Tite-Live — Wikipédia

Tite-Live
Buste de Tite-Live par Andrea Briosco.
Biographie
Naissance
ou
Padoue
Décès
Nom de naissance
Titus Livius
Nom court
Liv.Voir et modifier les données sur Wikidata
Époque
Activité
Gens
Autres informations
Genre artistique
Œuvres principales
Ab Urbe condita libri (Histoire de Rome depuis sa fondation)

Tite-Live (en latin : Titus Livius), dit « Le Padouan », né en ou en et mort en l'an 17 dans sa ville natale de Padoue (Patavium en latin), est un historien de la Rome antique, auteur de la monumentale œuvre de l'Histoire romaine (Ab Urbe condita libri : AUC).

Biographie[modifier | modifier le code]

Le nom complet (tria nomina) de Tite-Live n'est pas connu. Son surnom (cognomen) n'a pas été conservé : seuls Titus, son prénom (praenomen), et Livius, son nom (nomen) ou gentilice (gentile nomen) ont été transmis. Quant à Patavinus (c'est-à-dire le Patavin ou le Padouan), il s'agit d'un sobriquet (agnomen). Sa situation familiale est inconnue bien qu'une de ses filles épousât Lucius Magius, orateur médiocre de l'avis de Sénèque l'Ancien[1].

Tite-Live est né au Ier siècle av. J.-C. à Patavium (Padoue), cité des Vénètes (actuelle Vénétie)[2]. Le lieu de cette naissance est attesté par son surnom Patavinus [« le Padouan »][3]. Son année de naissance est incertaine : il serait né en (695 AUC) d'après la Chronique de Jérôme de Stridon[4], ou en (690 AUC) si, comme le dit cet auteur[4], Tite-Live est né la même année que l'orateur Marcus Valerius Messalla Corvinus, dont la carrière politique connue permet de préciser la date de sa naissance. Cette incertitude peut s'expliquer par la confusion de lecture entre les consuls définissant l'année 64 av. J.-C., Caesar et Figulus, et ceux de , César et Bibulus[5]. La date de naissance de a la préférence des historiens, car elle justifie mieux la fidélité de Tite-Live envers Pompée, mort en , donc lorsque Tite-Live avait 16 ans[6].

Issu d'une famille riche, Tite-Live reçoit son éducation en province et ce sont ses études de rhétorique qui l’amènent à s’installer à Rome, peut-être plus tard qu'à l'âge habituel de seize ou dix-sept ans, en raison des troubles politiques[7]. Cette jeunesse prolongée à Padoue serait par ailleurs une des explications de son surnom. Par ailleurs, il n'a jamais exercé de charge publique puisqu'il consacre toute sa vie à la littérature et à l'histoire.

Selon certains historiens, il était en contact avec Auguste[8], qui respectait ses sympathies pour la République et qui, d'après les Annales de Tacite[9], le surnommait Pompeianus [« le Pompéien »], terme par lequel sont désignés les partisans et les soldats de Pompée pendant la Guerre civile de César. Il aide d’ailleurs l'Empereur dans son entreprise de restauration de la grandeur de Rome. D'après la Vie des douze Césars de Suétone[10], il encouragea Claude, dans ses jeunes années, à écrire de l'histoire.

L'historien est très mal connu, mais à l'époque médiévale, la découverte d'inscriptions furent vues à tort comme des témoignages. Deux inscriptions funéraires retrouvées à Padoue mentionnent un Titius Livius. La première (CIL, V, 2865) fut vue comme son épitaphe[11] : « Tite-Live, fils de Gaius (Caius) ; sa première épouse : Cassia, fille de Sextus ; leurs deux fils : l'aîné, dit l'Ancien (Titus Livius Priscus), et le cadet, dit le Long (Titus Livius Longus) »[12]. La seconde inscription[13] marque le lieu de sépulture d'un affranchi de Livia Quarta, fille de Titus Livius. Toutefois cette identification ne repose que sur l'homonymie. L'inscription fut découverte au XIVe siècle et la plupart des humanistes de l'époque, dont Boccace et Pétrarque ne remettaient pas l'identification en cause. L'inscription fut placée dans la basilique Sainte-Justine de Padoue, dont un tombeau découvert au XVe siècle au sein du bâtiment fut identifié comme celui de Tite-Live, ce qui provoqua un culte de reliques. En 1451, le squelette qu'il contenait fut présenté à l'ambassadeur de Naples à Venise, et un fragment d'os d'avant-bras lui fut offert à l'intention d'Alphonse d'Aragon et de Naples[14]. Pourtant, le cognomen Halys et le statut d'affranchi indiquent que ce n'est pas l'historien[15].

