant amené les principaux partis du pays à s’accorder sur la nécessité de convoquer ce référendum, les électeurs sont amenés à se prononcer sur un changement de Constitution, remplaçant celle adoptée en 1980 sous le régime de Pinochet, ainsi que sur la nature de l'organe à laquelle ils souhaitent confier le pouvoir constituant chargé de sa rédaction : une assemblée constituante entièrement élue ou bien composée pour moitié d'élus et pour l'autre moitié de parlementaires.

Le scrutin, qui se tient six mois après la date initialement prévue en raison de la pandémie de Covid-19, voit la proposition de rédaction d'une nouvelle constitution approuvée à une large majorité de près de 79 % des suffrages. L'option d'une assemblée constituante intégralement élue est quant à elle choisie à une majorité similaire, et est mise en œuvre lors d'élections constituantes organisées les 15 et .

Contexte[modifier | modifier le code]

Manifestants chiliens en octobre 2019.

Le référendum est la conséquence directe des manifestations de grande ampleur organisées dans le pays à partir du , et qui ont vu la population exprimer un profond mécontentement à l'encontre des importantes inégalités sociales que connait le Chili. La Constitution alors en vigueur concentre rapidement les critiques en raison de son contenu néolibéral fortement inégalitaire ainsi que de ses origines, celle ci ayant été rédigée en 1980 sous la dictature militaire d'Augusto Pinochet, bien qu'elle ait été depuis amendée à plusieurs reprises notamment pour mettre fin à la présence de sénateur à vie[1],[2]. Elle établit un modèle économique fondé sur la privatisation d'une large part des biens publics, y compris l'éducation, la santé, les retraites et l'accès à l'eau[3],[4]. La Constitution se voit également reprocher d'avoir permis à une minorité de droite de conserver un pouvoir de blocage à l'encontre de toute tentative de modifications du modèle social et économique, en la favorisant lors des élections tout en imposant des conditions de révisions très strictes[5],[6].

Devant l'ampleur du mouvement de contestation populaire, les dirigeants de la majorité des partis chiliens signent l'« Accord pour la paix sociale et la nouvelle Constitution » le suivant. Celui ci prévoit l'amendement de plusieurs articles du chapitre XV de la Constitution permettant la rédaction d'un nouveau texte fondamental via la convocation d'une assemblée constituante, une procédure que la Constitution de 1980 ne permettait pas auparavant[7].

L'amendement est voté le à la Chambre des députés par 127 voix pour, 18 contre et 5 abstentions, puis le lendemain au Sénat par 38 voix pour et 3 contre. Ayant largement franchi la majorité qualifiée de deux tiers des voix dans chaque chambre, l'amendement est transmis au président de la République Sebastián Piñera, qui le signe le puis paraphe quatre jours plus tard le décret de convocation du référendum[8],[9].

Objet[modifier | modifier le code]

Graffiti à Santiago appelant à la rédaction d'une nouvelle Constitution et à l'élection d'une assemblée constituante

Le référendum porte sur deux questions distinctes. La première est « Voulez-vous une nouvelle Constitution ? », et peut être approuvée ou rejetée par les électeurs. La seconde est « Quel type d’organe doit rédiger la nouvelle Constitution ? » et n'est appelée à s'appliquer qu'en cas de victoire du Oui à la première question. L'électeur dispose de deux choix : ou bien une assemblée constituante intégralement composée de membres élus, ou bien une assemblée constituante mixte composée pour moitié de membres élus, et pour l'autre moitié de parlementaires. Les électeurs disposent de bulletins de vote distincts pour les deux questions, sur lesquelles ils peuvent cocher la proposition de leur choix indépendamment l'une de l'autre[10].

En cas de victoire de la proposition de rédaction d'une nouvelle Constitution, des élections constituantes sont prévues le afin d'élire celle-ci en totalité ou pour moitié, selon le choix exprimés par les électeurs à la seconde question. La composition proposée de l'assemblée constituante intégralement élue est de 155 membres élus au scrutin proportionnel plurinominal dans 28 circonscriptions électorales de 3 à 8 sièges en fonctions de leur population. Celle de l'assemblée constituante mixte est quant à elle de 172 membres dont 86 élus au scrutin proportionnel dans 28 circonscriptions de 2 à 4 sièges, et 86 autres membres élus par les deux chambres du Congrès national en leur sein[7],[11].

L'organe constituant disposera alors de neuf mois, prolongeable au maximum de trois mois, pour rédiger une nouvelle Constitution et en voter le texte à la majorité qualifiée des deux tiers de ses membres. Elle devra ensuite être soumise à référendum à une date encore indéterminée, probablement en 2022[7],[10].

Report[modifier | modifier le code]

Initialement prévu le , le scrutin est reporté au suivant en raison de la progression de la pandémie de maladie à coronavirus[12]. La date du était celle initialement prévue pour les élections constituantes, elles-mêmes repoussées au de l'année suivante, puis au 15 et 16 mai.

Campagne[modifier | modifier le code]

Bulletins de vote utilisés

Les mois qui précèdent le scrutin voient l'option d'un changement de Constitution se maintenir à un niveau élevé dans les sondages, autour de 75 % des intentions de vote. La tendance est similaire pour le choix d'une constituante intégralement élue, bien qu'à un niveau moindre, entre 50 et 60 %. La participation demeure la seule véritable inconnue du scrutin dans un contexte pandémique qui fait craindre une peur de se rendre aux urnes de la part des électeurs, malgré les nombreuses mesures sanitaires mises en œuvre. La capitale Santiago ne sort ainsi de son confinement que trois semaines avant le référendum[13],[5].

