Théo Gerhards — Wikipédia

Théo Gerhards
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Théodore, Jean Gerhards dit Théo, né le à Saverne (Bas-Rhin) et mort le (à 43 ans) à Halle-sur-Saale (Allemagne), est un résistant français alsacien.

Biographie[modifier | modifier le code]

Théodore Jean Gerhards, ou Théo Gerhards, naît à Saverne dans l'Alsace annexée par l'Allemagne depuis 1871, il est le fils de Gérard Gerhards, militaire allemand devenu sous-chef de gare à Saverne et d'Elisabeth Leyenberger[3],[4]. Il est l'ainé d'une famille de treize enfants. Il reçoit de ses parents une éducation marquée par la religion catholique à Saint-Remy-Signeulx (Belgique) puis à Saint-Hippolyte et enfin à Fribourg[4].

Première Guerre mondiale[modifier | modifier le code]

Au début de 1918, pendant la Première Guerre mondiale, Théo Gerhards passe en conseil de révision le [5]. Il est incorporé le [4]. Il est affecté à Berlin mais il est considéré francophile et est condamné à plusieurs reprises par l'autorité allemande à des jours d'arrêt, notamment pour avoir parlé à des prisonniers français et pour avoir laissé s'échapper deux d'entre eux[6]. Il participe à la révolution allemande à Berlin en combattant contre les troupes impériales du 9 au , puis avec les spartakistes contre les troupes gouvernementales[7],[5]. Il doit fuir et retourne à Saverne.

Entre-deux-guerres[modifier | modifier le code]

L'arrêté ministériel du met en place quatre sortes de cartes d'identité pour les habitants de l'Alsace. Le père de Gerhards reçoit une carte du type « D ». Il est considéré comme « un étranger ressortissant d'un pays ennemi ». La famille Gerhards est expulsée pendant l'été . Elle se réfugie à Dalheim[6].Théo Gerhards reste en France et effectue ses 18 mois de service militaire au 4e régiment d'infanterie à Auxerre et obtient la nationalité française[7],[4]. Il rejoint ses parents en Rhénanie et entre à l'École supérieure du textile à Mönchengladbach de à . L'annulation de l'arrêté d'expulsion permet à la famille de revenir à Saverne.

Théo Gerhards occupe plusieurs emplois de représentant en produits mécaniques. Il s'investit dans la vie paroissiale, dans la Société d'histoire de Saverne et dans le Club vosgien[7]. Le , Gerhards épouse à Saverne[8] Claire Joséphine Kannapel, fille de commerçants, et avec laquelle il aura quatre enfants. Après la naissance du dernier, il travaille définitivement dans l'épicerie-mercerie des parents de son épouse.

Sur le plan politique, il adhère au Parti social français (PSF) du colonel François de La Rocque.

Seconde Guerre mondiale[modifier | modifier le code]

En tant que réserviste, Gerhards est envoyé au début de la Seconde Guerre mondiale dans une usine d'armement à Auxerre. Fin , il quitte la ville et entame un périple au travers des régions dévastées par la guerre pour rentrer par ses propres moyens en Alsace[6].

Actions de résistance[modifier | modifier le code]

Refusant l'annexion de fait de l'Alsace, le 20 août 1940 il adhère au réseau Uranus-Kléber des services de renseignement (SR) de Vichy. Il en devient le responsable du secteur de Saverne[6] où il organise une filière d'évasion. Membre du Club vosgien et connaissant très bien le réseau de sentiers forestiers, il fait passer lui-même une quarantaine de prisonniers de guerre évadés et de réfractaires alsaciens en France. Il travaille avec plusieurs intermédiaires comme Maria Gerhards sa sœur, Eugène Masseran, Auguste Werlé, Pierre Trappler, Eugène Meyer et Marie-Laure Dreysse à Saverne, Germaine Gerber à Saint-Jean-Saverne, Marguerite Fuhrmann et Eugène Denninger à Marmoutier[5]. Il s'implique dans la première tentative d'évasion de Robert Schuman[9],[5].