Œuvres[modifier | modifier le code]

Tite Live Ab Urbe Condita (XVe siècle).

Sénèque écrit que Tite-Live a rédigé des traités de philosophie ainsi que des dialogues tenant autant de l'histoire que de la philosophie, et le classe en troisième place comme auteur, après Cicéron et son contemporain Asinius Pollion[16],[17]. De même, Sénèque l'Ancien et Quintilien rapportent dans quelques fragments que Tite-Live avait écrit des œuvres rhétoriques et une correspondance[18]. Ces écrits ont disparu[19].

L'œuvre principale de Tite-Live, intitulée Ab Urbe condita libri (en français : Histoire de la ville [c.à.d de Rome] depuis sa fondation), était à l’origine un recueil de 142 livres[20] comme le prouve le nombre de résumés (Periochae)[21]. Cependant, seuls 35 livres ont survécu. Les livres relatant l'histoire de Rome pendant les années 292 av. J.-C. à , et ceux couvrant la période allant de 166 av. J.-C. à , ont disparu. Ils ne sont connus que par des fragments et les abrégés (periochae), sortes de tables des matières plus ou moins détaillées, à distinguer d'éventuels résumés ou epitomae (qui ont dû exister mais dont les periochae ne semblent pas issues)[22]. L'Histoire de Rome depuis sa fondation est écrite à partir de 31 av. J.-C. et est paru progressivement, en fascicules peu avant ou en Auguste se servit de ces livres pour renforcer son pouvoir.

Tite-Live connut de son vivant un succès qui dépassait les limites de l'Italie, comme l'atteste l'anecdote de Pline le Jeune sur un habitant de Gadès (Cadix) qui entreprit de venir à Rome pour le voir[23].

Néanmoins, Tite-Live eut au moins un détracteur, Asinius Pollion qui, seul et par deux fois, lui reprocha sa « patavinité » (patavinitas). L'interprétation de ce terme a suscité une abondante littérature : on a proposé de le comprendre comme désignant la manière de parler et d'écrire le latin propre aux habitants de Padoue[24], une sorte de jargon provincial dont Tite-Live n'aurait pu se défaire. Jacques Heurgon se rallie à l'avis de Pierre Flobert[25], la patavinitas de Tite-Live serait un mot caricatural inventé par un concurrent jaloux, forgé sur le modèle de l'urbanitas, l'expression cultivée romaine[26].

D'après Jérôme de Stridon, Tite-Live meurt dans sa ville natale en apr. J.-C. (770 AUC), trois ans après Auguste[27].

Postérité[modifier | modifier le code]

Références littéraires à Tite-Live[modifier | modifier le code]

Dante cite de nombreux personnages historiques dont Tite-Live au chant IV de l'Enfer, première partie de la Divine Comédie :

« […] Puis ayant levé un peu plus les yeux, je vis le maître de ceux qui savent, assis au milieu de la famille philosophique. Tous l’admiraient, tous lui rendaient honneur. Là je vis Socrate et Platon, qui se tiennent plus près de lui que les autres ; Démocrite, qui soumet l’univers au hasard ; Diogène, Anaxagore et Thalès ; Empédocle, Héraclite et Zénon ; et je vis celui qui si bien décrivit les vertus des plantes, je veux dire Dioscoride ; je vis Orphée, Tullius (Cicéron) et Livius (Tite-Live), et Sénèque le philosophe moral »

— Dante Alighieri, Commedia, Inf. IV, 141 (texte original) - Trad. Lamennais

Honneurs[modifier | modifier le code]

L'astéroïde (13772) Live porte son nom.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Ab Urbe condita, 1714.

Traductions commentées[modifier | modifier le code]

  • Tite-Live (trad. Gaston Baillet, préf. Jean Bayet, postface Raymond Bloch), Histoire romaine, Livre I, (1re éd. 1940), 269 p. (ISBN 978-2-251-01281-0)
  • Tite-Live (trad. du latin par Annette Flobert, préf. Jacques Heurgon), Histoire romaine, livres I à V : De la fondation de Rome à l'invasion gauloise, Paris, Flammarion, , 644 p. (ISBN 2-08-070840-6)

Études[modifier | modifier le code]

Dictionnaires[modifier | modifier le code]

