René Cruse — Wikipédia

René Cruse
René Cruse en 2012.
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 95 ans)
Genève ou SuisseVoir et modifier les données sur Wikidata
Nom de naissance
René Jean Philippe CruseVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Formation
Activités
Famille
Autres informations
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Membre de
Arme
Conflit
Mouvement
Distinction

René Cruse, né à Bordeaux le et mort à Genève le [1], est un pasteur devenu athée, un militant pacifiste, un écologiste actif dans le mouvement antinucléaire et un écrivain français.

Biographie[modifier | modifier le code]

René Cruse est né à Bordeaux dans une famille de négociants en vin.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, il s'évade de France en 1943, rejoint les Forces françaises libres à Casablanca, participe au débarquement de Provence en et à la Libération. Il est décoré de la croix de guerre 1939-1945.

Il devient militant anti-militariste pendant la guerre d'Algérie, et, avec cinq collègues, dont Jean Lasserre, il renvoie son livret militaire en 1957 surtout pour appuyer le projet de statut légal des objecteurs de conscience[2].

Maître Jean-Jacques de Felice, Théodore Monod, le pasteur René Cruse et Yvon Montigné, le , en tête de la marche du Groupe d'action et de résistance à la militarisation, de Lyon au Mont-Verdun, contre la force de frappe nucléaire.

Il s'engage contre l'armement atomique et la politique nucléaire française[3]. Il participe à Lyon à des manifestations du Groupe d'action et de résistance à la militarisation (Garm) contre le poste de commandement de la force de frappe nucléaire du Mont Verdun[4]. En tête de la Marche de la paix[5] du , il prend la parole et défile, avec des milliers de personnes, de Lyon au Mont Verdun.

René Cruse s'engage en faveur des objecteurs de conscience, il est inculpé en 1972 pour avoir fait connaître l'existence du statut d'objecteur en France[6],[7] alors que la loi l'interdit[8]. Il est inculpé pour incitation à l'insoumission et à la désertion, ce que dénonce Yves Le Foll à l'Assemblée nationale[9]. Le procès a lieu en 1973 à Corbeil-Essonnes et provoque des manifestations de soutien[10],[11],[12]. René Cruse s'affirme antimilitariste « dans une perspective de lutte des classes[13]. »

René Cruse a été membre du Comité de parrainage du Centre de documentation et de recherche sur la paix et les conflits rebaptisé Observatoire des armements.

Avec le temps, René Cruse s'inscrit également comme critique radical de l'institution religieuse. Il écrit en 1992 : « L'Église-institution a-t-elle jamais eu un autre langage qu'obscurantiste ? »[14]. Il défend ce qu'il nomme une « spiritualité athée » ou un « athéisme pacifique »[15].

« Bien sûr, il ne faut pas être naïfs, on a de la peine à imaginer un monde sans religion, pas plus qu’un monde sans guerre et sans prostitution. Tout au plus pouvons-nous tenter, grâce à un athéisme pacifique, de tempérer ces « errances » antiques que sont précisément les religions, les guerres et le sexisme, tous trois toujours portés par des discours amphigouriques. »

— René Cruse, Nitroglycérine religieuse[16].

René Cruse vit à Genève à partir de 1977, aux côtés de Marielle Budry (féministe engagée et psychologue)[17]. Il s'engage dans le mouvement alternatif local et devient président des Jardins de Cocagne, participe au Groupe pour une Suisse sans armée, est cofondateur du « Comité Paix Genève », premier président de l'Association des lecteurs du Courrier, devient accompagnant au Groupe sida Genève. Il fait la connaissance de Jean Ziegler, puis de Daniel de Roulet.

Vie professionnelle[modifier | modifier le code]

René Cruse est licencié en théologie, pasteur de l'Église réformée de France pendant 25 ans successivement à Nancy, à Cannes-et-Clairan (Gard), à Casablanca, puis à Nevers.

