Walther Rathenau — Wikipédia

Walther Rathenau
Illustration.
Fonctions
Ministre allemand des Affaires étrangères

(4 mois et 23 jours)
Chancelier Joseph Wirth
Gouvernement Wirth II
Prédécesseur Joseph Wirth
Successeur Joseph Wirth
Ministre de la Reconstruction

(4 mois et 25 jours)
Chancelier Joseph Wirth
Gouvernement Wirth I
Prédécesseur Otto Geßler
Successeur Heinrich Albert
Biographie
Date de naissance
Lieu de naissance Berlin (Royaume de Prusse)
Date de décès (à 54 ans)
Lieu de décès Berlin (Allemagne)
Parti politique Parti démocrate allemand
Diplômé de Université de Strasbourg
Université Humboldt de Berlin
Université technique de Munich
Profession Industriel
Homme politique
Religion Judaïsme

Walther Rathenau est un industriel, écrivain et homme politique allemand, né le à Berlin où il est mort assassiné le .

Issu d'une famille juive, il se veut l'exemple d'une assimilation culturelle et nationale réussie, affirmant que « seul du sang allemand coule en moi ». Il est cependant la cible privilégiée des discours antisémites et est assassiné par l'organisation Consul.

Éléments biographiques[modifier | modifier le code]

Origines et études[modifier | modifier le code]

Personnalité importante de l’histoire allemande du début du XXe siècle, Walter Rathenau est le fils d’Emil Rathenau, fondateur d'AEG et magnat de l'électricité, et de Mathilde Nachmann[1]. Il est aussi le cousin des féministes Josephine Levy-Rathenau (de) et Jenny Apolant. Walter Rathenau fait ses études à la faculté des sciences de Berlin et de Strasbourg ainsi qu'à l'université technique de Munich. À 26 ans, il est nommé à la tête d’une société d'aluminium. En 1899, son père lui offre un poste important au sein de sa société d’électricité, dont il prendra la tête en 1914.

Carrière politique[modifier | modifier le code]

Malgré son orientation politique libérale, il s'engage en politique et soutient les opérations d'agression pendant la Première Guerre mondiale. Il dirige notamment le département des matières premières. Walther Rathenau est étroitement associé à la fondation du cercle politique de la Société Allemande de 1914. Il lance un appel à la « guerre totale » au printemps 1918 et, après l'armistice du , choisit de soutenir les institutions de Weimar. Devenu ministre de la Reconstruction en 1921 et ministre des Affaires étrangères en 1922, sous la république de Weimar, Walter Rathenau négocie avec les représentants soviétiques Christian Rakovsky et Adolf Joffe le traité de Rapallo, qui efface la dette de guerre et qui permet à la république de Weimar de contourner les stipulations des traités de paix (entraînement de troupes allemandes sur le territoire soviétique).

Stefan Zweig écrit de lui[2] :

« Ses paroles coulaient comme s'il avait lu un texte écrit sur une feuille invisible et il donnait cependant à chacune de ses phrases une forme si accomplie et si claire que sa conversation, sténographiée, aurait constitué un exposé parfaitement propre à être imprimé tel quel. […] Il y avait dans sa pensée je ne sais quoi de transparent comme le verre et par là même d'insubstantiel. J'ai rarement éprouvé plus fortement que chez lui la tragédie de l'homme juif qui, avec toutes les apparences de la supériorité, est plein de trouble et d'incertitude. […] Toute son existence n'était qu'un seul conflit de contradictions toujours nouvelles. Il avait hérité de son père toute la puissance imaginable, et cependant il ne voulait pas être son héritier, il était commerçant et voulait se sentir artiste, il possédait des millions et jouait avec des idées socialistes, il était très juif d'esprit et lorgnait du côté du Christ. »

Assassinat[modifier | modifier le code]

Hommage du Reichstag au ministre Rathenau assassiné ().

En dépit de ses succès, il devient impopulaire en tant que juif, partisan de la république de Weimar et signataire d'un traité avec un État communiste. Il est alors choisi pour cible par l'extrême gauche mais aussi par les groupes nationalistes d'extrême droite. Son style flamboyant et son intelligence[3], mise au service du gouvernement allemand, s'opposent au chaos dans lequel les forces révolutionnaires issues des corps francs (ou « Freikorps ») espèrent construire une nouvelle société sur les ruines de la Première Guerre mondiale. Il est alors considéré par ses ennemis comme un représentant de l'« Ancien régime ». Selon Hellmut von Gerlach, un journaliste pacifiste ami de Walther Rathenau, ce dernier est honni parce qu'« il est juif et […] il est la réfutation vivante de la théorie antisémite qui veut que le judaïsme soit nocif pour l'Allemagne »[4]. L'assassinat de Rathenau « doit inciter la gauche à frapper », et pour le procureur du Reich, une fois « le soulèvement de la classe ouvrière écrasé, [permettre] la mise en place d'un gouvernement d'extrême droite »[5]. L'organisation Consul, groupe terroriste dans lequel évolue Ernst von Salomon, décide de l'assassiner pour provoquer la chute du gouvernement. Ernst von Salomon conteste le fait que l’antisémitisme ait joué le moindre rôle dans cet assassinat[6]. Les membres de l’organisation passent à l'action le  : un cabriolet, conduit par Ernst Werner Techow[7], avec deux passagers à bord vêtus de manteaux en cuir et de capuches (Erwin Kern et Hermann Fischer, tous deux anciens officiers de marine) s'approche de la voiture du ministre. Rathenau est abattu de plusieurs coups de pistolet automatique. Les assassins prennent alors la fuite en lançant une grenade. Une vaste opération de police est déclenchée et la plupart des groupes nationalistes sont décapités.

