Moïse Cassorla — Wikipédia

Moïse Cassorla
Nom de naissance Moïse Cassorla
Naissance
Bitola, Macédoine, Yougoslavie
Décès inconnue
Israël
Nationalité Française
Pays de résidence France, Israël
Diplôme
Activité principale
Formation

Moïse Cassorla (, Bitola, Macédoine, Yougoslavie, Royaume de Serbie)[1],[2],[3] est un rabbin français d'origine yougoslave, Grand-rabbin de Toulouse (Haute-Garonne) et après la Seconde Guerre mondiale rabbin à Paris.

Éléments biographiques[modifier | modifier le code]

Synagogue Kal di Aragon à Bitola dans l'Entre-Deux-guerres, avant d'être incendiée en 1944.

Moïse Cassorla est né le à Bitola en Macédoine, Yougoslavie, alors dans le royaume de Serbie, dans une famille de neuf enfants[4],[5],[6],[7],[8], dont il sera le seul survivant[9].

En 1936, il vient à Paris, étudier au Séminaire israélite de France (SIF)[10],[11],[12],[13]. Il compte parmi ses condisciples les futurs rabbins David Feuerwerker, Joseph M. Brandriss ou encore Ernest Gugenheim.

Synagogue Palaprat de Toulouse.

Devenu rabbin[14], il succède à Guido Scialtel, d'origine livournaise, rabbin de 1937 à 1938, et occupe dès juillet 1938 la position de Grand-rabbin de Toulouse. Il officie à la synagogue Palaprat, assisté du hazzan David Nahon, jusqu'en 1943[15],[16],[17],[18].

Entre 1940 et 1941, il se rend régulièrement en tant qu'aumônier au camp du Vernet en Ariège et tente (vainement) d'y faire libérer ses coreligionnaires belges[19]. Il se soucie également des Juifs étrangers internés dans les camps de Saint-Cyprien (Pyrénées-Orientales) ou de Gurs (Pyrénées-Atlantiques). Avec d'autres responsables de la communauté, il diffuse une circulaire, le 17 octobre 1941, appelant à la solidarité des Juifs de la région pour les centaines d'internés dans les camps de Noé et du Récébédou (Midi-Pyrénées) afin que leur soient fournis vivres, couvertures et vêtements[20]. Il sollicite l'archevêque de Toulouse, Mgr Jules-Géraud Saliège auquel il envoie chaque semaine, un compte-rendu de la situation des Juifs, lequel l'assure de son soutien dans une lettre du 1er janvier 1942, que le diocèse fera diffuser sur une radio étrangère[21],[22].

Il épouse[23] à Toulouse, le , Fanny Reicher[24] (née le à Kwaczala en Pologne)[25]. Elle est la fille de Juifs traditionalistes polonais, Joseph Reicher (né v. 1890s à Tchebinia (Trzebinia), à la frontière silésienne) et Helena Berger (née v. 1891 à Kwaczala en Pologne) qui se sont mariés après la Première guerre mondiale et sont partis s'installer immédiatement à Anvers en Belgique où Joseph devient diamantaire. Helena retourne auprès de sa mère en Pologne, le temps de mettre au monde sa fille Fanny. La famille s'agrandit ; elle parle yiddish, polonais, allemand et apprend le flamand et le français en Belgique. Les études de Fanny à l'école publique belge s'interrompent lors de la Seconde guerre mondiale[26]. Après l'invasion allemande de la Belgique, une partie de la famille Reicher tente de se réfugier à Londres mais son train est détourné vers le sud pour arriver à Toulouse où l'administration française l'assigne à résidence au village de Saint-Julia en Haute-Garonne où Joseph Reicher trouve un emploi de garçon de ferme. Helena fréquente à l'occasion la synagogue de Toulouse et y remarque le jeune rabbin Moïse Cassorla dont elle parle à sa fille. Les deux jeunes gens se rencontrent et six semaines plus tard, le couple se marie et s'installe sur le boulevard d'Arcole à Toulouse.

Moïse Cassorla parvient à empêcher que ses beaux-parents Reicher et un oncle Berger raflés lors d'une visite à un voisin et envoyés au camp de Noé (ils y resteront six mois) soient déportés dans un camp de concentration nazi mais pas la famille (avec femme et enfants) de son frère, qui y est assassinée.