Il est secrétaire francophone du Mouvement international de la réconciliation de 1968 à 1974, puis responsable des relations publiques au Centre de création industrielle (au Centre Georges-Pompidou) à Paris de 1974 à 1977.

À Genève, René Cruse travaille à la Fédération des centres de loisirs, jusqu'à sa retraite. Il est diplômé de l'Institut universitaire d'études du développement (IUED) à Genève.

Vie politique[modifier | modifier le code]

René Cruse est candidat du Mouvement contre l'armement atomique (MCAA) aux élections législatives à Nevers en 1967, sous l'égide du Parti socialiste unifié (PSU). Cette candidature « anti-bombe nucléaire » est parrainée par Alfred Kastler, Théodore Monod et Jean Rostand[18],[19],[20]. Il est à nouveau candidat du PSU aux législatives de 1973 dans le département de l'Essonne[21]. Il est membre du PSU depuis . Il en démissionne en car il juge que « les tendances actuelles du parti s'alignent de plus en plus sur un programme commun qui ne remet pas en cause radicalement et fondamentalement les structures, les lois et les règles de l'économie du régime actuel »[22].

Œuvres[modifier | modifier le code]

  • Dialogue politique avec la mort, préface de Gilles Perrault, éditions Pour de Vrai, Cormagens, Suisse, 1990, 104 pages
  • L'ancêtre de notre avenir, préface de Francis Jeanson, éditions Golias, Lyon, 1994, 127 pages
  • En colère… toujours !, 1999, 26 pages, « en vente à la Librairie du Boulevard »
  • Un pasteur en politique, 2003, 23 pages, « en vente à la Librairie du Boulevard »
  • Au train où vont les choses, testament intellectuel, 2012, à compte d'auteur

Autobiographies[modifier | modifier le code]

  • La faute du pasteur Cruse, préface de Jean Ziegler, éditions les Lettres Libres, Paris, 1986, 202 pages (ISBN 2867510864)
  • Entretiens avec un rebelle, avec Raymond Zoller et Daniel de Roulet, préface de Daniel de Roulet, éditions L'Harmattan, collection Cheminements spirituels, Paris, 2005, 157 pages (ISBN 274758139X)
  • Tranche de vie, vie tranchée (« Web-documentaire », témoignage filmé), textes René Cruse, introduction Jacques Geoffroy, images et montage Luca Lennartz, Atelier Luca, 2011, 30 minutes. Récit de guerre basé sur des notes manuscrites portant sur la période d' à  ; récit oral accompagné de textes et complété par des images d'archives[23]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Patrick Cabanel, « René Cruse », in Patrick Cabanel et André Encrevé (dir.), Dictionnaire biographique des protestants français de 1787 à nos jours, tome 1 : A-C, Les Éditions de Paris Max Chaleil, Paris, 2015, p. 787 (ISBN 978-2846211901)
  • Béatrice Guelpa, « René Cruse », dans D'une foi à l'autre : portraits de convertis, Labor et Fides, coll. « Interreligieux », (ISBN 9782830914139). René Cruse fait l'objet de l'un des 20 portraits, en tant que « converti à l'athéisme ».
  • Daniel de Roulet, Un glacier dans le cœur, vingt-six manières d’aimer un pays et d’en prendre congé, Les éditions Metropolis, 2009, 220 p. (ISBN 978-2-88340-184-6). « René Cruse, pasteur défroqué » est l'un des chapitres.
  • Manon Widmer, René Cruse, homme de parole, Genève, Slatkine, coll. « Ils ont choisi Genève », , 120 p. (ISBN 978-2-8321-0577-1)
  • Philippe Bach, « Décès du militant pacifiste René Cruse », Le Courrier,‎ (lire en ligne, consulté le )
  • Maurice Balmet, Patrice Bouveret, Guy Dechesne, Jean-Michel Lacroûte, François Ménétrier et Mimmo Pucciarelli, Résister à la militarisation : Le Groupe d'action et de résistance à la militarisation, Lyon 1967-1984, Lyon, Atelier de création libertaire, , 324 p. (ISBN 978-2-35104-121-5)