Un million de personnes assistent à ses funérailles. Un journal berlinois note : « Le directeur d'une des plus grandes entreprises du monde avait été tué et des ouvriers communistes venaient pleurer sur sa tombe et maudire ses meurtriers »[8]. L'écrivain Emil Ludwig renonce au catholicisme avant de quitter l'Allemagne.

Le , l'organisation paramilitaire Stahlhelm et le chef de la brigade Ehrhardt, en collaboration avec des SA et SS, font un geste hautement symbolique en honorant publiquement les assassins de Rathenau au château de Saaleck[9].

Publications[modifier | modifier le code]

Partisan de la social-démocratie, Walter Rathenau a publié de nombreux ouvrages :

  • Reflexionen, 1908
  • Zur Kritik der Zeit, 1912
  • Zur Mechanik des Geistes, 1913
  • Vom Aktienwesen. Eine geschäftliche Betrachtung, Berlin 1917
  • Von kommenden Dingen, 1917
  • An Deutschlands Jugend, 1918 (überarbeitete Ausgabe: Maximilian Hörberg (Hrsg.), München 2009 (ISBN 978-3-00-023407-1)).
  • Die neue Gesellschaft, 1919
  • Der neue Staat, 1919
  • Der Kaiser, 1919
  • Kritik der dreifachen Revolution, 1919
  • Was wird werden? 1920 (Digitalisat)
  • Gesammelte Reden, 1924 (Digitalisat)
  • Briefe, 2 Bände, 1926
  • Neue Briefe, 1927
  • Briefe an eine Liebende, Dresden, Reißner, 1931.
  • Politische Briefe, 1929 (Digitalisat)

Autres écrits :

  • Gesammelte Schriften in 6 Bänden
  • Gesamtausgabe seiner Werke ab 1977, hrsg. durch D. Hellige und E. Schulin
  • Schriften und Reden, Auswahl und Nachwort von Hans Werner Richter, S. Fischer Verlag, 1964, Frankfurt Main, (ISBN 3-10-062904-3) (Politische Schriften, Reden, Philosophie, Aphorismen, Talmudische Geschichten)

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Walther Rathenau 1867-1922 - LEMO - Lebendiges Museum Online (Deutsches Historisches Museum, Berlin) https://www.dhm.de/lemo/Biografie/walther-rathenau
  2. Le Monde d'hier, « Par delà les frontières de l'Europe », Stefan Zweig, Le Livre de Poche, p. 217-218 ; traduction nouvelle de Serge Niémetz.
  3. Cf. Sebastian Haffner, Histoire d'un Allemand, Acte Sud, 2002-2003, p. 74-83.
  4. cité par Wolfram Wette, Les crimes de la Wehrmacht (Die Wehrmacht Feinbilder Vernichtungskrieg Legenden). S. Fischer Verlag GmbH, Frankfurt am Main, 2002, (ISBN 3-596-15645-9). Traduction française Éditions Perrin, 2009, (ISBN 978-2-262-02757-5). p. 67.
  5. Wolfram Wette, op. cit., p. 69.
  6. Ernst von Salomon. Le Questionnaire, A, question 24. « De sa voix trainante, Ernst Junger me demanda : « Pourquoi n’avez-vous pas eu le courage de dire que Rathenau fut tué parce qu’il était juif ? » ; j’ai reçu des lettres même de Palestine où l’on me posait la même question. Chaque fois, j’ai répondu : « Parce que ce n’est pas vrai. ».
  7. (de) Martin Sabrow, Die Macht der Mythen : Walther Rathenau im öffentlichen Gedächtnis : sechs Essays, Verlag Das Arsenal, , 140 p. (ISBN 978-3-931109-11-0, lire en ligne)
  8. Roland Charpiot, Histoire des Juifs d'Allemagne du Moyen Âge à nos jours, Vuibert, 2009, p. 133.
  9. Adolf Runge, Wanderjahr eines Schriftsetzers, 1934, réédition BoD – Books on Demand 2010, 284 pages, page 92.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Sources primaires[modifier | modifier le code]

  • (en) Harry Kessler, Berlin in Lights : The Diaries of Count Harry Kessler (1918–1937), New York, Grove Press, 1999.
  • (en) Hartmut P. von Strandmann (éd.), Hilary von Strandmann (traduction), Walter Rathenau : Industrialist, Banker, Intellectual, and Politician ; Notes and Diaries 1907-1922, Clarendon Press, 528 p., 1985, (ISBN 978-0-19-822506-5).

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]