  • Jean Leclant (dir.), Marielle de Franchis, Dictionnaire de l'Antiquité, Paris, PUF, 2005.
  • Margaret C. Howatson (dir.), Dictionnaire de l'Antiquité: Mythologie, Littérature, Civilisation, Paris, Robert Laffont, 1993.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Sénèque l'Ancien, Controverses, X, 2 ; Annette Flobert, p. 620
  2. (la + fr) Entrée « Pǎtǎvǐum » [php], dans Félix Gaffiot, Dictionnaire illustré latin-français, Paris, Hachette, (réimpr. 1998), 1719 p., 25 cm (ISBN 2-01-000535-X, OCLC 319740495, BNF 37005960), p. 1124 (consulté le 23 août 2015).
  3. (la + fr) Entrée « Pǎtǎvīnus » [php], dans Félix Gaffiot, Dictionnaire illustré latin-français, Paris, Hachette, (réimpr. 1998), 1719 p., 25 cm (ISBN 2-01-000535-X, OCLC 319740495, BNF 37005960), p. 1124 (consulté le 23 août 2015).
  4. a et b Jérôme, Chronique, année 1958 (AUC) : « Messala Corvinus nascitur et T. Livius Patavinus scriptor historicus ».
  5. Jean Bayet, pp. VII-VIII
  6. Annette Flobert, p. 617
  7. Annette Flobert, p. 618
  8. Tite-Live, Histoire romaine, IV, 20, 7 : « Pour moi, j'ai entendu de la bouche même d'Auguste César, le fondateur ou le restaurateur de tous nos temples, que quand il entra dans celui de Jupiter Férétrien, qu'il releva, tombant de vétusté, il lut lui-même cette inscription sur la cuirasse de lin ; et j'aurais cru commettre une sorte de sacrilège en dérobant à Cossus le témoignage de César qui rétablit ce temple ».
  9. Tacite, Annales, IV, 34, 6 : « Tite-Live, signalé entre les auteurs par son éloquence et sa véracité, a donné tant de louanges à Pompée, qu'Auguste l'appelait le Pompéien ; et leur amitié n'en fut point affaiblie. Scipion, Afranius, Cassius lui-même et Brutus, n'ont jamais reçu de Tite-Live les noms de brigands et de parricides qu'on leur prodigue aujourd'hui. Souvent même il en parle comme de personnages illustres ».
  10. Suétone, Vie des douze Césars : Vie de Claude, 41, 1 : « Historiam in adulescentia hortante T. Livio, Sulpicio vero Flauo etiam adiuvante, scribere adgressus est ».
  11. Jean Bayet, p. VIII
  12. CIL V, 2975 : « T(itus) Livius C(ai) f(ilius) sibi et / suis T(ito) Livio T(iti) f(ilio) Prisco f(ilio) / T(ito) Livio T(iti) f(ilio) Longo f(ilio) / Cassiae Sex(ti) f(iliae) Primae / uxori ».
  13. CIL V, 2865 : « V(ivus) f(ecit) / T(itus) Livius / Liviae T(iti) f(iliae) / Quartae l(ibertus) / Halys / Concordialis / Patavi / sibi et suis / omnibus ».
  14. Lardet 1990, p. 27
  15. Berthold Louis Ullman, The Post Mortem adventures of Livy, 1945, republié dans Studies in the Italian Renaissance, 1973
  16. Sénèque, Lettres à Lucillius, 100, 9 : « Scripsit enim (Livius) et dialogos, quos magis philosophiae adnumerare possis quam historiae, et professo philosophiam continentes libros ».
  17. Annette Flobert, p. 619
  18. Tite-Live, Histoire romaine, t. XXXIII : Livre XLV. Fragments, Les Belles Lettres, coll. « Collection des universités de France »
    Les références étant pour Quintilien l'Institution oratoire (VIII, 2, 18 & X, 1, 39) et pour Sénèque Père les Controverses (IX, 2, 26 & IX, 24, 14)
  19. Jean Bayet, p. X
  20. P. Marchetti, Patrimoine littéraire européen - tome 2, De Boeck, , p.542
  21. (en) « Livy, The periochae », sur livius.org
  22. Jacques Heurgon, pp. 8, 10
  23. Pline le Jeune, Lettres, II, 3, 8 : « Nunquamne legisti Gaditanum quemdam, Titi Livii nomine gloriaque commotum, ad visendum eum ab ultimo terrarum orbe venisse, statimque ut viderat, abiisse ? », « N'avez-vous jamais lu qu'un citoyen de Gadès, frappé de la réputation et de la gloire de Tite-Live, accourut des extrémités du monde pour le voir, et s'en retourna après l'avoir vu ? »
  24. Informations lexicographiques et étymologiques de « patavinité » dans le Trésor de la langue française informatisé, sur le site du Centre national de ressources textuelles et lexicales (consulté le 23 août 2015).
  25. Pierre Flobert, Revue des études latines, 1981, pp. 193-206.
  26. Jacques Heurgon, p. 23
  27. Jérôme, Chronique, année 2033 (AUC) : « Livius historiographicus Patavi moritur ».

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]