Heterodera carotae — Wikipédia

Nématode à kystes de la carotte

Heterodera carotae, le Nématode à kystes de la carotte, est une espèce de vers ronds (Nématodes) de la famille des Heteroderidae et du genre Heterodera. C'est un parasite spécifique de la carotte.

Histoire[modifier | modifier le code]

L'espèce est découverte sur une carotte par Marjorie J. Triffitt en 1931 en Grande-Bretagne. Elle est officiellement décrite par Fred Jones (d) en 1950. Ce nématode est par la suite progressivement décelé dans de nombreux pays d'Europe : Pays-Bas en 1955, Allemagne en 1960, Italie en 1969, Pologne en 1970, URSS en 1971, Suisse en 1980. Il est signalé en Inde en 1964 et aux États-Unis en 1988. En France, il est d‘abord trouvé en 1955 dans l’Ouest du pays, puis décelé dans de nombreuses autres régions. La majorité des foyers se situent dans l’Ouest, en particulier dans la Manche, où sont produites en 1988 près de 40 % des carottes de plein champ[2].

Biologie[modifier | modifier le code]

Les larves du nématode pénètrent dans la plante par les plaies, ou en perçant un orifice avec leur stylet (en). Les mâles ressortent rapidement, tandis que les femelles passent le reste de leur vie immobiles dans le parenchyme. Les 200 à 600 œufs restent à l’intérieur de leur corps, qui gonfle pour se transformer en kyste, d’abord blanc, puis brun. Les kystes peuvent survivre jusqu’à huit ans dans le sol. Si par la suite des carottes sont cultivées, les larves sortent des kystes et infectent les racines[3].

Le ver parasiterait quasiment exclusivement l'espèce Daucus carota. Une étude de 1988[2] montre qu'il peut également réaliser l'intégralité de son cycle sur l'espèce Torilis leptophylla.

Morphologie[modifier | modifier le code]

La couleur du Nématode à kystes de la carotte varie du brun clair au brun foncé ; il est de la forme d'un citron allongé ou est ovale. Le cône vulvaire est ambifenestré avec une ouverture en forme de haricot[4]. Les œufs sont au nombre de 50–322 par kyste. Les femelles sont blanches, en forme de citron, portant un gros sac d'œufs presque de leur propre taille ; la fente vulvaire se situe à l'extrémité du cône. Le disque labial est fusionné. Les mâles sont vermiformes, avec une courte queue arrondie, la cuticule annulée, le stylet bien développé, le disque labial légèrement ovale. Les spicules sont à deux dents[5].

Les juvéniles de deuxième stade sont vermiformes, la région antérieure fortement sclérotisée, le stylet fort bien développé. Leur queue est de forme conique aiguë avec l'extrémité arrondie[5].

Symptômes[modifier | modifier le code]

Les carottes infestées forment une zone circulaire dans les champs. Elles sont flétries, le feuillage jaunissant et dépérissant, et développent de façon anormale de nombreuses radicelles qui donnent un aspect chevelu abondant, avec des kystes en forme de citron de couleur blanchâtre, de la taille d'une tête d'épingle[3].

Heterodera carotae provoque en conditions de culture des dégâts quantitatifs et qualitatifs sur les carottes. Le nombre de carottes par hectare n’est pas affecté, mais la proportion de carottes non commercialisables croît[6].

Moyens de lutte[modifier | modifier le code]

La lutte chimique est généralement très efficace contre les nématodes, mais est coûteuse, nécessite des machines spéciales et un personnel bien formé pour son application, et peut entraîner une pollution de l'environnement. De plus, plusieurs nématicides sont interdits dans certains pays. La chaleur, notamment l'énergie solaire qui est économique pendant la saison chaude, peut être utilisée mais est aussi coûteuse. Le paillage avec un film plastique transparent permet un contrôle satisfaisant des nématodes[7].

Les cultures de plantes non-hôtes réduisent assez fortement les populations élevées, mais très peu et d’une façon très difficile à mettre en évidence pour les très faibles populations. Les rotations des cultures sont pratiquement inefficaces, sauf si elles sont très longues, de sept à dix ans, et dans l’hypothèse où aucun facteur biotique, tel que prédation ou parasitisme, n’interviendrait[8].

