Radio Londres — Wikipédia

Radio Londres est le nom donné aux programmes en langue française durant la Seconde Guerre mondiale, diffusés du [1] (à la suite de l'appel du situé dans un bulletin dʼinformation) au dans le studio de la section française de la BBC. Radio Londres était émise depuis l'émetteur de Droitwich en modulation d'amplitude sur la fréquence de 200 kHz (bande des 1 500 m).

Plaque commémorative, cimetière d'Asnelles, Calvados

Histoire[modifier | modifier le code]

Création[modifier | modifier le code]

Dès 1939, la question de la propagande radio prend toute son importance : des représentants du Foreign Office, du ministère français des Affaires étrangères et de l'ambassade britannique à Paris se réunissent le pour en discuter. Il est décidé de réserver une partie des émetteurs pour la communication avec l'étranger et de partager des ondes avec la France. D'autres sujets sont abordés, comme l'interception et le brouillage ou la propagande amie et ennemie[2].

Fin , quatre bulletins quotidiens sont diffusés en français parmi les douze langues étrangères représentées. Ceci correspond aux besoins politiques du Royaume-Uni pendant la drôle de guerre[3].

Promotion des actions de la Résistance[modifier | modifier le code]

À partir du , quand Robert W. Foot et Cécile Graves prennent la tête de la BBC, la propagande se met véritablement en marche et la radio présente de façon uniforme le côté uniquement positif de la situation française et des actions de la Résistance[4].

Radio Londres est avec Radio Brazzaville la voix de la France libre du général de Gaulle qui, dès le , a appelé ses compatriotes à résister : en encourageant les Français à s'insurger contre l'occupant, il entend contrer la désinformation des radios collaborationnistes.

Guerre contre les radios totalitaires[modifier | modifier le code]

Rompant avec le style emphatique de la radio française, de jeunes chroniqueurs (Jacques Duchesne, Paul Gordeaux , Jean Oberlé, Jean-Louis Crémieux-Brilhac, Pierre Bourdan, Maurice Van Moppès dit « Momo » et Pierre Dac) insufflent, avec l'émission Les Français parlent aux Français, un ton nouveau sur l'antenne et inventent la radio de proximité avec messages personnels, sketches, chansons, blagues et publicités détournées. S'ouvre alors une « guerre des radios » entre la « radio résistante », Radio Londres, et les « radios totalitaires », Radio-Paris pronazie et Radio Vichy pétainiste[5].

Brouillage[modifier | modifier le code]

Preuve de son succès pendant cette « guerre des ondes » : les Allemands tentent de faire interdire son écoute en la brouillant, en confisquant les postes et en punissant lourdement les auditeurs. Car Radio Londres est devenue une véritable arme de guerre.

Dans sa chronique dans « Les Français parlent aux Français » le 4 juin 1941, Jacques Duchesne rappelle que les Français libres ne sont pas dupes et savent qu’avec la complicité de Vichy, l’Allemagne brouille les émissions pour empêcher les Français d’écouter.

Il s’adresse ainsi aux Parisiens : « Il paraît qu’on ne peut plus nous entendre à Paris. Alors, me direz-vous, les Parisien ne nous entendent pas en ce moment? ». Le même message est adressé à d'autres villes[6].

Franck Bauer et Pierre Brossolette[modifier | modifier le code]

Franck Bauer, lui prononce 517 fois la phrase « Ici Londres, les Français parlent aux Français ».

Pierre Brossolette prendra la parole à 38 reprises au micro de la BBC en remplacement de Maurice Schumann, dont le discours du lors duquel il rend un vibrant hommage aux « soutiers de la gloire ». Il est détaché des FFL par Maurice Schumann, et il intègre en 1941 l'équipe de l'émission Les Français parlent aux Français. Il en devient le speaker, après avoir passé des tests avec Michel Saint-Denis, dit Jacques Duschesne.

Libération[modifier | modifier le code]

En 1944, le triomphe des Alliés sonne la fin de l'épopée de Radio Londres.

Les émissions en français de la BBC vers l'Europe (diffusées sur ondes courtes et ondes moyennes 648 kHz), se poursuivent jusqu'au milieu des années 1990, et celles vers l'Afrique se poursuivent encore à notre époque.

Émissions[modifier | modifier le code]

Radio Londres est composé, en plus des six bulletins quotidiens d’informations françaises, de deux émissions indépendantes l'une de l'autre, Honneur et Patrie sous la responsabilité de la France libre du général de Gaulle et tenue par Maurice Schumann[7], et Les Français parlent aux Français réalisé par le gouvernement britannique[8].

