Rhubarbe — Wikipédia

Rheum

Rheum, la Rhubarbe[3], est un genre de plantes herbacées vivaces de la famille des Polygonacées. Il comprend une cinquantaine d'espèces, en particulier la rhubarbe des jardins, Rheum rhabarbarum ou Rheum x hybridum[réf. nécessaire], dont les pétioles des feuilles, ou bâtons de rhubarbe, sont consommés, le plus souvent cuits, en tartes, en confiture, en compote ou comme légume.

Étymologie[modifier | modifier le code]

Le nom « rhubarbe » provient du bas latin rheubarbarum ou rhabarbarum, littéralement « racine de Barbarie ». La Rhubarbe sauvage (Rheum rhaponticum) est par ailleurs appelée « rhapontic », c'est-à-dire « racine du Pont (Euxin) »[4],[5]. Selon l'historien de l'Antiquité tardive Ammien Marcellin, la racine rheum ou rha aurait pour origine le fleuve Rha, ancien nom de la Volga[6]. Jacques André, spécialisé dans la lexicographie du latin technique, qualifie cette étymologie populaire d'Ammien Marcellin et reprise par Isidore de Séville de douteuse[7].

Description[modifier | modifier le code]

C'est une plante vigoureuse des régions tempérées, vivace par un court rhizome volumineux. Elle forme des rosettes basales de grandes feuilles pétiolées, au large limbe plus ou moins palmatilobé parcouru, à la face inférieure, par des nervures saillantes, rougeâtres. Ces feuilles gaufrées, grossièrement triangulaires, sont toxiques, contrairement au pétiole charnu qui est la partie de la plante consommée. Celui-ci, de couleur vert rougeâtre, arrondi et canaliculé, mesure jusqu'à 50 cm de longueur pour 3 à 7 cm de largeur et d'épaisseur.

Les parties aériennes de la plante disparaissent totalement pendant l'hiver.

Histoire[modifier | modifier le code]

Plusieurs espèces de rhubarbes étaient connues dans l'Antiquité. Rheum officinale était connue comme plante médicinale en Chine depuis très longtemps et R. ribes en Grèce antique par Dioscoride (Materia medica[8], III, 2). Rheum officinale fut introduite en Europe par la Route de la soie dès le Xe siècle grâce aux marchands arabo-persans[9]. Elle est signalée par Marco Polo dans son livre[10] (il est souvent mentionné à tort qu'il fut le premier occidental à la voir, alors qu'il fut précédé par le franciscain Guillaume de Rubrouck, et le premier à l'importer en Europe[11], cet explorateur franciscain de langue flamande racontant aussi avoir vu un moine l'utiliser avec de l'eau bénite[10]) et Odoric de Pordenone, elle fut d'abord cantonnée parmi les plantes médicinales (constituant du catholicum simple de la pharmacopée maritime occidentale au XVIIIe siècle[12]) et ornementales, elle ne fut cultivée et consommée comme plante potagère qu'à partir du XVIIIe siècle[13].[style à revoir] L'importation en France de la rhubarbe pourrait être le fait de Coste D'Arnobat[14] et du célèbre botaniste Charles-Alexandre Julliard, qui en rapportera au roi Louis XIV.

En Europe, c'est en Grande-Bretagne qu'on commence à l'utiliser en cuisine, dans le courant du XIXe siècle[15]. Les recettes sont cependant très peu nombreuses jusqu'au milieu du XXe siècle[15].

Liste des espèces[modifier | modifier le code]

Selon Plants of the World online (POWO) (15 mai 2021)[2] :

Production[modifier | modifier le code]

Champ de rhubarbe dans la plaine de Montesson.

Les rhubarbes cultivées sont Rheum rhaponticum, Rheum rhabarbarum et leurs hybrides. Les préparations médicinales sont obtenues à partir de Rheum officinale.