La fumigation des sols est un moyen disponible dans des régions spécialisées dans la culture de la carotte et pour des agriculteurs qui ne veulent pas respecter de trop longues rotations[9].

Le traitement au diméthyldisulfure sur les tiges peut être efficace[10].

Le déplacement de terre par les machines agricoles et le transport des plants de poireaux est probablement responsable de la très forte migration d’H. carotae entre les champs et les zones de production[11].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Rees, T. (compiler). The Interim Register of Marine and Nonmarine Genera. Available from https://www.irmng.org at VLIZ, consulté le 24 mars 2021
  2. a et b Didier Mugniéry et Michel Bossi, « Heterodera carotae Jones, 1950. 1. Gamme d’hôtes, vitesse de développement, cycle », Revue Nématol, vol. 11,‎ , p. 307-313 (lire en ligne [PDF], consulté le )
  3. a et b « Heterodera carotae - Nématode à kystes de la carotte », sur ephytia.inra.fr (consulté le )
  4. (en) Mehrdad Madani, Juan E. Palomares-Rius, Nicola Vovlas et Pablo Castillo, « Integrative diagnosis of carrot cyst nematode (Heterodera carotae) using morphology and several molecular markers for an accurate identification », European Journal of Plant Pathology, vol. 150, no 4,‎ , p. 1023–1039 (ISSN 0929-1873 et 1573-8469, DOI 10.1007/s10658-017-1342-2, lire en ligne, consulté le )
  5. a et b (en) Ilia Mariana Escobar-Avila, Edgar Óliver López-Villegas, Sergei A. Subbotin et Alejandro Tovar-Soto, « First Report of Carrot Cyst Nematode Heterodera carotae in Mexico: Morphological, Molecular Characterization, and Host Range Study », Journal of Nematology, vol. 50, no 2,‎ , p. 229–242 (ISSN 0022-300X, PMID 30451440, PMCID 6909361, DOI 10.21307/jofnem-2018-021, lire en ligne, consulté le )
  6. Didier Mugniéry et Michel Bossi, « Heterodera carotae Jones, 1950. 3. Nuisibilité en conditions de culture de l’ouest de la France », Revue Nématol, vol. 12,‎ , p. 177-180 (lire en ligne [PDF], consulté le )
  7. (en) N. Greco, A. Brandonisio et F. Elia, « Control of Ditylenchus dipsaci, Heterodera carotae and Meloidogyne javanica by solarization », Nematologia Mediterranea,‎ (lire en ligne, consulté le )
  8. Didier Mugniéry et Michel Bossi, « Heterodera carotae Jones, 1950. 2. Dynamique des populations dans l’ouest de la France », Revue Nématol, vol. 11,‎ , p. 315-320 (lire en ligne [PDF], consulté le )
  9. Michel Bossi, Alain Cavelier et Didier Mugniéry, « Heterodera carotae Jones, 1950. 4. Intérêts et limites de la lutte chimique », Revue Nématol, vol. 12,‎ , p. 343-350 (lire en ligne [PDF], consulté le )
  10. (en) G. Curto, C. Dongiovanni, N. Sasanelli et A. Santori, « Efficacy of Dimethyl Disulfide (DMDS) in the Control of the Root-Knot Nematode Meloidogyne incognita and the Cyst Nematode Heterodera carotae on Carrot in Field Condition in Italy », Acta Horticulturae, no 1044,‎ , p. 405–410 (ISSN 0567-7572 et 2406-6168, DOI 10.17660/ActaHortic.2014.1044.55, lire en ligne [PDF], consulté le )
  11. (en) M. Esquibet, C. Gautier, C. Piriou et E. Grenier, « Evidence of strong gene flow among French populations of the carrot cyst nematode Heterodera carotae », Plant Pathology, vol. 69, no 1,‎ , p. 168–176 (ISSN 1365-3059, DOI 10.1111/ppa.13102, lire en ligne, consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Vincent Aubert, Contribution à l'étude de la biologie d'un parasite de la carotte : Le nematode à kyste, heterodera carotae (Jones), Université de Neuchâtel, (lire en ligne [PDF])

Liens externes[modifier | modifier le code]