A partir d', il rajoute le renseignement à son action de résistant. Il s'intéresse au dépôt de munitions de Romanswiller, aux usines Trippel à Molsheim et Junkers à Strasbourg-Meinau[9]. Cette usine répare des moteurs d'avion. Par l'intermédiaire de Marguerite Fuhrmann, il y dispose de l'aide de Marcel Kopp, un dessinateur industriel originaire de Marmoutier. Il lui demande de réaliser un plan du site de production. De sa propre initiative, Marcel Kopp lui transmet un document technique concernant les ateliers d'essais et les chiffres de la production des ateliers de réparation de moteurs de janvier à [5].

Théo Gerhards cherche également à établir une nomenclature des Stalags et Oflags d'Allemagne à partir de renseignements fournis par les évadés, et localise vingt-cinq camps de prisonniers de guerre français en Allemagne[6].

Par l'intermédiaire de Pierre Trappler et Eugène Meyer qui travaillent dans l'administration municipale de Saverne il recueille des informations provenant de document classés secret émanant du Sichersheitsdienst sur des domaines très divers comme la presse, l'éducation, la notion de race, l'éducation, la littérature, le cinéma ou la santé publique[5].

Arrestation et condamnation[modifier | modifier le code]

À la suite d'une dénonciation, Théo Gerhards est arrêté le 6 juillet 1942 à la ferme du Kreutzfeld près de Saverne[10]. Marguerite Furhmann est interpellé le 14 et Marcel Kopp le . Il est incarcéré à la prison de la rue du Fil à Strasbourg où il est interrogé par l'agent Brunner de la Gestapo. Puis il est transféré à la prison de Kehl où il est autorisé à recevoir la visite hebdomadaire de sa famille.

Le 28 novembre 1942 les trois accusés sont transférés à la prison Alt Moabit de Berlin. Théodore Gerhards porte le matricule B4181, il est placé dans la cellule n° 223 du secteur B. Le , il apprend qu'il sera jugé par le 3e sénat du Reichkriegsgericht (cour martiale du Reich). Les 10 et 23 janvier 1943 il est interrogé par un juge d'instruction. L'avocat berlinois Kurt Valentin est désigné pour assurer sa défense. Il est inculpé « d'atteinte à la sécurité du Reich ».

Les trois accusés sont jugés et condamnés à mort en quelques heures le 3 mai 1943. Le 21 mai 1943 le jugement est confirmé par l'amiral Max Bastian. Marguerite Fuhrmann et Marcel Kopp voient leur peine commuée en détention à perpétuité mais le recours en grâce de Théo Gerhards est refusé[5]. Il est transféré le 28 octobre 1943 à la prison de Roter Ochse de Halle-sur-Saale[11]. Il est guillotiné le lendemain vers 17 h par le bourreau Ernst Reindel[7],[8].

Après-guerre[modifier | modifier le code]

Son corps est incinéré, l'urne est déposée le 5 novembre 1943 dans une tombe où elle restera jusqu'au date à laquelle elle est rapatriée avec celles de 80 autres compatriotes au fort Desaix de Mundolsheim qui sert au stockage des corps des victimes de la guerre jusqu'à leur inhumation. Le l'urne est déposé à l'hôtel de ville de Saverne où la foule immense lui rend hommage. La cérémonie officielle des obsèques de Théodore Gerhards à lieu le dimanche en présence des autorités civiles et militaires. Le cortège rejoint le cimetière par l'artère principale de la ville entre deux haies ininterrompues d'habitants[5].

Marguerite Fuhrmann survit à l'univers concentrationnaire nazi. Marcel Kopp est abattu sommairement avec 818 détenus par un détachement SS dans la nuit du 30 au 31 janvier 1945 à Sonnenburg[7].

Les dénonciateurs de Théodore Gerhards sont jugés le par le tribunal de Saverne. Eugène Rossin est condamné à mort et Anne Zehnacker aux travaux forcés à perpétuité.

Reconnaissance[modifier | modifier le code]

Distinctions[modifier | modifier le code]

Il est déclaré « mort pour la France » () et « mort en déportation »[15],[16].

