Tétration — Wikipédia

En mathématiques, la tétration (ou encore nappe exponentielle, hyperpuissance, tour de puissances, super-exponentiation ou hyper4) est une « exponentiation itérée ». C'est le premier hyperopérateur après l'exponentiation.

Le mot-valise tétration a été forgé par Reuben Goodstein sur la base du préfixe tétra- (quatre) et itération. La tétration est utilisée pour l'écriture des grands nombres. Elle suit l'addition, la multiplication et l'exponentiation comme indiqué ci-après :

  1. addition
  2. multiplication
  3. exponentiation
  4. tétration

avec chaque fois b apparitions de la lettre a. La multiplication (a × b) peut être vue comme (b–1) itérations de l'opération "ajouter a", l'exponentiation (ab) comme (b–1) itérations de l'opération "multiplier par a" donc b apparitions de la lettre a. De manière analogue, la tétration (ba) peut être considérée comme (b–1) itérations de l'opération "élever à la puissance a".

On remarquera que lorsque l'on évalue une exponentiation à niveaux multiples, l'exponentiation est effectuée au niveau le plus « profond » en premier lieu (en notation, au niveau le plus élevé), c'est-à-dire de la droite vers la gauche. En d'autres termes :

n'est pas égal à .

Ceci est la règle générale pour l'ordre des opérations impliquant une exponentiation répétée.

Afin de généraliser le premier cas ci-dessus (calcul des puissances de la droite vers la gauche) de la tétration à des valeurs non entières, une nouvelle notation est nécessaire. Le second cas (calcul de la gauche vers la droite) peut être également écrit : , donc l'écriture de sa forme générale utilise toujours une notation d'exponentiation ordinaire.

Les notations dans lesquelles une tétration peut être notée (parmi celles permettant même des niveaux d'itérations plus élevés) incluent :

  • la notation standard : ba, utilisée en premier lieu par Hans Maurer[1] ; cette notation a été popularisée par le livre de Rudy Rucker, Infinity and the Mind.
  • la notation des puissances itérées de Knuth : — peut être étendue en utilisant plus de flèches (ou de manière équivalente, une flèche indexée).
  • la notation des flèches chaînées de Conway : — peut être étendue en augmentant le nombre 2 (équivalentes avec les extensions au-dessus), mais aussi, de manière plus performante, en étendant la chaîne.
  • la notation hyper4 : — peut-être étendue en augmentant le nombre 4 ; cela donne la famille des hyper opérateurs.

Le cas particulier a = 2 peut s'écrire avec la fonction d'Ackermann :

,
c.-à-d. .

La flèche vers le haut est utilisée de manière identique au signe d'omission, ce qui fait que l'opérateur tétration peut être écrit comme ^^ en ASCII : a^^b.

Définition formelle

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Pour un nombre réel a > 0 et un entier naturel n, on définit par récurrence :

 ;
.

(Les exemples écrits avec virgule sont approchés)

n = n↑↑1 n↑↑2 n↑↑3 n↑↑4
1 1 1 1
2 4 16 65 536
3 27 7,63×1012
4 256 1,34 × 10154
5 3 125 1,91 × 102 184
6 46 656 2,70 × 1036 305
7 823 543 3,76 × 10695 974
8 16 777 216 6,01 × 1015 151 335
9 387 420 489 4,28 × 10369 693 099
10 10 000 000 000 1010 000 000 000

Extension à la valeur − 1 du second opérande

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En utilisant la relation (déduite de la définition de la tétration), on peut définir les valeurs pour pour .

Cela confirme la définition intuitive de comme étant simplement n. Cependant, on ne peut plus définir plus de valeurs par itération supplémentaire de cette manière, puisque n'est pas défini.

Extension à la valeur 0 de la base

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peut être défini sans problème comme étant égal à 1. Puisque est indéfini (), la définition donnée ci-dessus ne peut être utilisée lorsque n = 1 et doit rester une quantité non définie.

Parfois, 00 est considéré comme quantité indéfinie. Dans ce cas, les valeurs pour peuvent être définies par la limite qui existe et vaut :

peut être définie en termes de cette limite et est en accord avec la définition de .

Extension de la tétration à des valeurs réelles positives de la base

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Représentation graphique de la fonction x^^n
Représentation graphique de la fonction pour de petites valeurs de n.

L'extension de aux nombres réels est relativement simple et donne, pour chaque nombre entier naturel n, une fonction super-puissance (le préfixe super est parfois remplacé par hyper : fonction hyper-puissance).

Comme indiqué précédemment, pour les entiers positifs n, la fonction tend vers 1 pour x tendant vers 0 si n est pair, et vers 0 si n est impair, alors que pour et , la fonction est constante, avec pour valeur 1 et 0, respectivement.

Extension de la tétration à des bases complexes

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Puisqu'un nombre complexe peut être élevé à une puissance complexe en utilisant la branche principale du logarithme complexe, la tétration peut être appliquée aux nombres de la forme , dans lesquels i est l'unité imaginaire.