Ces deux émissions, même si elles suivent la ligne éditoriale de la BBC, prennent des positions opposées sur la libération de la France : dans Honneur et Patrie, René Cassin prend parti pour Charles de Gaulle, tandis que Les français parlent aux français se rallie à Henri Giraud qui est du côté de la coalition américaine prônée par Winston Churchill[9].

Le , les deux émissions fusionnent et c'est André Gillois qui dirige le nouveau programme portant les deux anciens noms[10].

Messages codés[modifier | modifier le code]

Les nombreux messages codés transmis par ces programmes ont largement aidé l'organisation de la résistance française avec le Special Operations Executive. Le premier est envoyé le , répété à 20 h 30 pour confirmer un parachutage, réceptionné par Georges Bégué et Pierre Bloch ; il disait : « Gabrielle vous envoie ses amitiés »[11]. D'autres parachutages utiliseront des codes tels que : « Les yeux sont ouverts » je répète « Les yeux sont ouverts » (Pont-de-Vaux en )[12], ou « Le vin est tiré, il faut le boire » je répète « Le vin est tiré, il faut le boire » (containers)[13] ou encore « Pégasse a tiré le lapin » (armes dans la région du Puy en )[14].

Le passage d'un message codé à la BBC à une heure précise pouvait aussi servir de garantie à des agents SOE pour un emprunt auprès d'une banque[14].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Date de la première diffusion d’Ici la France, émission d'un quart d'heure qui prend le titre devenu célèbre Les Français parlent aux Français le 6 septembre 1940.
  2. Vedel Bonnéry 2017, p. 29.
  3. Vedel Bonnéry 2017, p. 34.
  4. Vedel Bonnéry 2017, p. 100-101.
  5. Jean-Noël Jeanneney, Une histoire des médias. Des origines à nos jours, éditions du Seuil, p. 177.
  6. "4 juin 1941 : le brouillage allemand est bien connu", dans L'Union le 3 avril 2021 [1]
  7. https://www.marianne.net/Histoire-les-deux-Radio-Londres_a151114.html
  8. Brochure Voici la BBC, Londres, 1944, p. 29.
  9. Vedel Bonnéry 2017, p. 110.
  10. Vedel Bonnéry 2017, p. 123.
  11. Courvoisier 1984, p. 119.
  12. Courvoisier 1984, p. 182.
  13. Courvoisier 1984, p. 184.
  14. a et b Courvoisier 1984, p. 186.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Dominique Decèze, Ici Londres...La lune est pleine d'éléphants verts, J. Lanzmann & Seghers Éditeurs , 1979, 271 p.
  • Jacques Pessis, Radio Londres, la guerre en direct, Albin Michel, 2014, 240 p. (ISBN 9782226256867)
  • Aurélie Luneau, Radio Londres - 1940-1944 - Les voix de la liberté, éd. Librairie Académique Perrin, 2005, 349 p. (ISBN 2262023875 et 978-2262023874)
  • Jean-Louis Crémieux-Brilhac, Ici Londres, 1940-1944. les voix de la liberté, La Documentation française, 1975, 267 p.
    • Jean-Louis Crémieux-Brilhac (dir.), Le monde en feu : 8 décembre 1941 - 7 novembre 1942, t. II, Paris, La Documentation Française, .
  • André Courvoisier, Le réseau Heckler : de Lyon à Londres, Paris, France-Empire, , 299 p. (ISBN 978-2-7048-0342-2). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article.
  • Audrey Vedel Bonnéry, La voix de la France : BBC, une radio en guerre, Paris, Vendémiaire, coll. « Chroniques », , 151 p. (ISBN 978-2-36358-276-8)
  • (en) Michael Stenton, Radio London and Resistance in Occupied Europe : British Political Warfare, Oxford University Press, , 423 p. (lire en ligne)
  • (en) Nicholas Hewitt, The Cambridge Companion to Modern French Culture, Cambridge University Press,, , 353 p. (lire en ligne), p. 37
  • (en) Barrett Tillman, Brassey's D-Day Encyclopedia : The Normandy Invasion A-Z, Brassey's, , 289 p. (lire en ligne), p. 52
  • (en) Bradley Lightbody, The Second World War : Ambitions to Nemesis, Psychology Press, , 290 p. (lire en ligne), p. 214

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]