Références[modifier | modifier le code]

  1. « https://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr/fr/ark:/40699/m005eb0059a21f97 »
  2. « https://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr/fr/ark:/40699/m005a294a2c916ef »
  3. Acte de naissance de Théo Gerhards, registre d'état civil de Saverne, acte no 18 de l'année 1900, Archives départementales du Bas-Rhin.
  4. a b c et d Léon Strauss, « GERHARDS Théodore [GERHARDS Théodore Jean, dit Théo] - Maitron », sur fusilles-40-44.maitron.fr (consulté le )
  5. a b c d e f g h et i Eric Le Normand, Association pour des études sur la Résistance intérieure des Alsaciens (AERIA) (ill. Christophe Clavel), La Résistance des Alsaciens, Paris, Fondation de la Résistance, Département AERI, cop. 2016 (ISBN 978-2-915742-32-9 et 2-915742-32-4, OCLC 959964698, lire en ligne)
  6. a b c d et e « Biographies des Noms gravés sur le Monument: Ga-Gl », sur assdn.org.
  7. a b c d et e Gerhards, Auguste, 1945-, Tribunal de guerre du IIIe Reich : des centaines de Français fusillés ou déportés : résistants et héros inconnus, 1940-1945, Paris, Cherche midi / Ministère de la défense, 799 p. (ISBN 978-2-7491-2009-6 et 2-7491-2009-8, OCLC 896816152, lire en ligne)
  8. a et b Date et lieu en mention marginale de l'acte de naissance de Théo Gerhards, archives départementales du Bas-Rhin.
  9. a et b Alphonse Wollbrett (en 1988) et Auguste Gerhards (en 2007), « GERHARDS Théo (Théodore) », sur Fédération des Sociétés d'Histoire et d'Archéologie d'Alsace, (consulté le )
  10. « Théo Gerhards (1900-1943) - Auteur - Ressources de la Bibliothèque nationale de France », sur data.bnf.fr (consulté le ).
  11. Kintz, Jean-Pierre, « Gerhards (Auguste), Morts pour avoir dit non, 14 Alsaciens et Lorra... », sur revues.org, Revue d’Alsace, Fédération des Sociétés d’Histoire et d’Archéologie d’Alsace, (ISSN 0181-0448, consulté le ), p. 586–587.
  12. « Le courrier du Mémorial, no 11 », sur memorial-alsace-moselle.com, avril 2008..
  13. « Noms gravés sur le Monument », sur aassdn.org.
  14. Bertrand Merle, 50 mots pour comprendre la résistance alsacienne : 1939-1945, (ISBN 978-2-7468-4334-9 et 2-7468-4334-X, OCLC 1356270846, lire en ligne)
  15. Mention marginale sur la transcription de son acte de décès en date du 28 novembre 1947, état civil de Saverne.
  16. « Base des morts en déportation (1939-1945) - Mémoire des hommes », sur www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr (consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Auguste Gerhards, Théo Gerhards 1900-1943 : Un Alsacien en résistance, Strasbourg, Librairie Oberlin, , 222 p. (ISBN 2-85369-242-6)
  • Jean-Pierre Kintz, « Gerhards Théodore (Théo) », in Nouveau dictionnaire de biographie alsacienne, vol. 45, p. 4617
  • Léon Strauss, « GERHARDS Théodore [GERHARDS Théodore Jean, dit Théo] », Le Maitron,‎ 9 octobre 2014, dernière modification le 13 avril 2017 (lire en ligne)
  • Arnaud Gerhards et Eric Le Normand (avec l'aide d'Auguste Gerhards), Association pour des études sur la Résistance intérieure des Alsaciens (AERIA) (ill. Christophe Clavel), « Théodore Gerhards », dans Eric Le Normand, La résistance des Alsaciens, Fondation de France, département AERI, (ISBN 978-2-915742-32-9) DVD pédagogique
  • Auguste Gerhards, Tribunal de guerre du IIIe Reich : des centaines de Français fusillés ou déportés : Résistants et héros inconnus 1939-1945, Le Cherche midi, (ISBN 978-2-7491-2067-6, lire en ligne), « Gerhards Théodore »

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]