Serge Haroche — Wikipédia

Serge Haroche, né le à Casablanca au Maroc, est un physicien français[1] travaillant dans le domaine de la physique quantique. Le , il reçoit la médaille d'or du CNRS[2],[3]. Le , il est colauréat du prix Nobel de physique avec l'Américain David Wineland pour « leurs méthodes expérimentales novatrices qui permettent la mesure et la manipulation des systèmes quantiques individuels »[4].

Biographie[modifier | modifier le code]

Famille[modifier | modifier le code]

Serge Haroche est le fils d'Albert Haroche, avocat parisien né au Maroc, et de Valentine Roublev, une enseignante d'origine russe dont la famille avait émigré à Casablanca après la Révolution d'Octobre[2],[5],[6]. Ses grands-parents paternels étaient directeurs de l'Alliance israélite universelle (AIU)[6]. Avec sa famille, il quitte le Maroc en 1956, à l'âge de douze ans, lorsque prend fin le protectorat que la France exerçait sur ce pays[2].

Serge Haroche est marié depuis 1965 à Claudine Zeligson, sociologue et anthropologue ; le couple a deux enfants. Il est le frère de l'éditeur et romancier Joël Haroche et l'oncle du chanteur Raphaël[6],[7].

Formation[modifier | modifier le code]

Après de brillantes études secondaires au lycée Carnot puis à Louis-Le-Grand à Paris, il prépare le concours d'entrée à plusieurs grandes écoles[2],[8]. En 1963, classé premier au concours d'entrée à l'École polytechnique[6] et parmi les premiers[9] au concours d'entrée à l'École normale supérieure, il choisit d'intégrer cette dernière. Il suit parallèlement les cours de la faculté des sciences de l'université de Paris de 1963 à 1967. Après sa licence en sciences physiques, il passe avec succès en 1967 l'agrégation de physique et obtient la même année le doctorat de spécialité (3e cycle)[10]. En 1971, il soutient sa thèse de doctorat en sciences physiques à l'université de Paris VI ; ses recherches ont été effectuées sous la direction de Claude Cohen-Tannoudji[11].

Carrière universitaire[modifier | modifier le code]

Il entre en 1967 au Centre national de la recherche scientifique, où il occupe successivement les postes d'attaché de recherche (1967-1971), de chargé de recherche (1971-1973) et de maître de recherche (1973-1975). Dans le cadre d'un stage post-doctoral, il passe par ailleurs un an à l'université Stanford, dans le laboratoire de Arthur Leonard Schawlow (1972-1973). Il est nommé professeur à l'université Paris-VI en 1975 et membre senior de l'Institut universitaire de France en 1991 pour une durée de cinq ans[12], renouvelée en 1996[13].

Il exerce en même temps dans d'autres institutions, notamment comme maître de conférences à l'École polytechnique (1973-1984), professeur invité à l'université Harvard (1981), professeur à mi-temps à l'université Yale (1984-1993), directeur du département de physique de l'École normale supérieure (1994-2000)[14] et professeur invité au Conservatoire national des arts et métiers (2000). En 2001, il est élu professeur au Collège de France à la chaire de physique quantique[15].

Serge Haroche se voit confier par ses pairs, en , les fonctions d'administrateur du Collège de France[16],[17],[18]. À ce titre, il devient président du conseil d'administration de la Fondation Hugot du Collège de France, où il siégeait depuis 2010. Il exerce ce mandat jusqu'en . En 2014, il est nommé membre du Conseil stratégique de la recherche[19].

Recherches[modifier | modifier le code]

Interview de Serge Haroche après la remise de son prix Nobel en décembre 2012.

Serge Haroche est un spécialiste de physique atomique et d'optique quantique. Après une thèse sur l'atome habillé[20],[21] effectuée sous la direction de Claude Cohen-Tannoudji (1967-1971), un lauréat du prix Nobel, il développe dans les années 1970-1980 des méthodes nouvelles de spectroscopie laser basées sur l'étude des battements quantiques et de la superradiance. Il s’intéresse ensuite aux atomes de Rydberg, états atomiques géants que leur sensibilité aux micro-ondes rend particulièrement bien adaptés à des études fondamentales sur l'interaction matière-rayonnement. Il montre que ces atomes, couplés à des cavités supraconductrices contenant quelques photons, constituent des systèmes idéaux pour tester les lois de la décohérence quantique et pour démontrer qu'il est possible de réaliser des opérations de logique quantique prometteuses pour le traitement de l'information[22].