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Bach 2017.
  2. « Un pasteur de l'Église réformée de France inculpé d'infraction à la loi sur le recrutement », Le Monde, 4 février 1959 : « Le pasteur René Cruse, de Cannes-et-Clairan (Gard), qui avec cinq de ses collègues a renvoyé son livret militaire au ministère de la défense nationale (voir le Monde du 19 octobre 1957) et a été inculpé d'infraction à la loi sur le recrutement, va être jugé prochainement ».
  3. « Un groupe de non-violents prendra le relais des deux grévistes de la faim d'Orléans », Le Monde, 26 juin 1970 : « René Cruse, responsable de mouvements pour la paix, et un prêtre, l'abbé Joseph Piegay, curé de Givors, se sont enchaînés mercredi après-midi aux grilles d'une banque, en plein centre de Lyon, pour protester contre la politique nucléaire française ».
  4. « Des pacifistes manifestent au futur P.C. atomique du Mont-Verdun », Le Progrès,‎
  5. Jean-Marc Théolleyre, « Fête de la paix face au Mont Verdun », Le Monde,‎
  6. « Note du Ministre chargé de la Défense Nationale à la Fédération protestante de France », site de la Fédération protestante de France, 15 février 1972
  7. « Le pasteur René Cruse est inculpé pour divulgation du "statut " de l'objection de conscience », Le Monde, 10 décembre 1971
  8. Loi du 21 décembre 1963 relative à certaines dispositions d'accomplissement des obligations imposées par la loi sur le recrutement, Art 11 : Est interdite toute propagande, sous quelques forme que ce soit, tendant à inciter autrui à bénéficier des dispositions de la présente loi dans le but exclusif de se soustraire aux obligations militaires.
  9. Yves Le Foll, « Service national », Journal officiel de la République française, no 41 (suite) A.N.,‎ , p. 2055
  10. « Le pasteur René Cruse est inculpé de "provocation à l'insoumission et à la désertion" », Le Monde, 9 mai 1973. Images dans le documentaire de Luca Lennartz.
  11. D.P., « Le pasteur Cruse est condamné à deux mois de prison avec sursis », Le Monde,‎
  12. Dominique Durand, « Un substitut mal embouché », Le Canard enchaîné,‎
  13. René Cruse, « Antimilitariste aujourd'hui », Politique aujourd'hui,‎ , p. 58
  14. « Dieu n'est plus ce qu'il était », Autres Temps - Les cahiers du christianisme social, n° 33-34, 1992, p. 109-128.
  15. Déjà en 1975, il signe avec Jean Fabre un article intitulé « Non violence et athéisme » dans les Cahiers de la Réconciliation.
  16. « Nitroglycérine religieuse », dans Frei denken = libre pensée = libero pensiero, Association suisse des libres penseurs, avril 2008, édition spéciale « 100 ans ASLP », p. 9-11.
  17. Jean Batou, « René Cruse s'en est allé, mais sa colère nous habite toujours », solidaritéS, no 320,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  18. Guy Guyot, « Contre toutes les bombes », Alerte atomique, numéro spécial - bilan, no Supplément au 147 « 33 ans d'actions et de réflexions... du MCAA... au MDPL »,‎ 1er trimestre 1997, p. 14
  19. Morvan Lebesque, « Nevers contre Hiroshima », Le Canard enchaîné,‎
  20. « Un pasteur candidat à Nevers pour dénoncer l'armement atomique », Le Monde, 2 juillet 1966.
  21. « Les candidatures dans l'Essonne, le Val-de-Marne, les Yvelines et la Seine-et-Marne », Le Monde, 14 février 1973.
  22. « Le pasteur René Cruse quitte le P.S.U. », Le Monde, 11 décembre 1973.
  23. « René Cruse : Tranche de vie - vie tranchée », sur le site Atelier Luca.

Annexes[modifier | modifier le code]

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Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]