Le poète Claude Vigée séjourne à Toulouse de 1940 à 1942, où il suit les cours du rabbin Cassorla dans la petite synagogue Palaprat devenue centre de la résistance juive dans le midi-toulousain. Il racontera plus tard :

«  Nous nous réunissions à la synagogue de Toulouse, rue Palaprat (il y avait là, avant la guerre, une petite communauté juive, mi-sépharade mi-ashkénaze, d’environ neuf cents personnes). Nous avions pris l’habitude de nous réunir là en secret – le régime de Vichy interdisait toute réunion, quelle qu’elle soit, de juifs dans les territoires occupés – pour nous former. Avec l’aide du rabbin Cassorla, nous avons appris peu à peu ce qu’était l’histoire juive européenne après la chute de Jérusalem. Nous en sommes venus à parler très naturellement, dans ce cercle clandestin d’études juives, de La Guerre des Juifs. Nous avons ainsi buté sur le cas de la résistance juive contre les Romains, et nous nous sommes tout de suite posé la question cruciale : que faire avec Vichy, avec la Milice, avec les nazis ? Nous étions confrontés à des problèmes terriblement semblables à ceux des juifs de cette époque-là. Nos aînés ont alors eu l’idée d’organiser un tribunal pour juger Flavius Josèphe : c’est là où se situe mon lien avec Pierre Vidal-Naquet ».

En et jusqu'à son arrestation en janvier 1944, le rabbin Nathan Hosanski devient le rabbin de Toulouse en remplacement du rabbin Cassorla[27] qui est entré dans la clandestinité.

Cette même année, la famille Cassorla de Bitola est assassinée dans le camp d'extermination de Treblinka, avec la grande majorité du reste de la communauté juive de la ville[28],[9],[29].

Saint-Julia en Haute-Garonne.

Poursuivi par la police française, Cassorla confie les bijoux de la famille et de l'argent à un prêtre puis, muni d'un sauf-conduit de Mgr Saliège, il s'enfuit avec sa femme et son beau-père à Nice, alors sous contrôle italien, où son fils José (Yeoshua) Cassorla[30],[31] naît, le 19 mai 1943. Plus tard, la famille se cache dans un couvent de montagne qu'elle doit quitter à cause des cris du bébé qui perturbent les nuits monacales et décide de se réfugier à Saint-Julia qui lui est connu, où leur fille Danielle Cassorla vient au monde, le 24 août 1944. Le village est niché en hauteur, offrant une vue de choix permettant aux guetteurs de prévenir les Cassorla en cas de danger, afin qu'ils se cachent dans les vergers alentour, le temps de l'alerte. À un moment donné, il y a eu une augmentation des activités des troupes allemandes dans la région et la famille décide de se disperser dans différentes fermes des localités autour de Saint-Julia. Quand les Cassorla peuvent enfin rentrer à Toulouse, Moïse essaie de récupérer les précieux biens familiaux auprès du prêtre à qui il les avait confiés mais ce dernier lui affirme que tout a été volé[26].

Détail extérieur à la synagogue Don Isaac Abravanel, 84 rue de la Roquette à Paris.