Sondages[modifier | modifier le code]

Voulez-vous une nouvelle Constitution ?
Pour (Apruebo)
Contre (Rechazo)
Indifférent/Ne sais pas
La ligne représente la moyenne mobile des trois dernières semaines.
Quel type d'organe doit rédiger la nouvelle Constitution ?
Assemblée constituante élue
Assemblée constituante mixte
Indifférent/Ne sais pas
La ligne représente la moyenne mobile des trois dernières semaines.

Résultats[modifier | modifier le code]

Nouvelle Constitution[modifier | modifier le code]

Résultats nationaux[9],[14]
Choix Votes %
Pour 5 899 683 78,31
Contre 1 634 506 21,69
Votes valides 7 534 189 99,48
Votes blancs 12 344 0,16
Votes nuls 27 381 0,36
Total 7 573 914 100
Abstention 7 281 805 49,02
Inscrits/Participation 14 855 719 50,98

Voulez-vous une nouvelle Constitution ?

Votes
Pour
(78,31 %)
Votes
Contre
(21,69 %)
Majorité absolue

Choix de l'organe constituant[modifier | modifier le code]

Résultats nationaux[11],[14]
Choix Votes %
Assemblée constituante élue 5 673 793 79,18
Assemblée constituante mixte 1 492 260 20,82
Votes valides 7 166 053 94,62
Votes blancs 123 277 1,63
Votes nuls 283 794 3,75
Total 7 573 124 100
Abstention 7 282 595 49,02
Inscrits/Participation 14 855 719 50,98

Quel type d'organe doit rédiger la nouvelle Constitution ?

Constituante
élue
(79,18 %)
Constituante
mixte
(20,82 %)
Majorité absolue

Analyse et conséquences[modifier | modifier le code]

Option en tête par commune.

Les Chiliens qui se rendent aux urnes approuvent à une écrasante majorité la demande d'une nouvelle Constitution, un peu plus de 78 % s'exprimant en ce sens[15],[16]. Un pourcentage similaire vote en faveur d'une assemblée constituante intégralement élue, bien davantage que ce que les sondages d'opinions laissaient prévoir[17],[18].

Le résultat positif permet l'ajout à la Constitution actuelle d'un article 130 permettant l'élection d'une assemblée constituante[19],[20].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. « Au Chili, le pouvoir annonce un référendum attendu sur la Constitution », Courrier international, (consulté le ).
  2. « Chili : après la crise, un référendum pour une nouvelle Constitution », Le Point, (consulté le ).
  3. « Chili: vers une nouvelle Constitution », sur rfi.fr, (consulté le ).
  4. « Vote historique au Chili pour une assemblée constituante », sur lemonde.fr, (consulté le ).
  5. a et b « Le Chili en campagne pour initier la réforme de sa Constitution », France 24, (consulté le ).
  6. (en) « Electoral engineering in Chile: the electoral system and limited democracy », sur www.sciencedirect.com (DOI 10.1016/S0261-3794(98)00001-8, consulté le ).
  7. a b et c (es) « LEY NÚM. 21.200 MODIFICA EL CAPÍTULO XV DE LA CONSTITUCIÓN POLÍTICA DE LA REPÚBLICA », Diario Oficial de la República de Chile, (consulté le ).
  8. (es) « CONVOCA A PLEBISCITO NACIONAL PARA LA FECHA QUE INDICA », Diario Oficial de la República de Chile (consulté le ).
  9. a et b (de) « Chile, 25. Oktober 2020 : Wünschbarkeit einer neuen Verfassung », sur sudd.ch.
  10. a et b (es) « Cómo se vota — Plebiscito Nacional + », sur plebiscitonacional2020.cl, ServelChile (consulté le ).
  11. a et b (de) « Chile, 25. Oktober 2020 : Wahlverfahren für den Verfassungsrat », sur sudd.ch.
  12. « Covid-19 chamboule le calendrier électoral en Amérique latine », La Croix, (consulté le ).
  13. (es) « Medidas sanitarias para un Plebiscito Más Seguro — Plebiscito Nacional + », sur plebiscitonacional2020.cl, ServelChile (consulté le ).
  14. a et b « SERVEL », sur www.servelelecciones.cl (consulté le )
  15. « Chili : le « oui » à une nouvelle Constitution l’emporte », La Croix, (consulté le ).
  16. « Au Chili, le oui à une nouvelle Constitution l’emporte largement », Le Monde, (ISSN 1950-6244, consulté le ).
  17. « Chili : le dernier clou dans le cercueil de Pinochet », L'Opinion, (consulté le ).
  18. « Référendum au Chili : un changement de Constitution plébiscité », sur Le Monde.fr, Le Monde, (ISSN 1950-6244, consulté le ).
  19. (es) « ¿Por qué la reforma constitucional del capítulo XV? », sur Diario Constitucional (consulté le ).
  20. « Proyecto de Reforma Constitucional que mediante la creación de una Comisión Bicameral consagra un procedimiento alternativo de reforma de la Constitución », sur www.camara.cl (consulté le ).