Ainsi, calculons, par exemple, dans lequel . L'exponentiation est effectuée en utilisant la branche principale du logarithme complexe, et l'on a la relation :

Ce qui suggère une définition par récurrence pour lorsque  :

On en déduit les valeurs approchées suivantes ( est l'exponentiation ). :

La résolution de la relation conduit aux relations attendues et .

Dans le plan complexe, la suite converge en spirale (voir infra). De telles suites de tétration ont été étudiées depuis l'époque d'Euler[2] mais sont très peu comprises en raison de leur comportement chaotique. Les recherches les plus publiées se sont historiquement concentrées sur la convergence de la fonction de tour de puissances. La recherche actuelle a grandement bénéficié du progrès de puissantes stations de calcul avec des supports logiciel en mathématiques symboliques et fractales. La plupart de ce qui est connu sur la tétration vient de la connaissance générale de la dynamique complexe et de la recherche spécifique sur les nappes exponentielles.

Extension de la tétration à des valeurs réelles > − 2 du second opérande

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À ce jour, il n'existe pas de solution communément acceptée pour le problème général d'extension de la tétration aux nombres réels et complexes, bien que cela soit un champ de recherche actif.

Considérons le problème de trouver une fonction super-exponentielle ou une fonction hyper-exponentielle

qui est une extension au réel de ce qui est défini précédemment, et qui satisfait :

  •  ;
  • f est croissante (pour ) ;
  • f est continue.
Graphes des fonctions définies en utilisant une interpolation affine entre − 1 et 0.

Lorsque est définie sur un intervalle de longueur unitaire, on peut définir la fonction dans son ensemble pour tout , par récurrence.

Une solution simple est donnée par l'interpolation affine entre − 1 et 0 :

pour ,

par conséquent :

pour
pour ,
pour
pour etc.

Cependant, si a ≠ e, la fonction ainsi définie est seulement dérivable par morceaux : à des valeurs entières de x, la dérivée est multipliée par entre deux intervalles :

,
,
.

D'autres fonctions, plus compliquées, peuvent être plus régulières ou satisfont des propriétés additionnelles (fonction analytique, ou fonction prolongeable en une fonction holomorphe, etc.).

Une fonction super-exponentielle croît plus vite qu'une fonction exponentielle double.

Par exemple, si a = 10 :

  • (googol)
  • (googolplex)

Lorsque l'on définit pour tout a, une autre condition requise peut être que est croissante avec a.

Opérations inverses de la tétration : super-logarithmes

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Les fonctions réciproques de la tétration relativement à la base ou relativement au deuxième opérande sont appelées respectivement super-racines ou hyper-racines, et super-logarithme ou hyper-logarithme.

La bijection réciproque de la fonction super-exponentielle est définie, si a > 1, pour tous les nombres réels, y compris les nombres négatifs.

La fonction super-logarithme vérifie :

si x > 0

Dans le paragraphe précédent on a défini :

pour ,
pour ,

Par conséquent (avec a > 1)

si (on interpole par une fonction logarithme entre 1 et a) :
si (on interpole par une fonction affine entre 0 et 1) :
si .

Exemples :

  •  ;
  •  ;
  •  ;
  • .

Tours de puissances infiniment hautes

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Graphe de la fonction .

La suite converge vers 2. La tendance vers 2 peut être perçue en évaluant une petite tour finie :

.

En général, la tour de puissances converge si, et seulement si[3],[4], .

Pour un réel quelconque r avec , si , alors la limite de est r.

La fonction peut être étendue aux nombres complexes z avec la définition :

pour z ≠ 1,

est la branche principale de la fonction W de Lambert et Log est celle du logarithme complexe.

Par exemple[5] :

≈ 0,4383 + 0,3606 i (suites OEISA077589 et OEISA077590 de l'OEIS), de module ≈ 0,567 555 (OEISA212479).

Notes et références

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(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Tetration » (voir la liste des auteurs).
  1. (de) Hans Maurer, « Über die Funktion für ganzzahliges Argument (Abundanzen) », Mittheilungen der Mathematische Gesellschaft in Hamburg, vol. 4,‎ , p. 33-50, d'après Knoebel 1981.
  2. E489 : (la) Leonhard Euler, « De formulis exponentialibus replicatis », Acta Acad. Sci. Imp. Petrop., vol. 1,‎ , p. 38-60 (lire en ligne).
  3. Voir E489 et ses références (I. N. Baker et P. J. Rippon 1984 et 1985, Knoebel 1981, Rippon 1983).
  4. Démonstration : Jean-Baptiste Campesato, « Sur le problème de la tétration infinie, ou infinite power tower », sur citron.9grid.fr, .
  5. (en) Ulrich H. Kurzweg, « Properties of the Lambert Function W(z) », sur University of Florida, Department of Mechanical and Aerospace Engineering.

Articles connexes

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Bibliographie

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Liens externes

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