Après la guerre, le rabbin Cassorla devient directeur d'un centre pour enfants déplacés et orphelins à Boulogne-sur-Seine (Hauts-de-Seine) où sa famille déménage. Ensuite, il officie à la synagogue sépharade de la rue Saint-Lazare à Paris[32],[33] puis auprès de la communauté Isaac Abravanel de la rue de la Roquette jusqu'à son départ en Israël à la fin du XXe siècle.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (en)Studio portrait of Rabbi Moise Cassorla (father of the donor) in rabbinical attire. United States Holaocaust Memorial Museum..
  2. (en)Moïse Cassorla. Descendants of the Sefardim of Monastir and the Ottoman Lands..
  3. sa photo parmi les autres rabbins au Congrès rabbinique à Lyon, le 3 septembre 1940.(en) Congrès rabbinique à Lyon. 3 septembre 1940. United States Holocaust Memorial Museum..
  4. (en)Wedding portrait of one of the sisters of Moise Cassorla, United States Holocaust Memorial Museum.
  5. (en) Rabbi Moise Cassorla (father of the donor) poses with his family in front of a train. 1939. Bitola, Macedonia; Bitolj, Yugoslavia, United States Holocaust Memorial Museum.
  6. (en) Prewar portrait of the Cassorla family in Bitola, Macedonia. Around 1940, United States Holocaust Memorial Museum. Moïse Cassorla est à l'extrême gauche, avec ses frères et sœurs.
  7. (en) Family and friends, among them members of the Cassorla family gather for a celebration (probably in Bitola), United States Holocaust Memorial Museum.
  8. (en)Moise Cassorla poses with two of his sisters on a street of Bitola. 1930-1939, United States Holocaust Memorial Museum.
  9. a et b Mark Cohen, Le dernier siècle d'une communauté séfarade - Les Juifs de Monastir, 1839-1943, New York, 2003, (ISBN 1-886857-06-7).
  10. (en) Jewish rabbinical students in front of a building (Élèves du Séminaire israélite de France à Paris), 1936-1938, United States Holocaust Museum Memorial Museum. Moïse Cassorla est assis, le 2e à partir de la droite. David Feuerwerker est debout à l'extrême gauche. Joseph M. Brandriss est le premier assis à gauche. Ernest Gugenheim est le troisième debout à partir de la droite.
  11. (en)Group portrait of rabbinical students or young rabbis (probably in France). 1936-1940, United States Holocaust Memorial Museum. Moïse Cassorla est le troisiême à partir de la gauche.
  12. (en) Groupe portrait of participants in a rabbinical assembly in Lyon (la photo est signée: Congrès rabbinique à Lyon, 3 septembre 1940), United States Holocaust Memorial Museum. La photo est prise devant la porte de la Grande synagogue de Lyon, 13. Moïse Cassorla est au 2e rang et le deuxième à partir de la gauche. René Hirschler est dans la deuxième rangée, le deuxième à partir de la gauche avec un béret de chasseur alpin.
    Isaïe Schwartz est au centre, jambes croisées. Jacob Kaplan est à la droite de Isaïe Schwartz et donc à gauche en regardant la photo. David Feuerwerker est au deuxième rang, le quatrième à gauche de René Hirschler. Derrière David Feuerwerker se trouve Elie Cyper.
  13. Claude-Annie Gugenheim, « Le Grand Rabbin Ernest Gugenheim », sur judaisme.sdv.fr (consulté le ).
  14. Il est aussi un Mohel.
  15. Les Juifs dans la Résistance (région de Toulouse)..
  16. la photo du rabbin Moïse Cassorla avec Paul Roitman (le futur rabbin) prise dans la rue à Toulouse en 1942 publiée dans Betty Roitman. Paul Roitman. Repères biographiques..
  17. Colette Zytnicki, Les Juifs à Toulouse entre 1945 et 1970. Une communauté toujours recommencée, 1998, p. 58.
  18. Jean Estebe, « Chapitre I. Des années 30 à la débâcle : Les Juifs en Midi toulousain », dans Les juifs au temps de Vichy : À Toulouse et en Midi toulousain, Presses universitaires du Midi, coll. « Tempus », (ISBN 978-2-8107-0882-6, lire en ligne), p. 17–30.
  19. Jean Estebe, Les juifs au temps de Vichy: À Toulouse et en Midi toulousain, Presses universitaires du Midi, (ISBN 978-2-8107-0882-6, lire en ligne), p. 84.
  20. Jean Estebe, « Chapitre V. Les camps de la région toulousaine 1940-1944 », dans Les juifs au temps de Vichy : À Toulouse et en Midi toulousain, Presses universitaires du Midi, coll. « Tempus », (ISBN 978-2-8107-0882-6, lire en ligne), p. 91–130.
  21. Sylvie Bernay, « La propagande antisémite contre les protestations épiscopales de l'été 1942 », Revue d'Histoire de la Shoah, vol. 198, no 1,‎ , p. 245 (ISSN 2111-885X et 2553-6141, DOI 10.3917/rhsho.198.0245, lire en ligne, consulté le ).
  22. Sylvie Bernay, L'Eglise de France face à la persécution des juifs: 1940-1944, CNRS, (ISBN 978-2-271-07466-9, lire en ligne).
  23. (en)Rabbi Moise Cassorla and Fanny Reicher (parents of the donor) are greeted by friends on their wedding day as they leave the synagogue. June 25, 1942. Toulouse..
  24. (en)Fanny Reicher Cassorla (mother of the donor) holds her son Jose, then a few months old. Around 1943. Saint-Julia, Haute-Garonne, France. United States Holocaust Memorial Museum..
  25. (en)Close-up portrait of Fanny Reicher (mother of the donor) on her wedding day, June 25, 1942. United States Holocaust Memorial Museum..
  26. a et b (en) « Studio portrait of Rabbi Moise Cassorla (father of the donor) in rabbinical attire », sur ushmm.org (consulté le ).
  27. Rabbin Nathan Hosinski.
  28. (en) « Avram Sadikario | centropa.org », sur www.centropa.org (consulté le ).
  29. (en) Zamila Kolonomos, Vera Veskovi´k-Vangeli, « Bitola (Monastir), Macedonia », sur www.jewishgen.org (consulté le ).
  30. Il deviendra un architecte à Manhattan, New York, Voir, The Moïse Cassorla Family of France. cassorla.net..
  31. (en) J.Cassorla Architect, LLC. jwiz.com..
  32. Nicole Abravanel, « Synagogue Sépharade rue St. Lazare - Paris. », sur sefarad.org (consulté le ).
  33. Visité guidée de la synagogue Saint Lazare, avec Philippe Landau. akadem.org..

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]