Nommé en 2001 professeur au Collège de France dans la chaire de physique quantique[15], Serge Haroche dirige le groupe d'électrodynamique quantique en cavité au sein du laboratoire Kastler Brossel, qui dépend de l'École normale supérieure, de l'université Pierre-et-Marie-Curie et du CNRS.

Ses cours et travaux au Collège de France[23] portent sur la mécanique quantique et l'information quantique[24].

Le , il se voit décerner le prix Nobel de physique avec l'Américain David Wineland pour leur recherche concernant la mesure et la manipulation des systèmes quantiques individuels[1],[4].

Prises de position[modifier | modifier le code]

Développement de la recherche, et place des jeunes[modifier | modifier le code]

Dans un échange avec des lecteurs du journal Le Monde en 2012, le nouveau Prix Nobel de physique insiste sur l'importance de développer la recherche, tant appliquée que fondamentale. Il donne son point de vue pour que les jeunes s'investissent dans la recherche « il ne suffit pas d'avoir les qualités intellectuelles, il faut avoir la possibilité de travailler dans des conditions matérielles décentes... Il faut des salaires décents au départ, et des perspectives de carrière et de promotion décentes. ...Il faut rendre les carrières scientifiques plus compétitives... »[25].

Lors d'un entretien à France Inter en février 2021, il met en avant le manque de financement de la recherche en France en particulier scientifique et fondamentale. Il déplore le manque d'attractivité de la carrière en France pour les chercheurs qui à Bac+10, démarrent à moins de deux fois le SMIC[26].

Appropriation démocratique de la recherche[modifier | modifier le code]

En octobre 2013, Serge Haroche et Marc Fontecave, professeurs au Collège de France, plaident pour une réappropriation démocratique des grandes recherches scientifiques. « En dépit de l'effort constant des chercheurs pour apporter des solutions inédites aux nouveaux défis de demain – réponse au changement climatique, développement des nouvelles technologies de l'énergie, nouveaux moyens thérapeutiques - la science plus que jamais suscite souvent la méfiance, voire la défiance du public. Pour une large part cela vient d'une incompréhension de ce qu'est la démarche scientifique. »[27].

Soutien à l’agriculture de précision (OGM)[modifier | modifier le code]

En 2016, il signe, avec 106 autres prix Nobel, une Lettre de soutien de Prix Nobel à l’agriculture de précision (OGM). C'est un appel à l'Organisation Non Gouvernementale (ONG) environnementale Greenpeace à cesser de s'opposer aux cultures d'organismes génétiquement modifiés. Selon cette ONG c'est une menace pour l'environnement, la santé humaine et la sécurité alimentaire »[28],[29].

Distinctions[modifier | modifier le code]

Décorations[modifier | modifier le code]

Sociétés savantes[modifier | modifier le code]

Prix[modifier | modifier le code]

Honneurs[modifier | modifier le code]

Plusieurs Doctorats honoris causa lui ont été décernés :