La rhubarbe préfère les sols profonds et frais, avec de la fumure organique et une exposition ensoleillée. Les touffes sont divisées entre la fin de l'hiver et le début du printemps, en coupant des bouts portant un à trois bourgeons, et sont plantées en laissant ces derniers affleurer à la surface.

La récolte se fait, dès la deuxième année, de fin avril à juin, mais une deuxième récolte peut avoir lieu fin septembre. Il est recommandé de ne pas prélever plus des deux tiers des pétioles d'une même plante. Ceux-ci se conservent quelques jours après récolte.

Un pied de rhubarbe est exploité efficacement durant cinq à dix ans, mais il peut vivre plus de cinquante ans avec une production affaiblie. Des plants de rhubarbe de plus de cent ans ont déjà été recensés et produisent encore une récolte abondante.

Maladies et parasites[modifier | modifier le code]

Les plants peuvent être attaqués par le Verticillium, un champignon qui décompose les racines. Les feuilles jaunissent et meurent en quelques semaines, puis la plante disparaît pendant un mois.

Utilisation[modifier | modifier le code]

Culinaire[modifier | modifier le code]

Seuls les pétioles, appelés aussi « bâtons de rhubarbe », peuvent être consommés crus, cuits, en tartes, en confiture ou comme légume. On peut également en faire des sirops ou des sorbets[16],[17]. L'acidité de la plante demande à être atténuée par du sel ou du sucre. Les variétés rouge carmin de rhubarbe sont plus tendres que les vertes.

Un vin de rhubarbe est produit dans les Vosges : le Crillon des Vosges[18]. Cette spécialité a été inventée à la suite du ravage du vignoble local par le phylloxéra[19].

Musicale[modifier | modifier le code]

Les Mongols fabriquent une flûte appelée tsuur, avec la hampe florale creuse de la rhubarbe ou du céleri sauvage. Cet instrument, en voie de disparition, est classé au patrimoine culturel immatériel de l'humanité par l'UNESCO.

Autres usages[modifier | modifier le code]

La rhubarbe peut également être utilisée pour le tannage de peaux[20].

Vertus[modifier | modifier le code]

La rhubarbe est bien pourvue en vitamine C (12 mg/100 g), elle a ainsi des propriétés toniques et antianémiques. Elle est très laxative grâce à sa richesse en fibres et est utilisée comme purgatif, proche de l'aloès et du séné. Les principes actifs sont des dérivés de l'anthraquinone et leurs glucosides qui augmentent les mouvements péristaltiques du côlon.

La rhubarbe apporte des minéraux, certains en grande quantité comme le potassium et le phosphore, et certains en quantité moindre, mais néanmoins intéressante comme le magnésium et le calcium.

La substance sécrétée par sa racine est appréciée pour son action antiseptique sur les problèmes de foie. En outre, la rhubarbe est un bon anti-inflammatoire pour les muqueuses buccales.

Les racines de la rhubarbe contiennent des rhaponticosides (en), dérivé du stilbène[21], à l'origine des propriétés veinotoniques de la plante. Au XXe siècle, Hans Thoueille et Adolf Petermann les prescrivaient pour le traitement des varices.[réf. nécessaire]

Toxicité[modifier | modifier le code]

Les limbes des feuilles sont toxiques à cause notamment de leur teneur en acide oxalique[15]. Les glucosides d'anthraquinone pourraient également être responsables de cette toxicité (voir glycoside). De nombreux cas d'intoxication ont été rapportés, surtout en Grande-Bretagne pendant la Première Guerre mondiale, où la consommation de cette plante avait été recommandée[22].

La plupart des intoxications ont lieu lorsque des limbes sont consommés à la place des pétioles. On peut voir apparaître des symptômes tels que nausées, vomissements, crampes abdominales et diarrhées. Les oxalates solubles précipitent sous forme d'oxalate de calcium dans les fluides organiques. Dans les urines, cet effet peut provoquer des dommages rénaux[23].

Les feuilles sont également toxiques pour les animaux. Elles sont utilisées en apiculture pour lutter contre le varroa[24].

