Sociologie cognitive — Wikipédia

La sociologie cognitive est l'étude des comportements humains (notamment de l'apprentissage et des manières de connaître) à travers l'interaction et les interconnexions entre individus.

Discipline de la sociologie dont le développement est favorisé par l'essor des sciences cognitives, elle est initiée par le sociologue américain Aaron Cicourel qui introduit ce terme en 1974[1] mais l’utilisant dans un sens fort différent[2]. Cette approche se situe aux confluents d'autres disciplines telles la linguistique (notamment celle de Noam Chomsky), les sciences cognitives et l'anthropologie.

Historique[modifier | modifier le code]

Collègue de Harold Garfinkel et membre éminent du courant ethnométhodologique à ses débuts, Cicourel développe par la suite la sociologie cognitive, en focalisant sur l'étude du langage et de sa signification.

Inspirée des travaux pionniers de Lev Sémionovitch Vygotski et de Gregory Bateson, selon lequel « on n'apprend pas tout seul », la sociologie cognitive tient compte des liens entre l'individu et les personnes avec lesquelles il est en relation. Il s'agit de reconstruire ce réseau de relations afin de comprendre le mode d'apprentissage de l'individu.

Pour certains auteurs comme L.S. Vygotski, A.L. Brown, R.A. Ferrara, apprendre, c'est devenir de plus en plus apte à participer aux pratiques sociales de sa communauté. Pour sa part, Jerome S. Bruner préconise la prise en compte du contexte historique et social des participants. D'un autre point de vue, Michel Deleau, porte son attention sur l'importance des échanges intersubjectifs.

Selon Willem Doise, les interactions des acteurs sociaux se construisent dans un équilibre, à l'intérieur de rapports de communication. Cette dynamique se constitue autour de problèmes à la signification forte. Elle entraîne des prises de positions individuelles liées à l'appartenance sociale des acteurs. Toujours selon Doise, les rapports de communication ont un caractère symbolique et participent à la construction identitaire.

La sociologie cognitive fournit un cadre pour comprendre, prévoir et pour modifier le comportement humain. C'est en ce sens qu'Albert Bandura définit le comportement humain comme une interaction de facteurs personnels, du comportement et de l'environnement.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Aaron Victor Cicourel, Cognitive Sociology : Language and Meaning in Social Interaction, Free Press, , p. 1.
  2. Jean-Hugues Déchaux, « Un « tournant cognitiviste » en sociologie ? Contributions et débats », Revue française de sociologie, vol. 51, no 4,‎ , p. 641.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Gregory Bateson, Vers une écologie de l'esprit, Paris, Le Seuil, t. 1, 1977 ; t. 2 1980.
  • Gregory Bateson, La nature et la pensée, Paris, Le Seuil, 1984.
  • (en) A.L. Brown et R.A. Ferrara, « Diagnosing zones of proximal development », dans Communication and cognition : vygotskian perspective, Cambridge, Cambridge University Press, 1985, p. 273-305.
  • Jerome S. Bruner, Car la culture donne forme à l'esprit, Paris, Eshel, 1991.
  • Jerome S. Bruner, Savoir faire, savoir dire. Le développement de l'enfant, traduction en français par Michel Deleau, Paris, PUF, « Psychologie d'aujourd'hui », 1983.
  • (en) Jerome S. Bruner, J.J. Goodnow, G.A. Austin, A study of thinking, New-York, Wiley, 1956.
  • (en) Jerome S. Bruner, R.R. Olver, P.M. Greenfield, Studies in cognitive growth, Wiley, New-York, 1966.
  • Aaron Cicourel, La sociologie cognitive, Paris, PUF, Paris, 1979.
  • Michel Deleau, Les origines sociales du développement mental, Paris, Armand Colin, « U. Psychologie », 1990.
  • Willem Doise et Gabriel Mugny, Le développement social de l'intelligence, Paris, InterÉditions, 1981.
  • Willem Doise et Gabriel Mugny, Psychologie sociale et développement cognitif, Paris, Armand Colin, « U », 1997.
  • Armand Duval, Gérard Letourneur et Pierre Vayer, Les communications dans la classe et l’apprentissage de l'enfant, Paris, Armand Colin, « Guide Formation », 1987.
  • A. Flieller, La coéducation de l'intelligence, Nancy, Presses Universitaires de Nancy, Nancy, 1986.
  • (en) J. W. Jones, « Personality and epistemology: Cognitive social learning theory as a philosophy of science », dans Zygon (24:1), 1989, pp. 23-38.
  • (en) J. Lave et E. Wenger, Situated learning : Legitimate peripheral participation. New York : Cambridge University Press, 1991,
  • Marvin Minsky, La société de l’esprit, InterÉditions, Paris,1988, ; édition américaine originale : The society of mind - Simon and Schuster - New York - 1986.
  • Gabriel Mugny, Psychologie sociale du développement cognitif, Berne (etc.), Peter Lang, 1985.
  • Anne-Nelly Perret-Clermont, La construction de l'intelligence dans l'interaction sociale, Berne (etc.), Peter Lang, 1979.
  • Bernard Schneuwly et Jean-Paul Bronckart, Vygotsky aujourd'hui, Neuchâtel ; Paris, Delachaux et Niestlé, « Textes de base en psychologie », 1985.
  • Lev Sémionovitch Vygotski, Pensée et langage, Paris, Éditions Sociales/Messidor, « Terrains », 1985 ; éd. russe originale, 1934.
  • Gérald Bronner, L'empire de l'erreur, « Sociologies », PUF, 2007.
  • Raymond Boudon (2010). La théorie générale de la rationalité, base de la sociologie cognitive. La sociologie cognitive, Paris, Orphys/Maison des Sciences de l’Homme, coll.«Cogniprisme.
  • Fabrice Clément (1999). La sociologie cognitive: une bien étrange croyance. Cahiers internationaux de sociologie, 389-404.

Articles connexes[modifier | modifier le code]