Publications[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b « Prix Nobel – Le Nobel de physique attribué au Français Serge Haroche et à l'Américain David G. Wineland », sur lemonde.fr, Le Monde, (consulté le ).
  2. a b c et d Pierre Le Hir, « Serge Haroche : cantique du quantique », sur lemonde.fr, Le Monde, , mis à jour le (consulté le ).
  3. [PDF] Dossier de presse.
  4. a et b (en) Dossier de presse, sur le site de la Fondation Nobel, .
  5. Jean-Louis Beaucarnot, « Origines et généalogie de Serge Haroche, prix Nobel de physique », sur rfgenealogie.com, La Revue française de généalogie, (consulté le ).
  6. a b c et d (en-US) Serge Haroche, David J. Wineland, « The Nobel Prize in Physics 2012 - Biographical », sur NobelPrize.org, (consulté le )
  7. Interview radiophonique de Raphael sur Europe 1 le samedi par Isabelle Morizet.
  8. (en) Gérard P. Michon, « Haroche Experiment », sur numericana.com (consulté le )
  9. Troisième selon un article de Libération : « Un Français lauréat du Nobel de physique 2012 », sur liberation.fr, Libération, , cinquième selon lui-même lors d'une émission sur France Culture, le .
  10. Étude théorique et expérimentale d'un nouveau spectre de raies de résonance magnétique observé en pompage optique transversal.
  11. Serge Haroche, Professeur Collège de France and École Normale Supérieure, Paris, CQED, consulté sur cqed.org, le .
  12. Arrêté du portant nomination à l'Institut universitaire de France, JORF no 286 du , p. 16074, sur Légifrance.
  13. Arrêté du portant nomination des membres seniors et juniors de l'Institut universitaire de France, JORF no 191 du , p. 12453, sur Légifrance.
  14. Serge Haroche, un chercheur sous les feux des projecteurs, Visionsmag, .
  15. a et b Fiche personnelle sur le site du Collège de France.
  16. Échos de l'IUF, IUF, .
  17. Serge Haroche nommé administrateur du Collège de France, UPMC, .
  18. Biographie de Serge Haroche, Collège de France, .
  19. Décret du portant nomination au Conseil stratégique de la recherche.
  20. Claude Cohen-Tannoudji, « Atomes habillés par des photons optiques ou de radiofréquence », Laboratoire de spectroscopie hertzienne de l'ENS Paris, Journal de physique, colloque C5a, supplément au no 10, t. 32, octobre 1971, p. C5a-11 [PDF]. Consulté le .
  21. Claude Cohen-Tannoudji et Serge Haroche, « Le concept d'atome « habillé » par des photons – Quelques exemples d'application », sur phys.ens.fr, Faculté des sciences de Paris et Laboratoire de spectroscopie hertzienne, associé au CNRS (consulté le ) [PDF].
  22. Serge Haroche, « Vie et mort d'un photon : une autre manière de voir », Lettre du Collège de France, no 20, juin 2007
  23. Cours et travaux au Collège de France sur college-de-france.fr
  24. Leçons du Collège de France, chaire de physique quantique, sur Cqed.org.
  25. « Serge Haroche : "Il y a une contradiction entre le temps des politiques et le temps de la recherche" », sur Le Monde, (consulté le )
  26. « Serge Haroche, un esprit éclairé », sur France Inter, (consulté le )
  27. Serge Haroche et Marc Fontecave, « Plus de science pour plus de démocratie », sur Le Monde.fr, (consulté le )
  28. « Laureates Letter Supporting Precision Agriculture (GMOs) | Support Precision Agriculture », sur supportprecisionagriculture.org (consulté le )
  29. « 107 Nobel prient Greenpeace de ne plus faire la guerre aux OGM », sur LePoint.fr, (consulté le )
  30. « Décret du  », sur legifrance.gouv.fr
  31. ORDRE DE LA LEGION D'HONNEUR Décret du 3 avril 1996 portant promotion et nomination
  32. Décret du 13 juillet 2005 portant promotion et nomination
  33. Décret du 31 décembre 2012 portant promotion
  34. Décret du 12 juillet 2017 portant élévation aux dignités de grand'croix et de grand officier
  35. « Serge Haroche », sur Prix et distinctions - Université de Montréal (consulté le ).
  36. « Conférence de Serge Haroche, Prix Nobel de physique 2012 », sur Afapatras.com (consulté le ).
  37. « Ph.D. Honoris Causa », sur Academic Affairs Office, (consulté le ).
  38. [PDF] "Honorary Université municipale de Hong Kong en Science", Chine, 2017
  39. (en) « Honorary invitation to Mr. Serge Haroche », sur Society of Biochemistry and Molecular Biology of Chile, (consulté le ).
  40. « « La lumière révélée » : Serge Haroche, physicien éclairé », sur LeMonde.fr,

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Émissions de Radio[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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