Symbolique[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. MNHN & OFB [Ed]. 2003-présent. Inventaire national du patrimoine naturel (INPN), Site web : https://inpn.mnhn.fr, consulté le 15 mai 2021
  2. a et b POWO. Plants of the World Online. Facilitated by the Royal Botanic Gardens, Kew. Published on the Internet; http://www.plantsoftheworldonline.org/, consulté le 15 mai 2021
  3. Parfois orthographiée Rubarbe, sans le h.
  4. Lucien Guyot et Pierre Gibassier, Les noms des plantes, Presses universitaires de France, , p. 98.
  5. François Couplan, Les plantes et leurs noms : histoires insolites, Éditions Quæ, (ISBN 978-2-7592-1800-4, lire en ligne), p. 212.
  6. Ammien Marcellin, Res gestae, XXII, 8, 28
  7. Jacques André, Isidore de Séville.Étymologies : de l'agriculture, Les Belles Lettres, p. 184.
  8. (en) Pedanius Dioscorides of Anazarbus, De materia medica (translated by Lily Y. Beck), Olms - Weidmann, , 630 p.
  9. Pierre Huard et Ming Wong, La médecine chinoise au cours des siècles, Éditions R. Dacosta, , p. 152.
  10. a et b Katia Astafieff (préf. Francis Hallé), L'aventure extraordinaire des plantes voyageuses, Malakoff, Dunod, , 192 p. (ISBN 978-2-10-076485-3, lire en ligne), chap. 8 (« Enquête sur une plante qui venait du froid »), p. 126.
  11. (en) Roger Phillips, Vegetables, Random House, , p. 66.
  12. Yannick Romieux, De la hune au mortier, Nantes, Éditions ACL, .
  13. Élisabeth Lemoine, Guide des légumes du monde, Delachaux et Niestlé, , p. 140.
  14. Tableau des récompenses accordées par le Bureau de consultation des Arts et Métiers du au , Archives Nationales F17 1138 dossier 18) : la page précise sous son nom : « importation de la rhubarbe en France & culture faite avec succès près de Grosbois, dessication bien entendue de cette racine ».
  15. a b et c Éric Birlouez, Petite et grande histoire des légumes, Quæ, coll. « Carnets de sciences », , 175 p. (ISBN 978-2-7592-3196-6, présentation en ligne), Une fabuleuse diversité, « La rhubarbe, ou « racine des barbares » : consommée comme un fruit ! », p. 92-94.
  16. « Bâton de rhubarbe », Légumes, sur Au Potager d'autrefois (consulté le ).
  17. Recette du sorbet à la rhubarbe.
  18. « Le vin de rhubarbe, boisson des pauvres, des Vosges aux palaces parisiens »
  19. Jürgen THÖNE, « Sur les traces du vin de rhubarbe à la ferme Moine de Xertigny »
  20. Bariza Marouf, Siham Zaarour et M. Sebti (encadreur), Enquête ethnobotanique sur l'usage des plantes utilitaires dans la région de Jijel (mémoire de fin d'études), Jijel, université de Jijel, , 78 p. (lire en ligne [PDF]), p. 21.
  21. (en) Hildebert Wagner et Sabine Bladt, Plant Drug Analysis : A Thin Layer Chromatography Atlas, Springer Science & Business Media, , 384 p. (ISBN 978-3-540-58676-0, lire en ligne)
  22. Système canadien d'information sur les plantes toxiques
  23. (en) Lewis S. Nelson, M.D. ; Richard D. Shih, M.D. ; Michael J. Balick, Ph.D., Handbook of Poisonous and Injurious Plants, Second Edition, New York, Springer, , 340 p. (ISBN 978-0-387-31268-2 et 0-387-31268-4), p. 251-252
  24. « Le varroa (varroa destructor) », sur apiculteur.ch (consulté le ).
  25. Ph. Fr. Na. Fabre d'Églantine, Rapport fait à la Convention nationale dans la séance du 3 du second mois de la seconde année de la République Française (lire en ligne), p. 26.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]